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12 avril 2024

Esther 2.18 – 3.7

Chapitre 2

Introduction

Quand je regarde un film à la télé, je préfère qu’il se termine bien, que justice soit faite, que les bons gagnent et les méchants punis. Dans les feuilletons d’antan comme Zorro, on sait d’avance qu’il va triompher. Les histoires pour enfant ont elles aussi une bonne conclusion et dans les contes de mille et une nuits c’est pareil.

Nous sommes arrivés à la fin du premier acte du récit d’Esther où la petite orpheline juive a été élevée au rang d’impératrice. Tout se passe plutôt bien ou presque. En effet, l’envers du décor est qu’elle est maintenant la possession d’un homme capricieux et dominé par ses passions. Or ce despote, au gré de ses humeurs, risque de reléguer Esther dans son harem au même titre que ses nombreuses autres épouses de second rang. Ce n’est pas tout, car dans le lointain, de noirs nuages, tels des oiseaux de malheur, commencent déjà à se rassembler.

Verset 18

Je continue à lire dans le chapitre 2 du livre d’Esther.

En son honneur, l’empereur organisa un grand banquet pour tous ses ministres et ses hauts fonctionnaires. Ce fut le “ banquet d’Esther ”. Il accorda du repos aux provinces et distribua des cadeaux avec une générosité impériale (Esther 2.18).

Cette charmante histoire a commencé par un banquet qui a mal tourné pour la reine Vasthi puisque à cette occasion, elle fut répudiée. Voici donc un autre festin en l’honneur d’Esther.

Dans la continuation apocryphe du livre d’Esther (14.15 ss. version Septante), Esther parle ainsi : « Vous savez qu’aux jours où je parais dans la magnificence et dans l’éclat, j’ai en abomination la marque superbe de ma gloire, que je porte sur ma tête, et que je la déteste comme un linge souillé. Je ne la porte point aux jours où je ne suis point obligée de paraître. » Ce diadème est un bandeau orné d’or et de diamants.

La tradition des rois perses veut que pour des occasions spéciales, comme l’acquisition d’une nouvelle reine, ils proclament dans leurs provinces un allègement d’impôts, une exemption des corvées et quartier libre dans les casernes.

Verset 19

Je continue.

Il y eut un second ramassage de jeunes filles. Or Mardochée était assis à la porte du palais impérial (Esther 2.19).

Ce ramassage fait penser à une rafle par les Allemands durant la Seconde Guerre mondiale. Mais il s’agit simplement d’un renouvellement du harem du roi, rien de plus. Apparemment, il a un gros appétit sexuel. Quant à Mardochée, il assume ses fonctions aux portes du palais, qu’il ne faut pas confondre avec les portes de Suze, la capitale impériale.

Dans les villes antiques, le tribunal est composé des anciens de la cité et siège sur la place à l’entrée principale. Tôt ou tard, tous les habitants doivent passer par là et c’est à ce moment-là que les juges mettent la main au collet de ceux qui ont des comptes à rendre à la justice. C’est aussi à cet endroit que se font toutes les opérations légales comme la transmission d’héritage par exemple.

La position exacte de Mardochée ne nous est pas donnée, mais comme je l’ai déjà dit, il semble qu’il est portier et contrôle donc les allées et venues au palais. La suite montre que cette place lui permet de communiquer avec Esther, de connaître ceux qui fréquentent le palais et même ce qui s’y complote.

Verset 20

Je continue.

Esther avait tenu secrète son origine familiale et sa nationalité, comme le lui avait ordonné Mardochée. Elle continuait à se conformer à ses instructions comme au temps où elle était encore sous sa tutelle (Esther 2.20).

Mardochée a ordonné à Esther de ne pas révéler son identité juive, un silence qu’elle observe scrupuleusement. On découvre aussi qu’il ne cherche pas à exploiter à son profit la position d’Esther car touts ignorent qu’elle est sa cousine et sa fille adoptive. Tous deux occupent des positions clés à l’intérieur du palais ce qui va s’avérer fort utile par la suite.

Verset 21

Je continue.

À cette époque, alors que Mardochée exerçait donc des fonctions au palais impérial, deux eunuques de l’empereur, Bigtân et Térech, qui faisaient partie de la garde postée à l’entrée du palais, furent exaspérés par l’empereur Xerxès et cherchèrent à l’assassiner (Esther 2.21).

Que l’empereur soit agaçant, cela ne fait aucun doute, mais il doit vraiment être imbuvable pour susciter une telle haine. Ces deux hommes étant des gardes, ils sont armés et peuvent s’approcher du roi sans attirer l’attention.

Dans les cours orientales, les intrigues sont monnaie courante et il y a toujours quelqu’un qui veut faire la peau du despote en place. Xerxès va échapper à cette tentative de meurtre, mais ce n’est que reculer pour mieux sauter car de toute façon il est assassiné 12 ans plus tard par un dénommé Artaban qui est le commandant de sa garde personnelle.

Versets 22-23

Je finis ce chapitre 2.

Mardochée en eut connaissance et il en avertit l’impératrice Esther qui mit l’empereur au courant de la part de Mardochée. Après enquête, l’information s’avéra exacte. Les deux coupables furent pendus à une potence et l’affaire fut consignée dans le livre des Annales en présence de l’empereur (Esther 2.22-23).

Le livre des Annales est constitué de tablettes sur lesquelles on consigne les faits importants concernant l’empire. Les rois de Perse prennent grand soin de conserver la mémoire de ce qui leur arrive. Dans son expédition contre la Grèce, Xerxès était accompagné de scribes qui notaient en sa présence, qui faisait quoi sur le champ de bataille pour ensuite punir ou récompenser ses troupes.

Donc, Mardochée apprend qu’on veut assassiner l’empereur et ça ne fait pas ses affaires parce que si le complot réussit, non seulement il risque de perdre sa place mais Esther ne sera plus reine et deviendra une concubine parmi des centaines d’autres. Alors au final, il vote pour Xerxès. Sa position lui permet d’entrer en contact avec sa cousine qui rapporte à l’empereur que sa vie est menacée et que c’est Mardochée qui le lui a fait dire. De cette manière, son nom figure dans le livre des Annales, ce qui va s’avérer de la plus grande importance par la suite. Comme la justice était expéditive, après enquête et confirmation, les conspirateurs sont exécutés. L’incident est oublié et l’action de Mardochée en faveur du roi également.

Chapitre 3

Introduction

Nous arrivons au chapitre 3 où a lieu un événement qui s’est souvent répété dans l’histoire du peuple juif. Quelqu’un du nom d’Haman, décide de les exterminer. Plus tard, ce sera l’inquisition, les pogroms, les nazis et j’en passe. C’est un pharaon qui a été le premier à  persécuter les Hébreux. Il les a d’abord mis en esclavage, mais comme ils continuaient à prospérer, il a décidé d’éliminer tous les nouveau-nés mâles, mais Dieu a fait capoté son projet. Je commence à lire ce chapitre.

Verset 1

Quelque temps après ces événements, l’empereur Xerxès éleva en dignité Haman, fils de Hammedata du pays d’Agag : il le promut au rang de premier ministre et lui donna ainsi la prééminence sur tous les ministres de son gouvernement (Esther 3.1).

Cela fait déjà 4 ans qu’Esther est impératrice et la vie suit son cours quand tout à coup entre sur scène le sinistre personnage de ce livre. Le texte ne mentionne aucune raison qui justifie l’élévation d’Haman à la dignité de grand vizir afin de souligner l’injustice politique faite à Mardochée qui a sauvé la vie de l’empereur. Lui n’a reçu aucune promotion particulière alors qu’Haman devient le numéro deux de l’empire. Cet homme sournois est peut-être un descendant d’Agag, roi des Amalécites, ennemis héréditaires d’Israël. Dès que les Hébreux sont sortis d’Égypte, cette tribu les a attaqués sans raison. Je lis le passage en le compressant :

Les Amalécites vinrent attaquer Israël à Rephidim. Alors Moïse dit à Josué : — Choisis-nous des guerriers et demain tu iras combattre les Amalécites. Moi, je me tiendrai au sommet de la colline, avec le bâton de Dieu à la main. Josué remporta la victoire sur les Amalécites à la pointe de l’épée. L’Éternel dit à Moïse : — Consigne cela par écrit pour qu’on en garde le souvenir et déclare à Josué que j’effacerai complètement le souvenir d’Amalec de sous le ciel. Puis il ajouta : — Puisqu’on s’est attaqué au trône de l’Éternel, l’Éternel fera la guerre à Amalec de génération en génération (Exode 17.8-16).

Quand Saül, l’ancêtre de Mardochée, était roi d’Israël, l’Éternel lui a ordonné d’exterminer les Amalécites, mais il ne la pas fait. Cette désobéissance risque maintenant d’avoir de fâcheuses conséquences puisque voilà qu’on se retrouve entre frères ennemis. Pour l’auteur, la lutte  entre Mardochée et Haman est la continuation du vieux conflit entre Israël et les Amalécites.

Verset 2

Je continue le texte.

Par ordre de l’empereur, tous les fonctionnaires impériaux en poste au palais devaient s’agenouiller et se prosterner sur le passage de Haman. Mais Mardochée ne s’agenouillait pas et ne se prosternait pas devant lui (Esther 3.2).

En Orient, on se prosterne comme on respire ; c’est la marque habituelle de respect envers un haut dignitaire et ce n’est pas assimilé à de l’idolâtrie. Ce geste est fréquent dans l’Ancien Testament. Par exemple à l’époque de David, un passage dit : La femme de Teqoa alla parler au roi ; elle s’inclina face contre terre, pour se prosterner, et s’écria : — Viens à mon secours, ô roi ! (2Samuel 14.4).

Mardochée se prosterne évidemment devant l’empereur, mais pas devant Haman. S’il reste debout, ce n’est pas pour des raisons religieuses, mais par haine de race (Exode 17.16), parce que le vizir est un Amalécite, ennemi héréditaire de son peuple. D’ailleurs il va reconnaître que c’est parce qu’il est juif qu’il ne s’incline pas jusqu’à terre devant Haman. Il n’a pas le moindre respect pour lui, ce que le texte précise plusieurs fois. Je cite un passage :

En passant devant la porte du palais impérial, Haman aperçut Mardochée. Celui-ci ne se leva pas et ne tremblait pas devant lui. Alors Haman fut rempli de fureur contre lui (Esther 5.9).

Esther et son père adoptif auraient mieux fait de retourner dans le pays d’Israël, cependant, tous deux sont prêts à risquer leur vie soit pour l’honneur de leur peuple, soit pour le sauver.

Versets 3-4

Je continue le texte.

Ses collègues lui demandèrent : — Pourquoi désobéis-tu à l’ordre de l’empereur ? Tous les jours, ils lui disaient cela, mais Mardochée ne les écoutait pas. Finalement, ils signalèrent la chose à Haman pour voir si Mardochée s’en tiendrait à ses paroles, car il leur avait dit qu’il était Juif (Esther 3.3-4).

En avouant son origine juive, Mardochée dit aussi qu’il croit que l’Éternel est le seul Dieu et créateur du ciel et de la terre. Tous les Juifs vénèrent le Dieu unique et vrai, et ne se courbent ni devant les idoles, ni devant un homme en signe d’adoration.

Dans la continuation apocryphe du livre d’Esther, Mardochée fait la prière suivante : « Je ne me prosternerai devant personne si ce n’est devant toi, Seigneur. » Si Haman demande non pas une simple marque de respect mais un acte d’adoration, alors aucun Juif ne s’inclinera devant lui ce qui expliquerait la décision d’Haman de se venger sur le peuple tout entier.

Dans le livre de Daniel, les ennemis du prophète sont jaloux et cherchent à se débarrasser de lui. Comme ils ne trouvent rien à lui reprocher, ils décident d’utiliser sa foi monothéiste pour le coincer. Ils manipulent alors l’empereur Darius, le père de Xerxès, en flattant son orgueil. C’est un peu comme dans la fable du corbeau et du renard. Finalement, Darius ne se sent plus et accepte d’émettre un décret dans tout l’empire selon lequel lui seul peut être adoré comme dieu. Je cite le passage :

Tous les ministres de l’empire, les préfets et les satrapes, les conseillers et les gouverneurs ont décidé à l’unanimité en conseil qu’il fallait publier un édit impérial pour mettre en vigueur une interdiction stricte. Selon cet édit, quiconque, pendant les trente jours qui suivent, adressera une prière à quelque dieu ou quelque homme que ce soit, si ce n’est à toi, Majesté, sera jeté dans la fosse aux lions (Daniel 6.8).

Or, le premier et second commandement du décalogue ordonnent :

Tu n’auras pas d’autre dieu que moi. Tu ne te prosterneras pas devant des idoles et tu ne leur rendras pas de culte, car moi, l’Éternel, ton Dieu, je suis un Dieu qui ne tolère aucun rival (Exode 20.3, 5).

Aujourd’hui, les multitudes se courbent non plus devant un homme, mais devant Mammon le dieu de l’argent et devant Éros, le dieu du sexe. Haman a tout pour déplaire : il est Amalécite et il veut peut-être se faire passer pour un dieu. Mais le Juif Mardochée ne va pas lui accorder la moindre parcelle de respect.

Verset 5

Je continue le texte.

Quand Haman eut constaté que Mardochée ne s’agenouillait pas et ne se prosternait pas devant lui, il devint furieux (Esther 3.5).

Il semble que jusqu’à présent Haman n’ait pas pris garde à Mardochée ; qu’est-ce qu’une personne dans la foule ? Mais maintenant que les serviteurs du roi lui ont fait remarquer que Mardochée le méprise, c’est un défi à son pouvoir et il en est malade. Ce refus est pour lui un crime de lèse-majesté ce qui révèle sa petitesse. Il aurait dû ignorer Mardochée, mais non, en bon mégalomane, il faut que toute la terre s’incline devant lui ; il veut rivaliser avec l’empereur. Plus tard, il va même aller jusqu’à pleurer dans les jupons de sa femme parce que Mardochée ne l’honore pas.

Verset 6

Je continue.

On lui avait appris à quel peuple Mardochée appartenait, et il jugea insuffisant de porter la main sur Mardochée seulement. Il résolut donc d’exterminer tous les Juifs, compatriotes de Mardochée, qui se trouvaient dans tout l’empire de Xerxès (Esther 3.6).

Nous arrivons au premier grand tournant de cette histoire ; la tension vient d’atteindre un premier plateau. Cet homme machiavélique ne veut pas s’en prendre uniquement à Mardochée mais à tout le peuple juif. C’est le premier cas d’antisémitisme de grande envergure rapporté par un livre d’histoire. Haman rêve d’un immense bain de sang qui lavera l’offense qu’il a subie. La menace qui pèse sur la race d’Israël est très sérieuse.

Si le massacre s’étend à toutes les provinces, il va aussi concerner les Juifs qui sont retournés dans leur pays ; eux aussi seront exterminés et la nation d’Israël renaissante disparaîtra pour de bon. L’heure est grave, car si Haman réussit, les promesses que Dieu a faites aux ancêtres d’Israël et son plan pour l’humanité seront rendues caduques. Bien entendu, cela est impossible. Dans le livre de Job, en parlant de l’Éternel, l’auteur dit : Je sais que tu peux tout, et que rien ne saurait t’empêcher d’accomplir les projets que tu as conçus (Job 42.2).

Les hommes peuvent bien concevoir autant de stratagèmes diaboliques qu’ils veulent, Dieu retournera toutes les situations qui vont à l’encontre de sa volonté. Il a toute une panoplie d’interventions possibles : les démons, les anges, les miracles, le hasard, les actions humaines bonnes ou mauvaises, les concours de circonstances et bien d’autres encore. Haman ne sait pas encore qu’en s’attaquant aux Juifs, il s’en prend au Dieu du ciel. Quand il s’en apercevra, il sera trop tard. Parmi les promesses que l’Éternel a faites à Abraham, il y a celle-ci : Je bénirai ceux qui te béniront et je maudirai ceux qui t’outrageront (Genèse 12.3).

Le projet d’Haman va mal finir. Il aura son bain de sang, mais les victimes ne seront pas celles qu’il escomptait. Depuis que les Juifs sont le peuple choisi, ils assistent aux funérailles de tous les régimes qui ont tenté de les exterminer. Les promesses que Dieu a faites à Abraham tiennent toujours.

Verset 7

Je continue le texte.

Le premier mois, c’est-à-dire le mois de Nisan de la douzième année du règne de Xerxès, Haman fit tirer au sort — ce qui se dit “ Pour ” — en passant en revue un jour après l’autre et un mois après l’autre. Le sort tomba sur le douzième mois qui est le mois d’Adar (Esther 3.7).

Jour après jour, la haine d’Haman augmente car chaque fois qu’il se rend au palais, tout le monde se prosterne bien bas devant lui sauf le Juif Mardochée.

C’est au mois de Nisan, le premier de l’année religieuse juive que les Juifs célèbrent la Pâque qui commémore la délivrance des Hébreux du pays d’Égypte. Il est ironique que ce même mois Haman a commencé à comploter la destruction des Juifs.

Comme la majorité des Perses, le grand vizir est très superstitieux, c’est pourquoi il a recours à un tirage au sort afin de déterminer le jour favorable pour l’exécution de son plan meurtrier. L’auteur donne ici l’explication sémantique de l’appellation « fête de Pourim ». Ce nom vient de « tirer au sort », qui se dit « pour » en perse.

Bien que les grands massacres aient toujours été chose assez banale en Orient, ce que prépare Haman est de très grande envergure, il faut donc qu’il s’assure la faveur des dieux. On ne sait pas comment il tire au sort, mais selon le texte, il le fait méthodiquement pour chaque jour de tous les mois de l’année à venir. C’est le jour et le mois qui obtiennent les meilleurs résultats, que Haman considère désignés par la divinité. Le grand vizir ne se laisse pas détourner de son projet par la décision du sort, qui en éloigne l’exécution le plus loin possible. Le sort, c’est à dire Dieu, recule l’exécution de ce plan d’un an entier, afin de donner à Mardochée et à Esther le temps d’en arrêter l’exécution. L’auteur laisse entendre mais sans le dire, que l’Éternel agit dans les coulisses de l’Histoire en accordant à son peuple le temps qu’il faut pour déjouer ce complot.

Cette histoire témoigne que c’est le Dieu d’Israël et non pas les divinités perses, babyloniennes ou le destin, qui dirige le cours des choses en ce bas-monde.

Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.

oct. 16 2024

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