#09 Pourquoi les méchants prospèrent-ils ? (Job 19.25-22.19)
Job n’espère plus rien en ce bas-monde et pourtant, c’est de la profondeur de son désespoir que sa foi s’élève au plus haut degré.
Je sais que mon protecteur est vivant et qu’il se lèvera pour moi après que je serai poussière. Quand je n’aurai plus de chair, je verrai Dieu. Je le verrai de mes yeux ; il ne sera plus un étranger et il me sera favorable. Mon âme languit d’attente (Job 19.25-27).
Alors qu’ici-bas Job accuse Dieu de le harceler sans raison, il est convaincu que dans l’Au-delà, Dieu prendra sa défense. Au lieu d’un Dieu qui lui est hostile, Job sera en présence d’un Dieu ami. Cette confiance en Dieu envers et contre tout défie toute logique.
Vous qui trouvez en moi la racine du mal, votre acharnement est passible du glaive. Ainsi vous apprendrez qu’il y a un jugement (Job 19.28-29)
Après s’être élevé sur les ailes de la foi, Job continue par une mise en garde car son Défenseur punira ceux qui l’accusent injustement. Mais son discours a irrité Tsophar qui le reprend vertement.
Je commence le chapitre 20.
J’entends des remontrances qui me sont une injure. Ne sais-tu pas que le triomphe du méchant est de courte durée et qu’il périra comme une ordure. Le ciel dévoilera sa faute, et contre lui la terre se dressera, et au jour de la Colère, tout ce qu’il possède est emporté. Tel est le sort que Dieu réserve à ceux qui font le mal (Job 20.1-7 ; 27-29).
Alors que Job avait invoqué la terre et le ciel pour qu’ils témoignent en sa faveur, Tsophar affirme, au contraire, qu’ils témoigneront contre lui. Son long discours est de la belle poésie mais c’est une diatribe cruelle et toujours plus de la même chose : la prospérité des impies ne dure pas et leur jugement est certain. En d’autres mots, les malheurs de Job prouvent d’une façon irréfutable qu’il est gravement coupable. Le grand tort de ces trois amis est d’attribuer à Dieu leur opinion et leurs sentiments personnels, ce qu’il leur reprochera vertement.
Dans le chapitre 21, Job répond à Tsophar avec force. Alors que jusqu’à présent il était sur la défensive en affirmant son innocence, maintenant il passe à l’attaque et va réfuter l’argument simpliste avancé par ses amis.
Écoutez, je vous prie, accordez-moi au moins cette consolation. Pourquoi ceux qui font le mal demeurent-ils en vie ? Leurs petits-enfants prospèrent, leurs maisons sont paisibles et leurs troupeaux sont vigoureux. Leurs jours s’écoulent dans le bonheur et c’est en un instant qu’ils rejoignent la tombe. Or, ils disaient : « Qui est donc le Tout-Puissant pour que nous le servions ! » On ne voit pas souvent s’éteindre la lampe des méchants ou la ruine fondre sur eux. Voulez-vous enseigner la science à Dieu, lui qui gouverne les êtres célestes ? Un tel meurt plein de force et dans la sérénité. Tel autre s’éteint l’amertume dans l’âme (Job 21.1-17,22-26).
Après avoir demandé une écoute compatissante, Job fait remarquer que malgré leur impiété, souvent les méchants prospèrent car Dieu ne les traite pas comme ils le méritent et en plus ils ont une belle mort. En effet, quelqu’un mourra prospère ou démuni, qu’il ait mené une vie de vice ou de vertu. Job montre ainsi à ses amis que leur conception du monde moral est contraire à la réalité et qu’ils essaient même de l’imposer à Dieu.
Je connais les jugements que vous portez sur moi. Mais au jour du malheur, le méchant est épargné, et qui lui fait payer le mal qu’il a fait ? Il est enterré en grande pompe et un immense cortège marche à sa suite (Job 21.27-33).
Je sais, dit Job, que parce que je souffre, vous voulez me faire avouer des crimes, mais ici-bas, il n’y a pas de rapport entre l’impiété et le jugement de Dieu, et en plus, la prospérité des impies commande l’admiration. Cette intervention de Job conclut la deuxième passe d’armes ou second cycle de discours. Nous arrivons au troisième et c’est Éliphaz qui ouvre le feu.
Importe-t-il à Dieu que tu sois juste ou pas ? Crois-tu qu’il te punit pour ton amour pour lui ? N’es-tu pas coupable de nombreux péchés ? Tu dépouillais tes voisins, tu refusais l’eau à l’assoiffé et le pain à l’affamé. Tu protégeais l’homme violent. Tu étais sans pitié envers les veuves et les orphelins. Voilà pourquoi tu es dans la détresse (Job 22.1-11).
Job vient de démolir le raisonnement simpliste de ses amis en leur rappelant que les impies sont souvent heureux jusqu’à leur fin. Mais Éliphaz reste sur ses positions et il veut toujours faire avouer à Job les actes violents qu’il lui suggère, car selon lui, c’est la seule explication à sa détresse. Il ne lui est jamais venu à l’esprit que la souffrance du juste peut glorifier Dieu.
Tu as dit : Dieu est enveloppé de nuées ; il ne voit rien. Tiens-tu à rester avec ceux qui font le mal ? Prématurément ils sont retranchés et les justes se réjouissent (Job 22.14-16, 19).
Éliphaz crache le feu. Il prête à Job des paroles qu’il n’a pas dites, l’accuse d’avoir fait le mal en cachette, puis il déclare être un juste qui se réjouit de la chute des impies comme Job.