Psaumes 11.1 – 13.6
Psaume 11
Introduction
« Au danger, on connaît les braves », dit-on. C’est vrai, mais il faut nuancer. Si je suis armé d’un simple couteau et qu’un ours me poursuit, je crois que je choisirais la fuite. Mais si la bête menace ma famille, alors il faudra bien lui faire face. Il arrive aussi que dans certaines circonstances de la vie où la défaite est certaine, on doive quand même se battre jusqu’à donner sa vie pour défendre un certain idéal. Il existe bon nombre d’histoires vraies et de films qui relatent ce genre de drame. Mais en dehors des situations extrêmes, lorsque l’issue de l’affrontement ne fait aucun doute, il est beaucoup plus sage de s’enfuir à toutes jambes, quitte à combattre plus tard quand les circonstances seront plus favorables. Mais les situations de vie ne sont pas toujours simples au point où la décision à prendre est évidente et souvent, nous sommes dans le flou. Alors, comment agir ?
C’est un peu le dilemme cornélien que David rencontre dans sa vie. Dans le Psaume 11, il est tenté de fuir devant ses adversaires comme le lui conseillent ses compagnons. Mais son sens du devoir lui dicte de faire face et d’avoir confiance en Dieu. Quelqu’un a présenté le Psaume 11 de la façon suivante :
Le chantre d’Israël a sa vie en danger. Certains de ses compagnons timorés lui conseillent de chercher refuge dans la fuite. Cependant, débordant de confiance en Dieu, il rejette leurs suggestions, car il croit que l’Éternel, le juste Roi, n’abandonne pas ses serviteurs même s’il les met à l’épreuve. Ce ne sont pas les justes, mais les méchants qui devraient trembler de peur. Ce psaume est si bref et son histoire si indéfinie qu’il n’est pas facile de dire avec certitude à quel épisode de la vie de David il se rapporte. Le meilleur choix est probablement entre les persécutions dont David fut victime de la part du roi Saül, et la rébellion de son fils Absalom contre lui. La deuxième solution semble la meilleure. Dans ce cas, ce sont ses amis et compagnons d’armes qui lui conseillent de fuir dans les montagnes comme il l’avait déjà fait auparavant alors que Saül était à ses trousses. Un autre argument en faveur de cette option est l’expression “ lorsque les fondements sont renversés ” qui semble bien indiquer une période d’instabilité politique quand la loi et l’ordre sont bafoués.
Verset 1
Le psaume 11 se compose de deux strophes de trois versets chacune, qui sont suivies d’une courte conclusion. Je commence à le lire.
Au chef de chœur. Un psaume de David. Oui, j’ai fait mon refuge de l’Éternel. Pourquoi alors me répéter : “ Prends ton vol, comme un passereau, afin de fuir dans les montagnes ” ? (Psaumes 11.1).
Il s’agit très probablement des montagnes de Judée. Comme cela a déjà été noté, à plusieurs moments de sa vie, David est pourchassé comme du vulgaire gibier par différents adversaires, dont le roi Saül et certains ennemis d’Israël. Ces événements sont presque chaque fois pour lui l’occasion de rédiger des prières à l’Éternel qui plus tard sont intégrées au psautier.
Face à un problème, ma première impulsion est de vouloir le résoudre le plus rapidement possible par n’importe quel moyen ou encore de faire comme si « tout va bien, Madame la marquise ». Cependant, cette réaction « sauve qui peut » ne résout rien. On peut souhaiter de toutes ses forces fuir ses difficultés, mais ce n’est pas souvent possible parce qu’elles nous collent à la peau. Où qu’on aille, on porte sur soi le problème ou ses conséquences.
Dans ce psaume, les compagnons de David lui conseillent de s’enfuir comme un oiseau pour échapper à ses poursuivants. Mais lui trouve ses amis trop craintifs et refuse parce que prendre la fuite renierait sa confiance en Dieu. La prudence dicte sans doute l’abandon du navire qui coule, mais la déclaration de David : « j’ai fait mon refuge de l’Éternel » est une profession de foi qui s’oppose à cette suggestion.
Verset 2
Je continue.
Vois les méchants bander leur arc, poser leur flèche sur la corde pour tirer dans l’obscurité sur ceux dont le cœur est intègre (Psaumes 11.2).
Ces mots sont à prendre aussi bien au sens propre que figuré. David est l’objet d’attaques armées, mais aussi de propos calomniateurs. Un attentat se prépare. Absalom, fils de David, et les conspirateurs qui se sont joints à lui veulent tuer David le plus rapidement possible alors qu’il est affaibli et pris de court. Ils savent qu’il est un guerrier redoutable et qu’il ne faut surtout pas lui donner le temps de reprendre des forces. Mais sur les conseils d’un fidèle ami de David qui a feint de se joindre à lui, Absalom a tergiversé. Mal lui en a pris. Il est franchement stupide de confronter son père et les hommes aguerris qui l’accompagnent, car ils sont plus expérimentés que lui et son armée. Ils savent se battre en toute circonstance et sur n’importe quel terrain. Au moment de la bataille décisive, David demandera à ses trois chefs de guerre de ne pas tuer Absalom (2Samuel 18.5), mais l’un d’entre eux, Joab, qui n’a que de la haine pour Absalom lui plantera trois pieux dans la poitrine (2Samuel 18.14).
Verset 3
Je continue le Psaume 11.
Lorsque les fondements sont renversés, que peut bien faire l’homme droit ? (Psaumes 11.3).
Lorsque le droit et l’ordre moral vacillent, les impies ont carte blanche et alors malheur aux innocents. C’est exactement ce qui se passe dans bon nombre de pays africains mais nous ne sommes guère mieux lotis car nous vivons dans une société occidentale dont le fondement judéo-chrétien a explosé. La nouvelle moralité humaniste et libertine a pris le relais et on a déjà commencé à récolter les fruits amers de cette semence corrompue, le SIDA par exemple.
Verset 4
Je continue.
L’Éternel est dans son saint temple, l’Éternel a son trône au ciel, de ses yeux il observe : il sonde les humains (Psaumes 11.4).
À l’agitation qui se reflète jusque dans le style de la strophe précédente, David oppose le langage calme de la foi. L’Éternel, ce nom oublié par les amis craintifs de David, contient en lui-même la réponse à leurs conseils.
David regarde au-delà de sa situation et fixe son attention sur la position glorieuse de son Dieu qui du haut des cieux règne en souverain maître sur tout l’univers. C’est ce qui lui donne le courage et la sérénité de résister au méchant. Quand les fondations du juste se dérobent sous ses pieds, il peut encore se tourner vers l’Éternel qui habite son sanctuaire céleste et que rien ne peut ébranler. Plus que tout, la vision de Dieu sur son trône donne à la vie sa stabilité et la foi authentique résiste quelles que soient les circonstances. C’est ce que Calvin appelle « la persévérance des saints ».
Bien qu’humainement parlant, Abraham n’avait plus aucun espoir d’avoir un fils, l’Écriture dit qu’il « eut confiance en l’Éternel (Genèse 15.6) », ce qui veut dire que par la foi il s’est accroché à Dieu et à sa promesse.
Verset 5
Je continue.
L’Éternel éprouve ceux qui sont justes, mais il déteste le méchant et l’homme épris de violence (Psaumes 11.5).
Dieu soumet à l’épreuve tous ceux qui lui font confiance, pour les affermir et pour sa gloire. Ce concept est enseigné dans les Écritures mais pas évident à comprendre. Le Seigneur me demande de lui faire confiance parce qu’il sait ce qu’il fait. Quant aux émissaires du mal, ils pensent pouvoir passer au travers des mailles du filet, mais ils sont dans le collimateur divin.
Il est vrai que Dieu aime indifféremment tous les êtres humains et qu’il a envoyé son Fils dans le monde pour mourir sur la croix afin de les racheter. Mais comme je le dis de temps en temps, Dieu n’est pas un papa gâteau qui se balade sur un petit nuage rose le sourire aux coins des lèvres et il déteste les malfaisants qui rejettent Jésus comme leur sauveur.
Verset 6
Je continue.
Il fait pleuvoir sur les méchants du charbon, du feu et du soufre. Il les expose au vent brûlant : voilà la part qu’il leur réserve (Psaumes 11.6).
David décrit la fin ultime du méchant non repentant. Il a probablement à l’esprit le jugement de Sodome et Gomorrhe tel qu’il est relaté dans le livre de la Genèse. Le simoun et le siroco sont des vents brûlants qui soufflent du désert et dessèchent tout sur leur passage.
Verset 7
Je finis le Psaume 11.
Car l’Éternel est un Dieu juste, un Dieu qui aime la justice. Les hommes droits verront sa face (Psaumes 11.7).
David établit un contraste saisissant entre les méchants et les justes. Les premiers subissent le feu du jugement tandis que les seconds ont le privilège de voir la face de Dieu. Ils sont admis en sa présence et jouissent de sa faveur.
Psaume 12
Introduction
Nous arrivons au Psaume 12. Les circonstances de sa rédaction ne nous sont pas données mais plusieurs incidents de la vie de David peuvent servir de toile de fond, en particulier quand il est pourchassé sans relâche par le roi Saül. Ce psaume appartient aux nombreuses plaintes à propos des succès des impies, mais il exprime aussi la confiance absolue en l’Éternel de David qui croit dur comme fer qu’il sera délivré de ses oppresseurs.
Versets 1-3
Je commence à le lire.
Au chef de chœur, un psaume de David, à chanter avec accompagnement de la harpe à huit cordes. Au secours, ô Éternel ! Il n’y a plus d’homme pieux, on ne peut plus se fier à personne. Chacun trompe son prochain, lui disant des flatteries, la duplicité au cœur (Psaumes 12.1-3).
Le début et la fin de ce psaume soulignent la corruption du monde car les fonctions les plus hautes sont occupées par des hommes pervers et corrompus. Le mensonge et la langue de bois règnent suprême tandis que les hommes droits et francs sont exclus de la vie publique. C’est un peu ce qu’éprouvait le prophète Élie qui croyait être le dernier des serviteurs de l’Éternel (1Rois 19:14). Ce psaume est d’actualité et c’est la plainte des fidèles à Dieu de tous les temps qui gémissent à cause de l’iniquité ambiante.
Versets 4-5
Je continue.
Que l’Éternel extermine ces gens aux lèvres flatteuses et à la langue arrogante. Qu’il retranche ceux qui disent : “ Notre langue nous rend forts, nos alliées, ce sont nos lèvres, qui dominerait sur nous ? ” (Psaumes 12.4-5).
Cette description correspond assez bien à l’époque du roi Saül. Malheureusement, on trouve aussi ces tares dans la chrétienté. Jude écrit :
Ces hommes-là sont d’éternels mécontents, toujours à se plaindre de leur sort, et entraînés par leurs mauvaises pulsions. Ils ont à la bouche des paroles hautaines et flattent les gens pour en tirer profit (Jude 16).
Verset 6
Je continue.
Mais l’Éternel dit : “ À cause des pauvres qui sont opprimés et des malheureux qui vont gémissant, maintenant, moi j’interviens pour apporter le salut à ceux qui sont méprisés ” (Psaumes 12.6).
Nous avons ici la déclaration de l’Éternel qui change le cours des événements. Littéralement, il dit : « pour mettre en lieu sûr ceux contre qui on souffle ou on crache », ce qui est une insulte terrible au Moyen-Orient. À cette époque comme aujourd’hui d’ailleurs, les hommes iniques sont comme le loup qui essaie de manger les trois petits cochons. Ils soufflent de toutes leurs forces pour éliminer ceux qui entravent leur chemin. Deux des petits cochons ont ainsi perdu leur maison faite de paille et de branches, respectivement. Ce ne sont pas des matériaux de construction qui résistent au vent ou aux intempéries. Mais la maison du 3e petit cochon ayant été fabriquée en dur, elle a résisté au loup. Ce conte illustre l’Éternel seul est une forteresse et un refuge.
Verset 7
Je continue.
Les paroles du Seigneur, ce sont des paroles pures, c’est de l’argent affiné, sept fois purifié par le feu dans un creuset (Psaumes 12.7).
Le psalmiste fait allusion à une technologie métallurgique qui consiste à fondre l’argent dans un creuset afin de le séparer des scories. Il établit un contraste saisissant entre les paroles des impies qui ne sont que mensonges et celles de Dieu qui sont pures, sans la moindre fausseté.
Les temps changent, la culture évolue, les us et coutumes aussi. Les valeurs et les mœurs s’adaptent et les tabous tombent. Ce qui auparavant était un vice devient une façon de vivre respectable. Comment les honnêtes gens peuvent-ils s’y retrouver ? En se basant uniquement sur l’enseignement des Écritures qui ne changent pas au gré des circonstances et qui seules constituent l’étalon mesure des comportements justes aux yeux de Dieu.
Verset 8
Je continue.
Éternel, tu tiens parole et tu nous protégeras toujours contre les gens de notre temps (Psaumes 12.8).
Jésus a repris cette expression plusieurs fois. Je le cite :
À qui donc pourrais-je comparer les gens de notre temps ? — Ces gens de notre temps qui sont mauvais et infidèles à Dieu réclament un signe miraculeux. Le Fils de l’homme sera un signe pour les gens de notre temps (Matthieu 11.16 ; 12.39 ; Luc 11.30).
Le croyant s’approprie la Parole de Dieu qui est la vérité. Dieu tient ses promesses et ceux qui se confient en lui sont sous sa protection, non pas d’une manière absolue puisque le malheur atteint aussi bien le juste que le méchant. Cette constatation vexante fait d’ailleurs l’objet de longs exposés de plusieurs auteurs de l’Ancien Testament comme Job. Cependant, les croyants disposent d’un avantage certain, celui de pouvoir invoquer le nom de l’Éternel en l’appelant à leur secours.
Verset 9
Je finis le Psaume 12.
Lorsque des gens abjects s’élèvent parmi les humains, les méchants se promènent de toutes parts (Psaumes 12.9).
En Israël, il y a toujours eu des gens pieux et une majorité d’incrédules qui méprisent Dieu. La pègre se multiplie toujours plus vite que les honnêtes gens ce qui fait que notre civilisation connaît une forte croissance de l’impiété.
Psaume 13
Introduction
Nous arrivons au psaume 13. Avec les précédents, il fait partie d’une série de prières poignantes qui sont des appels au secours. C’est l’expérience personnelle de David, mais cette prière est applicable à ceux qui se trouvent dans une situation de détresse.
Le Psaume 13 n’indique pas plus que les autres les circonstances qui ont motivé David à rédiger cette prière. Il est toutefois probable qu’il s’agit à nouveau d’un épisode de sa vie alors qu’il est aux abois, poursuivi par le roi Saül qui veut à tout prix lui faire la peau. Nous savons d’après les livres historiques qu’il s’est réfugié plusieurs fois dans une caverne forteresse appelée grotte d’Adoullam. Jour après jour, sa situation devient de plus en plus désespérée, et sa prière reflète son état d’âme. Plainte, prière, et action de grâces se succèdent dans les trois strophes de ce psaume. Elles sont de longueur inégales. La première où s’exhale la plainte, est la plus longue ; puis le cœur du psalmiste trouve la force de s’adresser à Dieu ; la dernière strophe, la plus courte, est la sérénité retrouvée par le psalmiste grâce à sa foi en l’Éternel. La prière est la juste réaction du croyant dans l’épreuve et le remède contre le découragement.
Versets 1-3
Je commence à lire le psaume 13.
Au chef de chœur. Psaume de David. Jusques à quand, ô Éternel ? M’oublieras-tu sans cesse ? Jusques à quand seras-tu loin de moi ? Jusques à quand aurai-je des soucis et des chagrins au cœur à longueur de journée ? Jusques à quand mon ennemi aura-t-il le dessus ? (Psaumes 13.1-3).
David demande à l’Éternel 4 fois de suite : « Jusques à quand ». Ce sont les longs soupirs d’un homme abattu. Ces interrogations sont fréquentes dans les psaumes, tout comme la demande de ne pas être oublié. David se sent abandonné. Parfois le sentiment de l’éloignement de Dieu n’a pas d’autre cause que l’agitation du croyant lui-même. Quand il expose à Dieu sa détresse, même sous forme de plainte, alors le secours n’est pas loin.
Si Dieu se détournait des croyants qui comptent sur lui, ils tomberaient vite dans le désespoir. Or le psalmiste n’en vient jamais à cette extrémité car sa foi le soutient. Et finalement, le Seigneur porte sur lui un regard favorable qui lui apporte la délivrance.
Versets 4-5
Je continue.
Regarde, Éternel mon Dieu, réponds-moi, illumine mes yeux, sinon je m’endors dans la mort. Sinon mon ennemi dira qu’il a gagné, mes oppresseurs se réjouiront lorsqu’ils verront ma chute (Psaumes 13.4-5).
Quand quelqu’un est sur le point de mourir, on dit qu’il est dans un état désespéré. Ici, David est probablement pris au piège, cerné par ses ennemis. Sa situation est sans espoir à moins que l’Éternel n’intervienne. Dans sa prière, il demande à Dieu la sagesse afin qu’il sache quoi faire. S’il venait à être tué, ce serait aussi une défaite pour l’Éternel qui est son protecteur. Fort de cette certitude, David manifeste sa confiance en Dieu.
Verset 6
Je finis ce Psaume 13.
Pour moi, j’ai confiance en ta bonté. La joie remplit mon cœur à cause de ton grand salut. Je veux chanter en ton honneur, ô Éternel, tu m’as comblé de tes bienfaits (Psaumes 13.6).
Aussitôt dite, la prière est exaucée. Tout est changé, sinon dans les circonstances extérieures, du moins dans l’âme du psalmiste.
Comme beaucoup d’autres psaumes, celui-ci se termine en apothéose par un cri de victoire. Le psalmiste exprime sa confiance en l’Éternel qui exauce sa prière parce qu’il est bon. Dans le psautier, c’est ici la première de très nombreuses références qui proclament la bonté de Dieu.
Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.