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08 juin 2022

Matthieu 2.16 – 3.4

Chapitre 2

Versets 16-18

Au 16e siècle, le militaire écrivain Agrippa d’Aubigné, échappa de peu au massacre de la St-Barthélémy ; il savait ce qu’était la tyrannie. Dans son œuvre maîtresse, il a écrit : Il ne sort des tyrans et de leurs mains impures qu’ordures ni que sang. Depuis la nuit des temps, la terre accablée porte des despotes en tout genre. Caïn, le premier homme à être né en ce monde, est aussi le premier assassin, puisqu’il tua son frère Abel. Il va sans dire que son meurtre a fait école.

À peu près tous les monarques ou dictateurs qui dirigent leur pays respectif aujourd’hui, ainsi qu’un certain nombre de grandes multinationales, ont débuté leur carrière par un bain de sang. De ce nombre était le roi Hérode, devenu célèbre pour avoir ordonné l’assassinat de petits enfants, un événement immortalisé par le tableau du peintre Nicolas Poussin Le massacre des Innocents. Cette tragique histoire est racontée dans l’Évangile de Matthieu au chapitre 2 que je continue à lire.

Quand Hérode s’aperçut que les mages s’étaient moqués de lui, il devint furieux : il donna l’ordre de tuer à Bethléhem et dans les environs tous les garçons en dessous de deux ans, conformément aux précisions que lui avaient données les mages sur l’époque où l’étoile était apparue. Ainsi s’accomplit la parole transmise par Jérémie, le prophète : On entend à Rama une voix qui gémit et d’abondants sanglots amers : Rachel pleure ses fils et elle ne veut pas se laisser consoler, car ses fils ne sont plus (Matthieu 2.16-18).

Hérode, très mégalomane perçoit Jésus comme un rival potentiel pour son trône. Comme il n’avait aucun scrupule, il ordonne simplement le massacre de tous les petits enfants ayant approximativement l’âge de Jésus dans tous les villages sur environ 16 km, entre Bethléhem, 8 km au sud de Jérusalem et Rama 8 km au nord. Selon les textes bibliques, les bergers qui se trouvaient à proximité de Bethléhem ont adoré le Sauveur le soir même de sa naissance. Mais les mages ne sont venus que bien plus tard, parce qu’ils avaient dû faire un très long périple pour se rendre en Palestine.

Entre le moment où l’étoile est apparue la première fois dans le ciel et la date à laquelle a lieu le massacre des innocents, il s’est écoulé plus d’un an, et comme Hérode est assoiffé de sang, il frappe large afin de s’assurer que tous les garçons de moins de deux ans sont assassinés. Le massacre d’Hérode accomplit une 2e fois une déclaration prophétique concernant un deuil dans la ville de Rama qui a eu lieu une première fois 6 siècles avant notre ère lorsque les Israélites ont été massacrés et déportés à Babylone, mais cette fois-ci le massacre s’étend jusqu’à Bethléhem au sud de Jérusalem. Cette attaque sanguinaire dirigée contre le Christ correspond à celle qu’a subie Israël.

Tragiquement, le Messie récapitule l’histoire de son peuple. Rachel, dont le sépulcre se trouvait proche de Bethléhem, représentait pour les habitants de la Judée, la mère de leur pays. Le texte cité par Matthieu était très connu de tous les Juifs parce qu’il décrit les circonstances terribles qui ont marqué la déportation du royaume de Juda par Babylone. Devant ce massacre d’enfants innocents, on s’interroge. Ce tyran d’Hérode allait bientôt mourir ce qui était sous-entendu par l’ange qui avait dit à Joseph de s’enfuir. Alors pourquoi Dieu n’a-t-il pas accéléré, ne serait-ce qu’un peu la disparition non regrettée de ce despote ? Cela aurait évité bien des chamboulements et surtout l’assassinat systématique de tous les petits garçons de la région. Dieu dans sa souveraineté avait de bonnes raisons pour laisser les choses se dérouler ainsi, mais il ne nous les révèle pas.

Alors bien sûr, on se pose des questions auxquelles il est impossible de répondre. Malgré de telles circonstances tragiques et même de celles qui nous touchent de près, Dieu désire que vous et moi lui fassions confiance.

Versets 19-20

Je continue le texte.

Après la mort d’Hérode, un ange du Seigneur apparut en rêve à Joseph, en Égypte, et lui dit : Lève-toi, prends l’enfant et sa mère et retourne avec eux dans le pays d’Israël, car ceux qui voulaient tuer l’enfant sont morts (Matthieu 2.19-20).

Jésus était appelé à mener sur le territoire d’Israël une vie parfaite en accord avec la Loi de Moïse, pour ensuite devenir un sacrifice parfait pour les fautes du monde entier, Juifs et païens. En conséquence dès que Hérode fut passé de vie à trépas, Jésus doit revenir en Palestine. Donc, un ange revient voir Joseph pour lui donner sa nouvelle feuille de route. C’est plus pratique que le facteur. Je me demande si ce brave homme avait monté une petite affaire de menuiserie et tout ça. Et puis Marie s’était certainement fait des amies. Mais il leur fallait à nouveau tout abandonner et une fois de plus la petite famille a dû reprendre leur bâton de pèlerin.

Versets 21-23

Je finis le chapitre 2.

Joseph se leva, prit l’enfant et sa mère et retourna dans le pays d’Israël. Mais il apprit qu’Archélaüs était devenu roi de Judée à la place de son père Hérode. Il eut donc peur de s’y installer, et, averti par Dieu dans un rêve, il se retira dans la province de Galilée, où il s’établit dans une ville appelée Nazareth. Ainsi se réalisa cette parole des prophètes : On l’appellera : le Nazaréen (Matthieu 2.21-23).

Archéalüs est un des fils d’Hérode le Grand et colle parfaitement à la formule : Tel père tel fils. Lui aussi est une charogne de première catégorie, un despote à la gâchette facile. Il reçut comme territoire deux provinces côte à côte : la Judée au sud et la Samarie au milieu de la Palestine. Avant même de monter officiellement sur le trône et à l’occasion de troubles graves, il a sauté sur cette occasion pour se faire la main en faisant massacrer 3 000 Juifs lors de la célébration de la Pâque à Jérusalem. Lorsque la nouvelle atteignit Rome, César n’apprécia pas, et en l’an 6, il l’écarta du pouvoir et l’expulsa à Vienne en Gaule, qui se trouve un peu au sud de Lyon. Suite à cet exil, la Judée deviendra une province romaine. La Galilée qui se trouve au nord de la Samarie fut attribuée en partage à Hérode Antipas, un autre des fils d’Hérode le Grand.

Donc, lorsque Joseph revient d’Égypte, la Judée et la Samarie d’une part, et la Galilée d’autre part, sont deux pays sous tutelle romaine, mais moyennement autonomes quand même et dirigés par différents monarques. Selon Matthieu, l’installation de la famille de Jésus à Nazareth est l’accomplissement d’une nouvelle prophétie. En effet, l’origine (étymologique) du nom de cette ville provient de l’hébreu Natsaraï, qui veut dire rejeton. Or dans un des textes prophétiques, nous lisons :

Un rameau poussera sur le tronc d’Isaï. Un rejeton naîtra de ses racines, et portera du fruit (Ésaïe 11.1).

Le rameau c’est le roi David et Isaï est son père, tandis que le rejeton c’est Jésus de Nazareth descendant de la dynastie de David. En second lieu, le terme Nazaréen était à cette époque synonyme d’opprobre, de reproche et de honte. D’une part, les Juifs de la Judée au sud considéraient tous les Galiléens du nord comme des citoyens de seconde classe parce qu’ils n’étaient pas des Juifs de pure souche. De plus, du temps de Jésus, Nazareth était le terrain de jeu d’un camp militaire romain donc particulièrement corrompue, un peu comme Saïgon durant la guerre du Vietnam. Cette renommée faisait de Nazareth une ville très méprisée. Ainsi, lorsque Philippe, un des premiers disciples du Christ, rencontra Nathanaël, il lui dit :

Nous avons trouvé celui dont Moïse a parlé et que les prophètes ont annoncé : c’est Jésus, le fils de Joseph, de la ville de Nazareth.

Sur quoi, Nathanaël a répondu :

De Nazareth ? Que peut-il venir de bon de Nazareth ? (Jean 1.45-46).

Pour Nathanaël, cet endroit est comme Pigalle la nuit pour les Parisiens, toute la faune rôde. Jésus a donc habité dans un endroit méprisé et lui-même l’est aussi parce qu’il a porté la déchéance, la corruption et la pourriture de nous tous sur la croix.

 

Ces deux premiers chapitres de Matthieu comprennent plusieurs sections distinctes grâce auxquelles l’auteur a introduit son Évangile en présentant le Christ comme étant l’accomplissement de l’espérance d’Israël et de la promesse divine faite aux patriarches : Il est le fils d’Abraham par excellence et le nouveau David qui était promis de longue date. La venue et la vie de Jésus réalisent de nombreux textes prophétiques de l’Ancien Testament. Comme représentant de la race humaine, il va porter l’ignominie tant des Juifs que des païens.

 

Mais le Christ est aussi le fils miraculeux de la Vierge sur lequel veillent les anges du Tout-Puissant : cet enfant est Emmanuel, ce qui veut dire : Dieu avec nous. Son père Joseph, dont l’obéissance au Seigneur est exemplaire, l’adopte comme le sien.

 

L’opposition officielle en la personne d’Hérode, se manifeste très tôt dès la naissance de Jésus et de manière brutale. Par contre, ce sont des païens en la personne des mages qui font un très long voyage pour venir l’honorer comme roi et l’adorer en tant que Dieu fait homme. Conformément à l’attente messianique des Juifs, c’est à Bethléhem que naît le Fils de Dieu, mais ce sera de Galilée, le nord de la Palestine et le district des nations païennes, que viendra la lumière, la grâce et la vérité qu’apportera Jésus de Nazareth.

Chapitre 3

Introduction

Nous arrivons au chapitre 3 de Matthieu. Entre la fin du précédent et le début de celui-ci, il s’est écoulé une trentaine d’années de silence avec seulement quelques rares détails que nous donne l’Évangile de Luc. Il est par conséquent évident que Dieu n’a pas jugé nécessaire de nous raconter la jeunesse du Christ. Des contes plus ou moins farfelus furent composés par la suite par des romanciers à l’imagination fertile pour essayer de combler ce vide non négligeable. Mais il faut reconnaître que nous n’avons aucun document de bonne foi qui pourrait nous éclairer sur les 30 premières années de la vie de Jésus. Je commence à lire le chapitre 3.

Versets 1-2

En ce temps-là, parut Jean-Baptiste. Il se mit à prêcher dans le désert de Judée. Il disait : Changez de comportement, car le royaume des cieux est proche (Matthieu 3.1-2).

Dans ce récit, Jean-Baptiste puis Dieu lui-même vont confirmer l’autorité divine du Christ. Plus tard, lors d’une confrontation avec ses ennemis, Jésus leur rappellera ces deux témoignages qui devaient donc être bien connus de tous. Le désert de Judée était situé à l’est de Jérusalem entre la ville et le cours inférieur du Jourdain, juste avant qu’il ne se jette dans la mer morte. C’était une région très aride et presque inhabitée. Nous savons peu de chose de Jean-Baptiste qui fait son apparition de façon soudaine. Dans l’Ancien Testament, un prophète mentionne la venue d’un Héraut, un précurseur du Messie. Je lis le passage :

Je vais envoyer mon messager pour aplanir la route devant moi. Et soudain, il viendra pour entrer dans son Temple, le Seigneur que vous attendez. Il est le messager de l’alliance que vous désirez. Le voici, il arrive, déclare l’Éternel des armées célestes (Malachie 3.1).

Luc, en tant qu’historien minutieux, nous donne quelques renseignements supplémentaires, mais succincts. De toute façon, il n’est pas très utile de connaître l’arrière-plan d’un annonceur. Si un garçon de courses frappe à ma porte pour me donner un message ou comme cela se faisait dans le temps apporter un télégramme, ce n’est pas à lui que je m’intéresse, mais bien plutôt au courrier qu’il m’apporte. Je le remercierais et puis c’est tout. Jean-Baptiste a tout fait pour ne pas attirer l’attention sur lui. Il dit qu’il n’est qu’un messager, qu’il vient pour introduire quelqu’un d’important et c’est ce qu’il a fait.

 

Dans son message tout simple, il parle du royaume des cieux qui est synonyme de royaume de Dieu. Sa proximité est liée à la présence imminente de Jésus-Christ, car qui dit royaume dit roi. Jean-Baptiste déclare que le Créateur des cieux va établir sa présence sur terre. Il ne s’agit pas du règne souverain que Dieu a toujours exercé partout dans son univers, mais de la venue du Seigneur dans le monde des humains en la personne du Christ. Conformément aux promesses de l’Ancien Testament, c’est lui le roi qui vient pour instaurer le royaume sur une terre recréée où la justice habitera, et pour délivrer la création de tout le mal qu’elle contient. Je lis un passage prophétique :

On ne commettra plus ni mal ni destruction sur toute l’étendue de ma montagne sainte. Car la terre sera remplie de la connaissance de l’Éternel comme les eaux recouvrent le fond des mers (Ésaïe 11.9).

Au vu du journal télé qui n’étale que des malheurs, cette nouvelle est tout à fait surprenante ; c’est trop beau pour être vrai, mais bien ce qu’enseigne aussi le Nouveau Testament. Je cite un texte :

Nous, nous attendons comme Dieu l’a promis, un nouveau ciel et une nouvelle terre où la justice habitera (1Pierre 3.13).

La suite de l’Évangile de Matthieu va montrer que l’irruption du royaume de Dieu dans la vie des hommes va se faire par étapes : tout d’abord en Jésus, puis par l’Église universelle, celle qui est formée des vrais croyants et qui est à différencier de la chrétienté. Puis la dernière étape sera le retour final et définitif de Jésus-Christ pour régner en Roi des rois et Seigneur des seigneurs, comme cela est décrit dans le livre de l’Apocalypse, le dernier du Nouveau Testament. Les paraboles de l’Évangile de Matthieu suivent ces étapes.

 

Le message de Jean-Baptiste est donc Repentez-vous, ce qui signifie changez d’avis, d’opinion et de comportement. Si je me dirige vers un objectif et que je me repens, cela veut dire que je modifie ma trajectoire et que je vais maintenant dans une autre direction. Ce changement intérieur auquel Jean-Baptiste convie ses contemporains, a été de tout temps le message universel invitant tout être humain à se tourner vers Dieu. Cette exhortation est encore plus pressante lorsque les hommes, généralement englués dans l’argent et les plaisirs de la vie, sont devenus froids, distants et indifférents aux réalités spirituelles. La foi en la personne de Jésus est toujours marquée par la repentance. Je ne peux me tourner vers le Christ que si je me détourne de ce que je croyais précédemment.

Ce changement d’attitude est la foi en action. En attendant le jour où le royaume de Dieu sera instauré sur terre, il peut déjà devenir une réalité présente dans ma vie. Selon l’Évangile, par un acte de foi personnel en Jésus-Christ, spirituellement je suis transporté dans le royaume du Fils de Dieu. Ce royaume de Dieu est présent dans les cœurs de ceux qui ont déjà reçu le roi par la foi. À partir de ce moment-là, je suis à lui et je peux entretenir une relation intime avec lui, bien plus étroite que n’importe quel sujet de la terre avec son roi. Dans le Nouveau Testament, cette dépendance est comparée à un mariage dans lequel Jésus-Christ est l’époux et les croyants sont l’épouse.

Le message de Jean-Baptiste est la bonne nouvelle qu’espéraient les hommes pieux de son temps qui attendaient la venue du Messie. Mais Jean-Baptiste adressait surtout un avertissement à la classe religieuse dirigeante contre le jugement à venir s’ils refusaient de courber l’échine.

Versets 3-4

Je continue le texte de Matthieu.

C’est Jean que le prophète Ésaïe a annoncé lorsqu’il a dit : On entend la voix de quelqu’un qui crie dans le désert : Préparez le chemin pour le Seigneur, aplanissez ses sentiers. Jean portait un vêtement de poil de chameau maintenu autour de la taille par une ceinture de cuir. Il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage (Matthieu 3.3-4).

Voilà un individu fort intéressant sorti tout droit d’un film-catastrophe de fin du monde. Il avait une allure et suivait un régime bizarre. Par son apparence et son message, Jean-Baptiste est un second Élie, un prophète rustre de l’Ancien Testament. Tous deux mangeaient et s’habillaient de la même façon, ils portaient le vêtement des pauvres. Le miel faisait partie des aliments courants du monde méditerranéen antique. Avec les sauterelles, c’était la nourriture des plus démunis. Aujourd’hui, on qualifierait Jean-Baptiste de S.D.F., acronyme pour sans domicile fixe, parce qu’en plus il ne se rasait jamais et portait des cheveux longs. C’était un homme original chargé d’une mission très spéciale. Il ressemblait à un ermite de l’Ancien Testament qui se serait égaré dans les pages de l’Évangile. En soi, son style de vie rude et dépourvu de tout n’est pas une preuve de spiritualité.

Jésus lui-même n’a pas vécu ainsi. Par contre, se contenter de peu est une vertu. En réalité, Jean-Baptiste était le dernier prophète de l’Ancien Testament, c’est pourquoi il ressemblait et parlait comme un révolutionnaire. Son mode de vie austère, voire spartiate, accentuait la sévérité de ses avertissements. Malheur à ceux qui ont fait la sourde oreille.

Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.

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