Jude 1.5-6
Chapitre 1
Introduction
Il existe un site internet (worldometers) de statistiques où on peut voir défiler sous ses yeux et en temps réel le nombre de personnes qui passent de vie à trépas. C’est à la fois impressionnant et sinistre. Ces gens, petits et grands, jeunes et vieux, meurent parce que « le salaire du péché c’est la mort » écrit l’apôtre Paul aux Romains (6.23). En conséquence, tout ce qui évoque la mort est un rappel que Dieu juge le mal et les fautes des hommes.
Dans sa courte lettre, Jude donne trois illustrations (v 5-7) dont le but est de montrer que Dieu ne plaisante pas avec ceux qui s’opposent à lui. Ces récits de jugement divin sont bien connus de ses lecteurs car ils sont tirés des livres de Moïse. Jude décrit la largeur de la colère de Dieu contre les Israélites sortis d’Égypte en montrant que le châtiment divin s’étend même au peuple élu. Ensuite, il souligne la hauteur de la colère de Dieu envers les anges déchus, et enfin la profondeur de sa colère à l’encontre des villes maudites: Sodome et Gomorrhe. Autrement dit, quand Dieu juge le péché, il frappe tous les coupables et aucune de ses créatures n’échappe à sa vengeance.
Les trois exemples de châtiments choisi par Jude sont étroitement parallèles à une autre triade, celle-là citée par l’apôtre Pierre (2Pierre 2.3-10), car lui aussi parle des anges déchus et des villes maudites. Par contre, Pierre mentionne les hommes emportés par le déluge, alors que Jude cite les Israélites rebelles; c’est ce qui différencie les deux auteurs sacrés dans leurs choix d’impies.
Tout comme Pierre, si Jude se sent pousser à faire ces rappels, c’est probablement parce qu’il sait que certains de ses lecteurs doutent que les faux enseignants qui ont infiltré leur assemblée, subiront le jugement de Dieu. En effet, il n’est pas rare que de tels mécréants prospèrent tout en propageant leurs mensonges. Non seulement ils jouissent de prestige et ont du succès auprès des femmes, mais ils se remplissent également les poches. Jude veut donc remettre les pendules à l’heure dans l’esprit de ses lecteurs en leur rappelant la version divine de l’Histoire; si Dieu n’a pas manqué de juger avec sévérité dans le passé, il fera de même dans le présent et dans l’avenir. Je continue maintenant de lire la lettre de Jude
Je veux vous rappeler, à vous qui savez fort bien toutes ces choses, que le Seigneur, après avoir sauvé le peuple et l’avoir tiré du pays d’Égypte, fit ensuite périr les incrédules.
Verset 5
Jude choisit donc de rappeler ici le sort de toute la génération d’Hébreux qui est sortie d’Égypte sous la conduite de Moïse. A deux exceptions près, Caleb et Josué, ils sont tous morts dans le désert. Le passage qui raconte cette sentence divine est un peu long, mais comme nous avons la mémoire courte, de temps en temps il est utile de se remémorer une vérité menaçante et solennelle ; partout dans les Écritures on constate que Dieu juge et punit: Je lis le texte concernant les Israélites:
« aussi vrai que je suis vivant et que toute la terre sera remplie de la gloire de l’Éternel, aucun de ces hommes qui ont vu ma gloire et les manifestations extraordinaires que j’ai produites en Égypte et dans le désert, qui ont, déjà dix fois, voulu me forcer la main et qui ne m’ont pas obéi, aucun de ces hommes ne verra le pays que j’ai promis par serment à leurs ancêtres_! Aucun de ceux qui m’ont méprisé n’y entrera_! vos cadavres tomberont dans ce désert_! Vous tous qui avez été recensés, vous qui avez donc vingt ans et plus, puisque vous vous êtes plaints contre moi, en aussi grand nombre que vous êtes, vous n’entrerez pas dans le pays où j’avais promis par serment de vous installer –_excepté Caleb, fils de Yephounné, et Josué, fils de Noun_! Mais vos enfants, dont vous avez dit qu’ils deviendraient la proie de l’ennemi, je les y conduirai, et ils connaîtront le pays que vous avez méprisé. Quant à vous, vos cadavres tomberont dans le désert où vos fils seront nomades pendant quarante ans. Ils supporteront ainsi les conséquences de votre infidélité à mon égard jusqu’à ce que le désert ait englouti tous vos cadavres. Moi, l’Éternel, j’ai parlé_! Oui, c’est ainsi que je traiterai cette communauté rebelle qui s’est liguée contre moi_! Ils disparaîtront dans ce désert_; c’est là qu’ils mourront » (Nb 14.21-23, 29-33, 35).
Cet épisode dramatique marque tellement l’histoire d’Israël qu’il est rappelé dans le Nouveau Testament. L’apôtre Paul écrit:
« il ne faut pas que vous ignoriez ceci, frères_: après leur sortie d’Égypte, nos ancêtres ont tous marché sous la conduite de la nuée, ils ont tous traversé la mer, [..]. Malgré tout cela, la plupart d’entre eux ne furent pas agréés par Dieu, puisqu’ils périrent dans le désert. Tous ces faits nous servent d’exemples pour nous avertir de ne pas tolérer en nous de mauvais désirs comme ceux auxquels ils ont succombé. Ne soyez pas idolâtres comme certains d’entre eux l’ont été, selon ce que rapporte l’Écriture_: Le peuple s’assit pour manger et pour boire, puis ils se levèrent tous pour se divertir. Ne nous laissons pas entraîner à l’immoralité sexuelle comme firent certains d’entre eux et, en un seul jour, il mourut vingt–trois mille personnes. N’essayons pas de forcer la main au Christ, comme le firent certains d’entre eux qui, pour cela, périrent sous la morsure des serpents. Ne vous plaignez pas de votre sort, comme certains d’entre eux, qui tombèrent sous les coups de l’ange exterminateur. Tous ces événements leur sont arrivés pour nous servir d’exemples. Ils ont été mis par écrit pour que nous en tirions instruction, nous qui sommes parvenus aux temps de la fin » (1Corinthiens 10.1,5-11).
L’auteur de l’épître aux Hébreux confirme ce triste événement quand il demande:
« qui sont ceux qui se sont révoltés contre Dieu après avoir entendu sa voix_? N’est–ce pas tous ceux qui étaient sortis d’Égypte sous la conduite de Moïse_? Et contre qui Dieu a–t–il été plein de colère pendant quarante ans_? N’est–ce pas contre ceux qui avaient péché et dont les cadavres sont tombés dans le désert_? Enfin, à qui a–t–il fait ce serment_: ils n’entreront pas dans mon repos_? N’est–ce pas à ceux qui avaient refusé de lui obéir_? Nous voyons donc qu’ils n’ont pas pu entrer dans le repos de Dieu parce qu’ils ne lui ont pas fait confiance » (Hébreux 3.16-19).
C’est long, barbant et désagréable car menaçant. Bien que Jude sache que ses lecteurs connaissent pertinemment ce récit et le jugement sévère qu’ont subi les Hébreux, il leur rafraîchit la mémoire afin qu’ils gardent bien à l’esprit que Dieu ne tolère pas les rebelles. Il faut dire aussi que les Hébreux se sont comportés d’une manière particulièrement coupable, car ils ont vu de nombreux miracles extraordinaires; alors qu’ils sont aux premières loges, comme au cinéma, à regarder se dérouler devant leurs yeux l’un après l’autre des événements fabuleux, ils choisissent malgré tout de se révolter contre Dieu. A la première contrariété ils lèvent le poing au ciel et insultent l’Éternel. Ça parait incroyable mais c’est vrai car Moïse raconte les faits comme ils ont eu lieu.
Je continue maintenant de lire la lettre de Jude avec le deuxième exemple de jugement de Dieu d’une rébellion contre lui.
Les anges qui n’ont pas gardé la dignité de leur rang, mais qui ont quitté leur propre demeure, il les a gardés dans des chaînes perpétuelles au fond des ténèbres en attendant le grand jour du jugement.
Verset 6
La façon dont Jude évoque cette catégorie d’anges sans donner d’explication particulière porte à croire que ses lecteurs savent de quoi il parle et connaissent très bien l’histoire de cette défection extraordinaire.
L’Éternel a créé une multitude d’anges et comme ils ne procréent pas, ils n’héritent pas non plus les tares de leurs géniteurs comme c’est le cas chez les humains. Par contre, à l’instar des hommes, chaque ange est doté du libre arbitre; il peut choisir d’obéir ou de se révolter contre Dieu. Un certain nombre d’entre eux choisit de se rebeller mais pas de la même manière, car il semble qu’il existe deux catégories distinctes d’anges déchus ou démons. Un groupe a commis un acte tellement odieux aux yeux de Dieu que depuis cet incident tous ces anges sont enfermés, incarcérés, enchaînés et ne disposent donc d’aucune liberté. L’autre groupe d’anges a suivi Satan dans sa tentative de coup d’état et ils sont maintenant ce que les Écritures appellent des « mauvais esprits ou esprits impurs ». Cependant, ils jouissent encore d’une certaine indépendance (comparez 1Pierre 5.8; Job 1.6,7), ce qui ne veut pas dire qu’ils peuvent aller où bon leur semble ni qu’ils ont carte blanche, sinon il y a belle lurette qu’ils auraient exterminé l’homme de la terre. Les Écritures ne nous disent pas précisément pourquoi Dieu leur laisse cette liberté, ni pourquoi, sous certaines conditions, ils ont le droit de tenter ou tourmenter les hommes. Il faut dire que ça leur est très facile. Comme les êtres humains sont totalement dépravés et animés de passions malsaines, les démons disposent de toute une panoplie de leviers qu’ils peuvent actionner dans tous les sens ce qui leur permet, quand Dieu le veut bien, de mener l’homme par le bout du nez. Cependant, et bien que les mauvais esprits soient méchants, des artisans du mal et les ennemis des hommes, ils sont indirectement au service de Dieu et participent, bien involontairement certes, mais participent quand même à l’accomplissement de ses objectifs.
Concernant les anges déchus dont parle Jude, on peut se demander quelle est la faute qu’ils ont commise pour qu’ils soient « dans des chaînes perpétuelles au fond des ténèbres » ? Il s’agit évidemment d’une transgression tellement grave que Dieu leur a immédiatement ôté la liberté en les liant avec des chaînes et en leur mettant des boulets aux pieds; c’est une façon de parler bien sûr car ces liens ne peuvent pas être matériels puisque les anges, qu’ils soient déchus ou fidèles à Dieu, sont des êtres spirituels. Cependant, nous sommes obligés d’utiliser des images de l’univers physique qui nous entoure et nous est familier parce que nous ignorons presque tout du fonctionnement du monde invisible. Par contre, on est sûr et certain que les anges dont parle Jude sont hors d’état de nuire depuis qu’ils ont péché. Quant à la faute dont ils se sont rendus coupables, il y a de fortes probabilités qu’elle soit décrite dans le livre de la Genèse; je lis ce passage.
« Les fils de Dieu virent que les filles des hommes étaient belles, et ils prirent pour femmes celles qu’ils choisirent parmi elles. [..]. A cette époque–là, il y avait des géants sur la terre, et aussi après que les fils de Dieu se furent unis aux filles des hommes et qu’elles leur eurent donné des enfants. Ce sont ces héros si fameux d’autrefois (Genèse 6.2,4).
Le péché de ces « fils de Dieu » aurait été de prendre une forme d’homme et de s’unir sexuellement avec des femmes ; ça décoiffe ! Plus loin, Jude compare leur rébellion à la débauche des habitants de Sodome et de Gomorrhe, qui se sont livrés à des actes sexuels « contre nature » (v 7). En violant les limites que Dieu leur avait imposées, ces anges déchus ont dépassé toutes les bornes. Selon l’apôtre Pierre, ils furent jugés sur le champ et enchaînés dans un endroit appelé « Tartare ». Ce mot, emprunté à la mythologie grecque, désigne un abîme souterrain encore plus bas que le séjour des morts; c’est le fond du trou et la plus oubliée des oubliettes. Dans cette prison sont enfermés les esprits les plus méchants, les pires des rebelles et des criminels, ceux qui reçoivent le châtiment divin le plus sévère.
Alors que Pierre dit seulement que ces anges ont « péché », Jude décrit deux aspects de leur faute:
« ils n’ont pas gardé la dignité de leur rang et ils ont quitté leur propre demeure ».
Tous les anges sont d’un rang bien supérieur à l’homme, mais ceux dont Jude parle ont quitté la sphère céleste que Dieu leur avait assignée et se sont abaissés, en quelque sorte, à notre niveau en prenant un corps et en ayant des relations sexuelles avec des femmes. Cependant, il ne faudrait pas croire un seul instant qu’ils envient le fait que les hommes peuvent s’accoupler. Non! Leur motivation était beaucoup plus perverse et sinistre. Ils voulaient polluer la race humaine afin que Dieu la détruise et qu’ainsi le Sauveur ne puisse pas naître dans le monde. Ils ont presque réussi puisqu’après cette union illicite des anges déchus et des femmes humaines, est apparue une génération humaine démoniaque complètement vouée au mal. Le texte de la Genèse dit:
« L’Éternel vit que les hommes faisaient de plus en plus de mal sur la terre_: à longueur de journée, leur cœur ne concevait que le mal. [..]. Il dit alors_: –_Je supprimerai de la surface de la terre les hommes que j’ai créés. [..]. Aux yeux de Dieu, les hommes s’étaient corrompus et avaient rempli la terre d’actes de violence. Dieu observait ce qui se passait sur la terre, il vit que le monde était corrompu, car toute l’humanité suivait la voie du mal. Alors Dieu dit à Noé_: –_J’ai décidé de mettre fin à l’existence de toutes les créatures car, à cause des hommes, la terre est remplie d’actes de violence. Je vais les détruire ainsi que la terre » (Genèse 6.5-7; 11-13).
Tout comme Lucifer qui a fomenté un coup d’état, ces anges devenus démons ont refusé le rôle et la place qu’ils avaient reçus au ciel et se sont rebellés contre le Créateur en essayant de faire dérailler son plan pour l’humanité (comparez Ésaïe 14:12), mais le Seigneur les a enfermés sur le champ. Dans sa seconde épître, l’apôtre Pierre écrit que « Dieu n’a pas épargné les anges qui ont péché_: il les a précipités dans l’abîme où ils sont gardés pour le jugement, enchaînés dans les ténèbres » (2Pierre 2:4).
Assez curieusement, selon l’apôtre Paul, les croyants, les êtres humains devenus enfants de Dieu en Jésus-Christ, auront leur mot à dire concernant le jugement des anges. Comme Paul donne cette information en passant dans sa première épître aux Corinthiens (6.3), il ne précise pas de quels anges il s’agit, ni quelles sont les circonstances de leur chute. Nous ignorons donc si nous jugerons tous les démons ou seulement une certaine catégorie.
En attendant ce jour les rôles sont renversés. En effet, dans l’Apocalypse, l’apôtre Jean nous informe que Satan et ses démons ont leurs entrées dans les cieux ce qui leur permet de porter des accusations jour et nuit contre les croyants (Apocalypse 12.10). Ils sont donc dans le collimateur des hordes démoniaques parce que de toute évidence, le diable a de bonnes raisons de les accuser. Je dois avouer que ça me met déjà assez mal à l’aise de savoir qu’il existe quelque part un tribunal céleste et des anges déchus qui nous accusent, mais le pire est qu’il est en session permanente.
Nous savons encore qu’à un certain moment de la fin des temps, probablement entre l’enlèvement de l’Église et le milieu des sept années de tribulation, Satan et ses démons seront jetés hors des cieux. Toujours dans l’Apocalypse, l’apôtre Jean écrit:
« une bataille s’engagea dans le ciel_: Michel et ses anges combattirent contre le dragon, et celui–ci les combattit avec ses anges_; [..]. Il fut précipité, le grand dragon, le Serpent ancien, qu’on appelle le diable et Satan, celui qui égare le monde entier. Il fut précipité sur la terre, et ses anges furent précipités avec lui » (Apocalypse 12.7-9).
A la fin des sept ans de tribulation, Jésus-Christ va vaincre toutes les forces qui lui sont opposées puis établir son royaume de mille ans, et pour avoir la paix il mettra Satan en prison. L’apôtre Jean écrit:
« Puis je vis un ange descendre du ciel. Il tenait à la main la clé de l’abîme et une grande chaîne. Il se saisit du dragon, de ce Serpent ancien qui est le diable et Satan. Il l’enchaîna pour mille ans. Il le précipita dans l’abîme qu’il ferma au–dessus de lui, en y mettant des scellés afin que le dragon ne puisse plus égarer les peuples avant le terme des mille ans. Après cela, il doit être relâché pour un peu de temps » (Apocalypse 20.1-3).
Une fois remis en liberté, Satan réussit à séduire des multitudes mais son règne est de courte durée. Je lis ce passage:
« Lorsque les mille ans seront écoulés, Satan sera relâché de sa prison et il s’en ira tromper les nations des quatre coins de la terre, Gog et Magog. Il les rassemblera pour le combat, en troupes innombrables comme les grains de sable au bord des mers. Les nations s’ébranlèrent sur toute la surface de la terre et investirent le camp du peuple de Dieu et la ville bien–aimée de Dieu. Mais un feu tomba du ciel et les consuma. Alors le diable, qui les trompait, fut jeté dans l’étang de feu et de soufre_: [..] » (Apocalypse 20.7-10).
Cette dernière image fait penser au gigantesque incendie d’un champ de puits de pétrole comme ceux du Koweit mis à feu lors de la première guerre du golfe. Dans les Écritures, le jugement final est souvent comparé à un feu qui ne s’éteint jamais (Matthieu 3.12; Marc 9.43-48; Luc 3.17), mais le feu tel que nous le connaissons n’a évidemment aucun effet sur des êtres spirituels, que ce soient les démons ou les âmes des défunts. On ne sait donc pas trop à quoi correspond « l’étang de feu et de soufre » du jugement, cependant, l’image évoquée suffit amplement pour vous faire dresser les cheveux sur la tête et c’est bien là l’idée que veulent communiquer les auteurs sacrés.
Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.