Genèse 8.13 – 9.17
Chapitre 8
Introduction
Lorsque quelqu’un suggère que dans le lointain passé il y a eu un déluge qui a recouvert toute la terre, il a droit à des sourires en coin et des visages en forme de point d’interrogation. Il est vrai que, pendant très longtemps, le récit concernant ce cataclysme, le personnage de Noé, son arche, les animaux, le corbeau et la colombe ne se trouvait que dans le livre de la Genèse.
Et puis en 1847, des archéologues britanniques découvrirent 25 000 tablettes en écriture cunéiforme, faite de signes et datant du 6e siècle avant notre ère. Elles furent trouvées dans les ruines de Ninive, l’ancienne capitale de l’empire d’Assyrie. Plus tard, le British Museum de Londres confia à un dénommé George Smith, un passionné de l’histoire assyrienne, la tâche de rassembler en un puzzle géant ces 25 000 tablettes.
Et c’est ainsi qu’en 1872 était reconstitué l’épique de Gilgamesh, une histoire du déluge similaire au récit biblique et qui inclut Noé, l’arche, les animaux et la colombe qui ne trouva où poser son pied lors de sa première sortie. Bien sûr, ceux qui ont un parti pris contre les Textes Sacrés ont tout de suite dit, sans aucune preuve d’ailleurs, que l’auteur de la Genèse s’était inspiré de l’histoire assyrienne. En fait, et à cause des différences entre ces deux récits, il est plus logique et raisonnable de penser que ces deux écrits furent rédigés indépendamment l’un de l’autre.
Versets 13-17
Je continue à lire dans le chapitre 8 de la Genèse en compressant.
L’an 601 de la vie de Noé, le premier jour du premier mois, les eaux s’étant résorbées sur la terre, Noé enleva la toiture du bateau ; il regarda dehors et constata que la surface du sol était sèche. Le 27e jour du deuxième mois, la terre était complètement sèche. Alors Dieu dit à Noé : sors du bateau avec ta femme, tes fils et tes belles-filles. Fais sortir aussi tous les animaux qui sont avec toi. Qu’ils se répandent sur la terre et s’y reproduisent (Genèse 8.13-17).
Les êtres vivants ont passé exactement une année dans l’arche. L’expression le premier jour du premier mois introduit un nouveau commencement pour le monde ; c’est comme si on repartait à zéro. Les animaux et les humains allaient maintenant sortir de l’arche.
Versets 20-21
Je continue.
Noé construisit un autel pour l’Éternel, il prit de tous les animaux purs et de tous les oiseaux purs et les offrit en holocauste sur l’autel. Le parfum agréable du sacrifice parvint jusqu’à l’Éternel qui se dit en lui-même : jamais plus je ne maudirai la terre à cause de l’homme, car le cœur de l’homme est porté au mal dès son enfance, et je ne recommencerai plus à détruire tous les êtres vivants comme je viens de le faire (Genèse 8.20-21).
La première chose que fait Noé est d’offrir un sacrifice à l’Éternel ; il utilise les animaux cérémonieusement purs qu’il avait emmenés avec lui. Cette action de Noé nous rappelle que c’est par l’intermédiaire d’un sacrifice sanglant que l’homme doit s’approcher de Dieu. Comme le souligne le texte, ce que fit Noé fut agréable à Dieu et c’est ainsi que tous deux établirent une relation. Au vu de nos sociétés francophones sécularisées, une telle démarche semble sortir d’un autre monde, je le conçois tout à fait. Mais comme le souligne le texte, dès son enfance, le cœur de l’homme est porté au mal. Auparavant Dieu avait déjà dit : à longueur de journée, le cœur de l’homme ne conçoit que le mal. Jusqu’au déluge, on peut résumer le début de l’humanité en une phrase : depuis Adam, les hommes furent rebelles, désobéirent, rejetèrent Dieu et refusèrent de se repentir.
Ces 8 personnes qui sortent de l’arche pour repeupler la terre sont de la même trempe que ceux qui avaient été à l’origine du jugement divin parce qu’ils avaient rempli la terre de violence. Les descendants de Noé et la suite de l’histoire de l’humanité vont démontrer que ce que Dieu dit sur l’homme est vrai et que rien n’avait changé ni ne changera concernant sa nature. Tout le monde sait qu’il n’est pas nécessaire d’apprendre à un bébé à faire un caprice ; c’est dans sa nature. Et aussi bien la télé que le journal de ce matin confirment qu’à longueur de journée le cœur de l’homme est porté au mal.
Dieu veut aussi que l’homme comprenne qu’il est Saint et que le mal que nous faisons l’offense grandement. C’est pour cela qu’il exige qu’on s’approche de lui par le biais de la mort violente d’un être vivant innocent. C’est là toute la signification des sacrifices en général et celui du Christ sur la croix en particulier. Autant ce sang versé nous écœure, autant le mal que nous faisons dégoûte Dieu.
Par le biais de son sacrifice, Noé a adoré l’Éternel et lui a rendu des actions de grâce pour le remercier de sa sollicitude, sa protection pendant un an dans l’arche. Dieu de son côté promet de ne plus détruire la totalité des êtres vivants par l’eau.
Verset 22
Je finis le chapitre 8 :
Aussi longtemps que la terre subsistera, semailles et moissons, froid et chaleur, été, hiver, et jour et nuit ne cesseront jamais (Genèse 8.22).
Il est tout à fait possible que le cataclysme subi par la terre ait décalé son centre de gravité par rapport à l’axe de rotation et que son trajet autour du soleil en ait été modifié au point de créer les saisons qui n’existaient probablement pas avant le déluge. De toute façon, non seulement Dieu s’engage désormais à préserver sa création malgré la perversité humaine, mais de plus il veillera à la permanence des lois et des saisons régissant notre cycle de vie et qu’il a lui-même établies. Il garantit ainsi le maintien des conditions nécessaires à la survie de l’humanité.
Maintenant que Noé est sorti de l’arche, il est dans la même position qu’était Adam ; comme lui, il est à la tête d’une nouvelle lignée. De la même manière qu’Adam et Ève sont nos premiers parents, Noé et sa femme sont les ancêtres de l’humanité postdiluvienne. Quand l’Éternel créa l’homme et la femme, ils étaient innocents au sens légal du terme, c’est-à-dire neutres ne connaissant ni le bien ni le mal. Après leur désobéissance, ils entrèrent dans le domaine de l’expérience morale par la mauvaise porte, alors qu’ils auraient pu s’y introduire en faisant le bien.
L’homme devint semblable à Dieu par sa capacité personnelle à différentier le bien du mal, mais dissemblable par son choix du mal au lieu du bien. Dès lors, le Créateur le rend moralement responsable de faire ce qu’il sait être bien, de s’abstenir de tout mal connu et de s’approcher de Dieu par le sang d’un sacrifice en prévision de l’offrande à venir du Fils de Dieu sur la croix. L’homme échoua dans cette épreuve comme dans les autres et le monde fut jugé par le déluge.
Chapitre 9
Versets 1-3
Je commence maintenant à lire le chapitre 9 de la Genèse.
Dieu bénit Noé et ses fils et leur dit : Soyez féconds, multipliez-vous et remplissez la terre. Vous inspirerez désormais la crainte et la terreur à toutes les bêtes de la terre et à tous les oiseaux du ciel ; tous les animaux qui se meuvent sur la terre et tous poissons de la mer sont livrés en votre pouvoir. Tout ce qui remue et qui vit vous servira de nourriture au même titre que les légumes et les plantes : je vous donne tout cela (Genèse 9.1-3).
La première chose que Dieu demande à Noé et à ses fils, c’est de se multiplier et de remplir la terre ; la race humaine doit se propager partout. Cet ordre divin fut donné dans des circonstances très particulières. Louis XIV a peut-être dit : L’État, c’est moi !
Mais Noé et sa famille pouvaient véritablement dire : L’humanité, c’est nous ! Ils représentaient toute la race humaine sur la planète. Ce serait quelque chose d’aller au travail un matin et d’être absolument seul sur la route, personne à l’horizon et aucun son généré par l’homme ; partout le silence ou le bruit du vent bruissant les feuilles et de temps en temps dans le lointain le cri d’un animal. C’est exactement la situation dans laquelle se trouvait Noé ; ils avaient donc de quoi faire pour obéir au commandement divin et repeupler la terre.
La deuxième caractéristique du nouveau régime humain est la suprématie donnée à l’homme sur l’ensemble du règne animal. Son autorité et sa responsabilité sont réaffirmées, mais contrairement à la situation originelle, la relation homme-animal apparaît maintenant entachée de violence et de crainte. L’homme est chargé de gérer et prendre soin des animaux, ce qui ne veut pas dire les brutaliser ; on connaît la suite. Des millions de bisons d’Amérique du Nord furent exterminés ; les baleines étaient en voie d’extinction jusqu’à ce que finalement des mesures à l’échelle planétaire soient prises ; beaucoup d’espèces ont déjà disparu, soit chassées à mort, soit détruites par des polluants industriels.
Un grand nombre d’animaux divers sont sur la liste officielle de ceux qui sont soit menacés soit en voie d’extinction. La faune africaine qui était si riche est en train de subir une hécatombe, et souvent pour une misérable manne pécuniaire. Dans les guerres tribales, fratricides ou civiles, les animaux du secteur sont les premiers à en faire les frais ; ce sont des cibles toutes faites. L’homme, où qu’il vive et surtout celui qui se dit civilisé, est une véritable brute sauvage.
À Noé et à ses descendants, Dieu permet maintenant de manger les animaux ; il s’agit ici d’une nouvelle disposition. Les changements occasionnés par le déluge ont peut-être modifié les végétaux au point qu’il leur manque des éléments nutritifs essentiels qui se trouvent dans la viande. Il existe une foule de régimes alimentaires les plus divers ; il n’est pas rare qu’une façon de se nourrir fasse partie de sa religion et ne dit-on pas : Je suis ce que je mange !
Avant le déluge, tous les êtres vivants étaient végétariens et Dieu les a exterminés parce que les hommes avaient rempli la terre de violence ; la salade et les haricots n’avaient pas du tout amélioré leur moralité.
Même si se nourrir de viande devient permis, il ne faut pas le faire n’importe comment. Dieu précise : vous ne mangerez pas de viande contenant encore sa vie, c’est-à-dire son sang. Cela veut dire que les animaux doivent être proprement saignés avant d’être consommés, ce qui garantit qu’ils sont bien morts. D’une part, l’interdiction formelle de manger du sang, symbole de vie, souvent stipulée dans la Loi de Moïse, souligne que Dieu attache du prix à ses créatures.
C’est aussi une mesure hygiénique, puisque le sang devient rapidement un bouillon de culture microbienne dangereux. D’autre part, cette interdiction de consommer du sang a pour but d’en réserver l’usage aux sacrifices. Et finalement, cette prohibition est aussi un rejet de la pratique courante chez beaucoup de peuples de consommer du sang dans le but de renouveler ses forces vitales ou spirituelles à des fins d’idolâtrie.
Versets 4-6
Je continue la suite du texte.
Quant à votre sang à vous, celui qui est votre vie, j’en demanderai compte à quiconque le répandra, que ce soit un animal ou un homme. Je demanderai compte à chaque homme de la vie de son semblable. Dieu a fait l’homme à son image : c’est pourquoi si quelqu’un répand le sang d’un homme, son sang doit être répandu par l’homme (Genèse 9.4-6).
Le sang ou la vie d’un homme est sacré. Un animal qui met à mort un être humain doit être abattu afin de protéger d’autres vies ; la Loi de Moïse stipulera la lapidation de l’animal qui a tué un homme. Selon ce même principe qui apparaît ici pour la première fois, le meurtrier, celui qui tue son prochain doit être exécuté.
Dans ce passage, il n’est pas question de vendetta qui relève de la vengeance personnelle, mais de justice selon la perspective divine. Ici encore, Dieu se présente comme le défenseur de l’être humain qui lui est précieux en raison du fait qu’il l’a créé à sa ressemblance et qu’il est son représentant sur terre. Le meurtre est un crime de lèse-majesté qui porte atteinte à Dieu lui-même en supprimant son image. La sévérité de la sanction est à la hauteur de la gravité de la faute. La peine capitale consiste donc à sauvegarder le caractère sacré de la vie humaine qui est un don de Dieu.
Cet enseignement est bien entendu matière à controverses, mais selon les Écritures, il ne fait aucun doute que Dieu veut que les coupables de crimes de sang soient exécutés. La Communauté Européenne dans sa sagesse humaniste, a aboli la peine de mort pour diverses raisons qu’il n’est pas utile de mentionner sauf une. Les opposants de la peine capitale défendent leur position en disant que cette justice expéditive n’est pas dissuasive. C’est exact, mais la véritable raison de cet échec nous est expliquée par un passage du livre de l’Ecclésiaste dans l’Ancien Testament que je cite :
Parce qu’une sentence contre les mauvaises actions ne s’exécute pas promptement, le cœur des hommes se remplit en eux du désir de faire le mal (Ecclésiaste 8.11).
Comme la justice traîne en longueur à n’en plus finir, tout le monde oublie et retourne à ses occupations quotidiennes, comme si rien ne s’était passé et l’impact psychologique qu’aurait eu une sanction expéditive est totalement perdu. Ce qui est machiavélique dans le comportement des pays occidentaux, c’est que, la larme à l’œil, on fait preuve de beaucoup de sentimentalité pour défendre la vie d’un assassin. En revanche, dans ces mêmes pays on autorise, voire encourage l’avortement au lieu de l’adoption. Et puis, on a commencé à pratiquer l’euthanasie, à supprimer certains éléments de la société, des malades et des vieux avec leur accord pour le moment, mais en cas de dérapage, si le concept s’étend, vous et moi passerons à la casserole.
Il est une autre raison très pragmatique celle-là, qui plaide en faveur de la peine de mort : ces gens sont dangereux. S’ils étaient confinés en prison, ce serait une chose, mais ils sont trop nombreux à se retrouver dans la rue ou à votre porte pour des raisons bidons : un vice de forme lors du procès, un sursis, une remise de peine, une fin de détention ou quelque chose d’autre.
En octobre de l’an 2000, j’ai entendu par hasard, et je crois que c’était sur France-Inter, un sociologue qui avait suivi la carrière de 300 meurtriers ayant été remis en liberté pour une des raisons précédemment citées. Il a posé la question suivante à l’animateur de l’émission : D’après vous, combien d’entre eux, une fois en liberté, ont à nouveau commis un crime de sang au moins une fois ? L’animateur n’en avait pas la moindre idée et s’est hasardé à faire des suppositions à l’aveuglette. En tout cas, il était bien en-dessous de la réalité. La réponse du sociologue tient en un mot. Tous ! Oui tous ! Sur 300 criminels, 300 ont récidivé. Comme l’animateur, j’en suis resté bouche bée.
On se rend compte que l’Éternel savait ce qu’il faisait quand il a institué la peine capitale. Le principe qui consiste à punir les fauteurs de trouble, à faire régner l’ordre et la justice afin de protéger le citoyen établit le gouvernement civil humain ; cette institution commence après le déluge. Sous ce nouveau régime, certaines prérogatives divines comme la peine capitale sont conférées à l’homme. Ce dernier est non seulement responsable devant Dieu, mais il est désormais tenu de se soumettre à l’autorité établie par la société. Dans l’Évangile, quand les prêtres juifs ont essayé de piéger Jésus en lui demandant :
Devons-nous payer l’impôt à l’empire romain ?
Il a répondu :
Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ! (Matthieu 22.21).
Chacun d’entre nous est dans l’obligation morale de se soumettre à l’État et à Dieu. Après le déluge, l’humanité entre dans une ère nouvelle, la troisième depuis la création de l’homme. Il y a tout d’abord eu l’état d’innocence durant lequel Adam devait obéir au commandement de ne pas manger du fruit défendu, devenant ainsi un être moral animé par le bien ; il a lamentablement échoué.
Ensuite, après avoir été chassé du jardin d’Éden et avant le déluge, l’homme devait mettre un frein à sa méchanceté en suivant sa conscience, sa connaissance du bien et du mal ; il a encore lamentablement échoué.
Maintenant, un contrôle nouveau et extérieur est institué, celui de l’autorité du gouvernement civil. Nous savons déjà que l’homme va lamentablement échouer et il en sera ainsi jusqu’à ce qu’enfin Jésus établisse son royaume de paix sur la terre.
Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.