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17 mai 2022

Genèse 43.1-34

Chapitre 43

Introduction

Dans la vie, des fois ça va mal et parfois ça va très mal. Récemment, j’ai lu qu’un enfant était entré à l’hôpital pour une opération de routine de l’appendicite, mais ça s’est mal passé ; la petite intervention a engendré une infection et des complications que les médecins n’ont pas pu contrôler et le jeune patient est mort. Ce qui a commencé comme un problème banal a tourné en catastrophe. Dans le pays de Canaan, le printemps dernier, les pluies ont été très peu abondantes, ce qui a fait que les récoltes d’automne furent bien maigres. Malheureusement, la saison suivante la situation a empiré parce que le ciel est resté désespérément d’airain. Tout le Proche-Orient doit faire face à une famine qui dure, ce qui a épuisé les réserves de céréales.

Dans le camp de Jacob, la tension est palpable et les nerfs à vif ; tout le monde fait une tête d’enterrement. La pression monte au fur et à mesure que les victuailles diminuent. Si le clan veut survivre, il va falloir agir sans plus tarder. Les fils de Jacob ont une seule option ; il leur faut à nouveau faire un voyage en Égypte pour aller acheter de quoi se nourrir. Or, il leur est impossible d’y retourner, sans prendre avec eux Benjamin, leur frère cadet.

Versets 1-7

Je commence à lire le chapitre 43 de la Genèse.

La famine sévissait de plus en plus durement dans le pays. Quand la famille de Jacob eut mangé tout le blé rapporté d’Égypte, Jacob dit à ses fils : Retournez là-bas nous acheter un peu de vivres. Juda lui répondit : Cet homme nous a solennellement avertis que nous ne pourrons plus nous présenter devant lui si notre frère ne nous accompagne pas. Si tu laisses notre frère partir avec nous, nous irons en Égypte et nous t’achèterons des vivres. Mais si tu ne le laisses pas venir, nous ne partirons pas : car cet homme nous a bien dit : Vous ne serez pas admis en ma présence si votre frère n’est pas avec vous. Israël reprit : Pourquoi m’avez-vous causé ce tort ? Aviez-vous besoin de raconter à cet homme que vous avez encore un frère ? Mais ils lui répondirent : Cet homme nous a questionnés en détail sur nous et sur notre parenté. Il nous a demandé : Votre père vit-il encore ? Avez-vous un autre frère ? Et nous avons répondu à ces questions. Pouvions-nous savoir qu’il nous ordonnerait de lui amener notre frère ? (Genèse 43.1-7).

Lorsque les fils du patriarche Jacob sont allés en Égypte la première fois pour acheter des céréales, c’est Joseph qui les leur a vendues, mais ils ne l’ont pas reconnu. Il leur avait alors mené la vie dure parce qu’il voulait qu’ils reviennent avec Benjamin son frère de la même mère que lui. Pour faire monter la pression, il a gardé Siméon comme otage et ça fait maintenant un an qu’il moisit dans un cachot et se demande si ses frères ne l’ont pas oublié ; apparemment oui, car il n’est jamais mentionné dans les discussions. Jacob a tout d’abord refusé de laisser partir Benjamin, mais à cause de la famine il doit céder.

Joseph s’était montré très indiscret voulant tout savoir sur cette famille alors qu’en principe il aurait simplement dû vendre des céréales contre des espèces sonnantes et trébuchantes ; les frères étaient venus pour une simple transaction commerciale sans se douter qu’ils mettraient les pieds dans une fourmilière, une sombre affaire de famille, la leur, qu’ils avaient essayé d’oublier, mais le moment est venu de faire les comptes et de sortir les squelettes du placard.

Versets 3-10

Je continue.

Alors Juda dit à Israël : Père, laisse partir le jeune homme avec moi. Nous nous mettrons en route et nous irons là-bas pour pouvoir survivre. Sinon nous mourrons tous, toi et nous et nos jeunes enfants. Je le prends sous ma responsabilité. Et si je ne te le ramène pas, tu m’en demanderas compte. Si nous n’avions pas tant tardé, nous serions déjà deux fois de retour (Genèse 43.3-10).

Dieu s’est arrangé pour qu’il soit impossible de se ravitailler ailleurs qu’en Égypte. Les frères doivent donc y retourner, ce qui place Jacob devant un terrible dilemme : soit laisser partir Benjamin et risquer de le perdre, soit mourir de faim à petit feu. Joseph, grand vizir d’Égypte, avait été très clair disant : Vous ne reviendrez qu’avec votre frère ! Dieu a un plan qu’Il est en train de mettre à exécution. Juda prend l’initiative en se portant garant pour Benjamin. Si quoi que ce soit lui arrivait, Jacob pourrait lui infliger le châtiment qu’il voudra, notamment le priver de sa part d’héritage. À partir d’ici, Juda devient le porte-parole des frères en jouant un rôle toujours plus actif ; sa tribu aura la prééminence sur les autres en Israël.

Versets 11-15

Je continue.

Leur père Israël dit finalement : Puisque c’est ainsi, faites ceci : Mettez dans vos bagages les meilleurs produits du pays et offrez-les à cet homme : un peu de baume et un peu de miel, de l’astragale, du laudanum, des pistaches et des amandes. Prenez avec vous le double de la somme voulue et restituez l’argent qui a été remis à l’entrée de vos sacs. Peut-être s’agissait-il d’une erreur. Emmenez votre frère et partez, retournez chez cet homme. Que le Dieu tout-puissant le rende favorable à votre égard quand vous vous présenterez devant lui. Qu’il vous rende votre autre frère et vous laisse ramener Benjamin. Quant à moi, si je dois rester privé d’enfants, eh bien que j’en sois privé ! Alors ils se chargèrent du présent, prirent avec eux une double somme d’argent et emmenèrent Benjamin. Ainsi ils se mirent en route, se rendirent en Égypte et se présentèrent devant Joseph (Genèse 43.11-15).

Finalement, à cause de la sévérité de la famine, Jacob doit accepter que ses fils retournent en Égypte avec Benjamin. Comme la situation est particulièrement critique, il a soudainement un petit accès de ferveur religieuse et invoque l’Éternel, ce qu’il n’a pas l’air de faire très souvent. Il est comme nous, il s’adresse à Dieu quand il se sent coincé et que ses efforts pour s’en sortir ont échoué. Mais c’est peut-être un peu trop facile de lui jeter la pierre sans connaître toutes ses circonstances. Ça me fait penser à un proverbe qui date des Indiens d’Amérique et qui dit : Ne parle pas contre ton frère avant d’avoir parcouru quelques km dans ses mocassins.

Ce sont les céréales qui manquent, la base de leur nourriture. Ils ne sont pas destitués de tout, mais presque ; il leur reste un peu de miel et quelques noix ce qui ne remplit pas le ventre. Le laudanum est une teinture tirée du pavot et l’astragale, une légumineuse ; il en existe 1 500 espèces, mais aucune ne remplace la salade. Ils vont offrir ce qu’ils ont au grand vizir, car c’était alors l’usage de se présenter devant un supérieur, qu’il soit chef politique, militaire ou religieux, les mains pleines. Cela fait maintenant deux ans que la famine sévit.

Versets 16-18

Je continue.

Joseph vit avec eux Benjamin, il dit alors à l’intendant qui gérait sa maison : Conduis ces gens chez moi, fais abattre une bête et apprête-la, car ces hommes mangeront avec moi à midi. L’intendant exécuta les ordres de Joseph et il conduisit ces gens à la maison de son maître. Ils furent effrayés d’être introduits dans la maison de Joseph et dirent : On nous a certainement fait venir à cause de l’argent qui s’est retrouvé la dernière fois dans nos sacs. Ils vont se ruer sur nous pour nous prendre comme esclaves et s’emparer de nos ânes (Genèse 43.16-18).

Avant l’introduction du cheval vers 1500 av. J-C, l’âne était considéré comme la monture de choix au Proche-Orient. Encore une fois, c’est la panique à bord pour les frères ; en raison de leur mauvaise expérience lors du précédent voyage, ils ne peuvent imaginer que des mauvaises raisons pour cette invitation inattendue. Moi, si le Premier Ministre m’invitait à dîner, je me considérerais très privilégié. Mais les frères font un gros complexe de culpabilité ; ils se souviennent que par jalousie ils n’avaient pas hésité à vendre leur jeune frère Joseph de 17 ans comme esclave pour 20 pièces d’argent. Cette surprise-partie retentit comme une sonnerie aux morts ; ils sont atterrés, se demandant bien ce qui va leur arriver ; vont-ils finir comme esclaves ? Mais c’est un peu tard pour les remords.

Versets 19-25

Je continue.

Ils s’approchèrent de l’intendant de la maison de Joseph et lui parlèrent à l’entrée de la maison, en disant : Excuse-nous, mon seigneur : nous sommes déjà venus une première fois pour acheter des vivres. Quand nous sommes arrivés à l’étape où nous avons passé la nuit, nous avons ouvert nos sacs et chacun de nous a retrouvé son argent à l’ouverture de son sac. C’était exactement la somme que nous avions payée. Alors nous l’avons rapportée, et nous avons emporté avec nous une autre somme d’argent pour acheter des vivres. Nous ne savons pas qui a remis notre argent dans nos sacs ! L’intendant répondit : Soyez tranquille : tout va bien pour vous ; ne craignez rien. C’est votre Dieu, le Dieu de votre père, qui a mis un trésor dans vos sacs. Pour ce qui est de votre argent, il m’a bien été remis. Puis il relâcha Siméon et le leur fit amener. Il les introduisit ensuite dans la maison de Joseph. Il leur apporta de l’eau pour qu’ils se lavent les pieds et fit porter du fourrage à leurs ânes. Ils préparèrent leur présent en attendant l’arrivée de Joseph pour midi ; Ils avaient, en effet, appris qu’ils mangeraient là (Genèse 43.19-25).

Avant de pénétrer dans l’antre de la bête, la maison de Joseph, les frères cherchent une explication rationnelle à cet argent qui la première fois avait été remis dans leurs sacs. Les paroles de l’intendant sont étonnantes ; la formule, le Dieu de votre père, était souvent utilisée lors de la conclusion de pactes, mais ici le contexte donne à cette expression une note toute personnelle. Cet homme semble vénérer le Dieu de Joseph et de Jacob et c’est donc à cause de leur foi commune qu’il leur avait rendu l’argent. Joseph ne manquait jamais de témoigner pour l’Éternel ; c’est donc grâce à lui que l’intendant a appris à honorer le Dieu du ciel et de la terre et il en avait probablement été de même pour son épouse égyptienne.

Les frères entrent dans le salon et Siméon qui vient de sortir de prison les rejoint ; il doit être content qu’ils soient revenus encore que l’avenir ne s’annonce guère brillant. Les salutations sont brèves, car l’heure est grave. Ils préparent leurs cadeaux et attendent la suite des événements ; ils doivent se sentir comme s’ils étaient dans le box des accusés alors que les membres du jury reviennent après avoir délibéré et l’un d’entre eux tend au juge le verdict ; tout le monde se lève, l’angoisse !

Versets 26-28

Je continue.

Joseph rentra chez lui. Ils lui offrirent le présent qu’ils avaient apporté et se prosternèrent à terre devant lui. Il prit de leurs nouvelles et leur demanda : Votre père âgé dont vous m’avez parlé, se porte-t-il bien ? Vit-il encore ? Ils répondirent en s’inclinant et en se prosternant jusqu’à terre : Ton serviteur, notre père, est encore en vie et il va bien (Genèse 43.26-28).

Drame et mélodrame, le moment critique est arrivé. Joseph est sans aucun doute assis en élévation sur un siège princier et ses frères s’inclinent tout bas devant lui réalisant à nouveau le rêve prémonitoire qu’il avait fait 20 ans plus tôt. Cette fois-ci, Benjamin est parmi eux, quelle émotion pour Joseph ! Ils sont tous là, ses onze frères tout intimidés devant le grand vizir égyptien particulièrement difficile à vivre. On constate à nouveau la grande affection que Joseph portait à son vieux père Jacob qu’il n’a pas revu depuis si longtemps, 22 ans pour être précis.

Versets 29-31

Je continue.

En apercevant son frère Benjamin, fils de sa mère, il demanda ; Est-ce là votre frère cadet dont vous m’avez parlé ? Et il ajouta : Que Dieu te témoigne sa grâce, mon fils ! Joseph sortit en hâte car la vue de son frère l’avait profondément ému, et il chercha un endroit pour laisser couler ses larmes ; il se retira dans sa chambre et pleura. Puis il se lava le visage et ressortit. Il contint son émotion et ordonna de servir le repas (Genèse 43.29-31).

Le texte mentionne à plusieurs reprises l’émotion et les larmes de Joseph. Il a devant lui son frère Benjamin ; la dernière fois qu’il l’a vu, c’était un petit enfant alors que maintenant c’est un homme dans la force de l’âge. Il lui porte une affection toute particulière parce qu’il est son frère de sang issu de Rachel, la même mère que lui. Il est également le seul à ne porter aucune responsabilité dans sa vente comme esclave. La bénédiction que prononce le grand vizir égyptien sur Benjamin a dû sonner étrangement aux oreilles des frères. Ils sont décidément sans cesse décontenancés par cet homme qu’ils n’arrivent pas à cerner. Mais que peut-il bien encore nous vouloir doivent-ils se dire ?

On s’imagine la scène : submergé par l’émotion, Joseph a les yeux qui se remplissent de larmes. Alors brusquement, il se lève et quitte la pièce sans mot dire. Ce départ précipité a dû inquiéter encore davantage les frères qui se regardant les uns les autres pensent : ça y est, on est fait comme des rats ! Il est allé chercher la garde et on va nous emmener ! Les onze frères imaginent le pire. Mais finalement, Joseph se ressaisit, se débarbouille, se fait présentable et revient pour ordonner le début du repas.

Versets 32-34

Je finis ce chapitre.

On les servit séparément, lui à une table, ses frères à une autre, et les Égyptiens qui mangeaient avec lui à une troisième table. En effet, les Égyptiens ne peuvent pas prendre leurs repas avec les Hébreux : ils considèrent cela comme une chose abominable. On fit asseoir les frères en face de Joseph, par ordre d’âge, de l’aîné au plus jeune, de sorte qu’ils se regardaient l’un l’autre avec stupéfaction. Joseph leur fit servir des mets de sa propre table ; Benjamin reçut une part cinq fois plus copieuse que celle des autres. Ainsi ils burent et s’égayèrent avec lui (Genèse 43.32-34).

Tout au long de ce récit, les éléments qui concernent la nourriture font allusion à diverses coutumes égyptiennes confirmées par des documents et des représentations antiques : repas pris à midi, stricte observance des règles de préséance, consommation de viande et séparation entre groupes ethniques. D’une manière générale et pour des raisons religieuses, les Égyptiens se tenaient à l’écart des autres peuples évitant notamment de partager un repas avec des étrangers. De plus, les Orientaux mangeaient généralement accroupis ou étendus à demi-couchés sur des tapis ou des divans, alors que les Égyptiens prenaient leurs repas comme nous assis à des tables. Toute cette assemblée est divisée en trois groupes. Joseph mange seul à une table, ses frères à une autre et son personnel : gardes du corps, panetier, cuisinier, échanson, à une troisième.

Les onze ont dû être très surpris de constater que Joseph n’a pas fait de fausse donne, lorsqu’il les a fait asseoir selon leur âge ; ils doivent se demander comment il connaît leur ordre de naissance. De plus, sachant combien les Égyptiens sont pointilleux concernant leurs repas en présence d’étrangers, ils sont interloqués de voir que Joseph mange avec eux. Chez les Hébreux, quand on désirait faire valoir quelqu’un, on lui offrait une portion double. Dans les usages égyptiens, c’est le nombre 5 qui jouait un rôle important et c’est pourquoi Joseph honore Benjamin en lui donnant 5 parts de nourriture.

Dans la culture hébraïque, c’est le chiffre 7 qui a une signification symbolique. Évidemment, les 10 autres frères ne comprennent pas pourquoi le cadet a droit à cette faveur spéciale. Sans trop savoir que penser de tout cela, une fois n’est pas coutume, ils sont quand même soulagés d’être aussi bien traités. Le repas et le vin ont détendu l’atmosphère et pendant un moment les onze frères oublient leurs angoisses et profitent du premier bon repas depuis longtemps.

En fait, les douze fils de Jacob sont réunis ici pour la première fois depuis 22 ans et se réjouissent ensemble, mais Joseph seul réalise la portée de cet événement. C’est l’Éternel qui a ordonné ce repas de fête que prennent les 12 hommes qu’il a choisis pour être les ancêtres fondateurs des tribus d’Israël. Et pourtant, à l’exception de Joseph, les autres ne sont pas vertueux ou pieux. 10 d’entre eux ont vendu leur frère ; Juda est un sale bougre tandis que Siméon et Lévi sont très cruels. Dieu est souverain dans son univers ; il agit d’abord selon le conseil de sa volonté et accessoirement en fonction de mon comportement ou du vôtre.

Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.

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