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18 mai 2022

Genèse 44.1 – 44.4

Chapitre 44

Introduction

Comme chacun sait, Rome ne s’est pas faite en un seul jour, mais ce qui est moins connu est que la ville est construite sur sept collines. À l’extrémité sud-ouest de l’une d’entre elles, qui s’appelle le Capitole, se trouve une roche de 32 mètres de haut, du sommet de laquelle on précipitait ceux qui étaient accusés de trahison. En-dessous est enterrée Tarpeia, une célèbre prêtresse romaine de Vesta, la déesse du Foyer domestique. De cette histoire véridique provient l’expression : subir la roche tarpéienne, une épreuve interminable.

Or, c’est exactement ce qu’endurent les 11 fils de Jacob qui sont venus chercher du blé en Égypte. Joseph en est le grand vizir, mais il ne s’est pas révélé à ses frères, les laissant mijoter un peu plus longtemps dans leur jus pour ainsi dire. En fait, il va leur jouer un tour pendable afin de voir s’ils ont changé depuis le jour fatidique où ils l’ont vendu comme esclave. En se montrant partial envers Benjamin, Joseph a provoqué ses dix demi-frères et attend le résultat de sa manœuvre. Vont-ils se montrer à nouveau jaloux de Benjamin, comme jadis ils le furent de lui ? Seront-ils prêts à abandonner leur frère cadet comme esclave en Égypte, sans sourcilier en échange de leur propre liberté ? C’est ce qu’il cherche à savoir.

Versets 1-9

Je commence à lire le chapitre 44 de la Genèse.

Joseph ordonna à l’intendant de sa maison : Remplis les sacs de ces hommes d’autant de vivres qu’ils peuvent en contenir, et remets l’argent de chacun d’eux à l’entrée de son sac. Tu mettras ma coupe, la coupe d’argent, à l’ouverture du sac du plus jeune, avec l’argent de son blé. L’intendant exécuta les ordres de Joseph. Le lendemain matin, dès qu’il fit jour, on laissa partir ces gens avec leurs ânes. Ils venaient de quitter la ville, et n’en étaient pas encore bien loin, quand Joseph dit à son intendant : Va, poursuis ces gens ! Quand tu les auras rejoints, tu leur demanderas : Pourquoi avez-vous rendu le mal pour le bien ? Pourquoi avez-vous volé la coupe dont mon maître se sert pour boire et pour lire les présages ? Vous avez très mal agi. L’intendant les rattrapa donc et leur parla comme son maître le lui avait dit. Mais ils lui répondirent : Pourquoi mon seigneur, dit-il, pareille chose ? Tes serviteurs n’ont jamais eu la pensée de commettre une telle action ! Nous t’avons rapporté du pays de Canaan l’argent que nous avons trouvé à l’ouverture de nos sacs. Pourquoi aurions-nous donc volé de l’argent ou de l’or dans la maison de ton maître ? Que celui de tes serviteurs chez qui on trouvera cette coupe soit mis à mort et que nous-mêmes nous devenions esclaves de mon seigneur ! (Genèse 44.1-9).

Les onze frères quittent timidement et en silence l’Égypte et surtout ce grand vizir des plus bizarre. Ils osent à peine croire qu’ils sont sur le chemin du retour avec des victuailles. Ça y est ! Ils sont hors de la ville. Mais juste au moment où ils poussent un soupir de soulagement, parce qu’ils croient leur calvaire terminé, voilà que des soldats rappliquent à bride abattue, avec à leur tête l’intendant du grand vizir. Cela n’augure rien de bon, qu’est-ce qu’il se passe maintenant ? Ils ne s’attendaient pas à ce rebondissement inquiétant. On les accuse d’avoir volé la coupe de leur hôte ; ils tombent des nues. Monsieur l’intendant, comment pouvez penser que nous avons fait une chose pareille ? Ils sont à nouveau terrorisés ; leur épreuve interminable ne fait que s’aggraver ; ils sont tombés de Charybde en Scylla.

Décidément, Joseph leur en fait voir de toutes les couleurs. Les Égyptiens pratiquaient la divination de bien des manières, notamment à l’aide de coupes ou de vases ; ils interprétaient les dessins formés par de l’huile versée dans l’eau ou par des objets qui y étaient jetés, tels que des paillettes d’or ou d’argent et même des pierres précieuses. Comme Joseph vénérait l’Éternel, il est probable qu’il n’utilisait pas de moyens occultes de divination.

Pour lui, cette coupe n’est qu’un moyen d’intimider ses frères, ce qu’il réussit fort bien. Il sonde leur disposition d’esprit à l’égard de Benjamin et le suspense du récit perdure. Face à cette accusation grave de vol, les frères essaient de prouver leur bonne foi par une imprécation contre eux-mêmes, mais en faisant cela ils mettent leur tête sur le billot pour ainsi dire. Ils manquent passablement de sagesse pour affirmer que la coupe ne peut pas être dans un de leurs sacs ; ils ont déjà oublié que lors de leur premier voyage l’argent leur avait été restitué sans qu’ils s’en aperçoivent, ni n’en comprennent le pourquoi ou le comment.

Versets 10-13

Je continue.

L’intendant répondit : Bien ! Je vous prends au mot ! Celui sur qui on la trouvera sera mon esclave, mais tous les autres seront traités en innocent. Ils se hâtèrent de déposer chacun son sac par terre et de l’ouvrir. L’intendant fouilla leurs sacs en commençant par celui de l’aîné et en finissant par celui du plus jeune. Et la coupe fut trouvée dans le sac de Benjamin. Ses frères déchirèrent leurs vêtements, chacun rechargea son âne, et ils retournèrent tous à la ville (Genèse 44.10-13).

L’intendant les prend au mot, mais baisse la mise. Personne ne va mourir et seul le fautif sera emmené captif. Il est quand même étonnant que les dix frères ne sentent pas un coup monté. La raison tient certainement au fait qu’ils se sentent tellement culpabilisés d’avoir éliminé leur frère Joseph qu’inconsciemment ils se disent mériter ce qui leur arrive. Ils sont sans doute soulagés d’entendre dire que seul le voleur sera puni ; au vu des circonstances, c’est un moindre mal. Malheureusement et à leur grande stupeur, la coupe en question se trouve dans le sac de Benjamin ; c’est la cerise sur le gâteau, mais inversé. Ils sont atterrés ; leur situation ne pourrait être pire. Dans la série noire, ils ont tiré le gros lot.

C’est la première fois que les frères de Joseph pris au piège acceptent d’assumer leur responsabilité de frères aînés et protecteurs du plus jeune. Jusque-là, ils ont négocié et tergiversé, mais cette fois-ci les jeux sont faits ; ils doivent faire face à leur destinée. Jacob ne voulait pas laisser partir Benjamin de peur qu’il ne lui arrive malheur. Ruben puis Juda se sont portés garants pour lui.

La pensée de laisser leur jeune frère derrière eux quelque part en Égypte leur est intolérable ; il n’en est pas question. Ils déchirent leurs vêtements en signe de consternation et de douleur. Courageusement, alors qu’on ne leur demande rien, ils rechargent leurs ânes et font marche arrière ; solidaires, ils décident de faire front et de gérer la crise. Ils devaient avoir le dos voûté et la tête bien basse sur leurs ânes en direction de la ville qu’ils venaient à peine de quitter. La détresse et l’angoisse se lisaient sur leurs visages, car ils pensaient tous à leur vieux père qui allait certainement mourir de douleur et ils ne peuvent rien faire. En fait, ils sont simplement en train d’expérimenter ce qu’a vécu Joseph 23 ans plus tôt, alors qu’à l’âge de 17 ans il était emmené de force en Égypte par les Bédouins pour y être vendu. Contrairement aux apparences, les choses prennent bonne tournure. Au lieu de rentrer chez eux et d’abandonner Benjamin à son triste sort, ce qu’ils auraient pu faire, ils faisaient demi-tour pour venir s’expliquer avec le grand vizir. C’est exactement ce qu’espérait Joseph.

Versets 14-17

Je continue.

Juda se rendit avec ses frères à la maison de Joseph : celui-ci s’y trouvait encore : ils se prosternèrent à terre devant lui. Joseph leur dit : Qu’est-ce que vous avez fait là ? Ne saviez-vous pas qu’un homme tel que moi a un pouvoir de deviner les choses cachées ? Juda dit : Que répondrons-nous à mon seigneur ? Que dirions-nous ? Comment prouverions-nous notre innocence ? Dieu a mis à découvert la faute de tes serviteurs. Nous voici donc esclaves de mon seigneur, nous, ainsi que celui qui avait la coupe dans son sac. Mais Joseph déclara : Il ne me viendrait pas à l’idée d’agir ainsi ! L’homme dans le sac duquel on a trouvé la coupe sera mon esclave ; mais vous, retournez tranquillement chez votre père (Genèse 44.14-17).

Juda est à nouveau le porte-parole des onze frères. La première chose qu’il dit est que Dieu a mis à nu leur faute, il les a débusqués. Le châtiment est tombé ; ils vont à leur tour devenir esclaves pour avoir vendu leur jeune frère Joseph. Comme par hasard, Joseph était chez lui ; en fait, il les attendait espérant bien les revoir. Son plan a fonctionné à merveille. Il bluffe extrêmement bien tout en disant vrai lorsqu’il se fait passer pour quelqu’un ayant le don de deviner les choses cachées. Il en a effectivement le pouvoir puisqu’il possède le don surnaturel d’interpréter les rêves, mais les frères croient que c’est par la coupe. Il leur dit la vérité tout en les induisant en erreur.

Comme je l’ai déjà dit, Joseph ne pratiquait pas les sciences occultes puisqu’il vénérait l’Éternel dont il est prophète. Il serre les boulons à fond faisant subir la roche tarpéienne à ses frères sans aucun répit. Joseph leur donne une nouvelle fois la possibilité de repartir sans Benjamin lorsqu’il leur dit : Il n’est pas question de condamner toute une famille à cause de la faute de l’un d’entre vous. En d’autres mots, la justice doit être équitable, partez en paix, mais je garde le cadet comme esclave.

Que vont-ils décider, le sacrifieront-ils et du coup leur père, comme ils l’ont fait avec lui, autrefois ? Nous sommes à la cour du grand vizir et l’heure est des plus graves. Le long discours que Juda va faire témoigne du changement radical qui s’est opéré en lui. Ici, Juda va apparaître sous un angle très positif. En tant que porte-parole, il va s’exprimer au nom des dix frères, car tous sont solidaires dans ce malheur. Cette longue plaidoirie en faveur de Benjamin va jouer un rôle décisif dans la suite des événements, car elle va toucher Joseph en plein cœur.

Versets 18-34

Je continue.

Alors Juda s’avança et dit : De grâce, mon seigneur, permets à ton serviteur de dire une parole à mon seigneur, sans que sa colère ne s’enflamme contre ton serviteur, car tu es l’égal du pharaon. La première fois, mon seigneur a questionné ses serviteurs en leur demandant : Avez-vous un père ou un autre frère ? Et nous avons répondu à notre seigneur : Nous avons un père âgé et un jeune frère qui lui est né dans sa vieillesse et dont le frère est mort, celui-ci est le seul fils qui soit resté de sa mère, et son père l’aime. Tu as commandé à tes serviteurs : Amenez-le-moi pour que je le voie de mes propres yeux. Nous avons répondu à mon seigneur : Le jeune garçon ne peut pas quitter son père ; sinon celui-ci en mourra. Alors tu as déclaré à tes serviteurs : Si votre jeune frère ne vient pas avec vous, vous ne serez plus admis en ma présence. Lorsque nous sommes revenus auprès de ton serviteur, mon père, nous lui avons rapporté les paroles de mon seigneur. Et lorsque notre père a dit : Retournez là-bas pour nous acheter quelques vivres, nous lui avons répondu : Nous ne pouvons y retourner qu’à la condition d’emmener notre jeune frère, car s’il n’est pas avec nous, nous ne serons pas admis auprès de cet homme. Alors ton serviteur mon père nous a dit : vous savez vous-mêmes que ma femme Rachel m’a donné deux fils. L’un d’eux m’a été enlevé. Il a certainement été dévoré par une bête sauvage, car je ne l’ai jamais revu. Si vous prenez encore celui-ci pour l’emmener loin de moi et qu’il lui arrive malheur, vous me ferez mourir de douleur à mon grand âge. Maintenant donc, si je retourne auprès de ton serviteur mon père sans ramener avec nous le jeune homme auquel il est tellement attaché, quand il constatera son absence, il mourra, et tes serviteurs seront responsables de l’avoir fait mourir de douleur dans son grand âge. Car moi, ton serviteur, j’ai pris la responsabilité du jeune homme devant mon père ; je lui ai dit : Si je ne te le ramène pas, je serai pour toujours coupable envers mon père. Maintenant donc, je te prie, permets à ton serviteur de rester comme esclave de mon seigneur à la place du jeune homme, et qu’il reparte avec ses frères. Comment pourrais-je retourner chez mon père sans le jeune garçon ? Ah, que je ne sois pas témoin du malheur qui frapperait mon père ! (Genèse 44.18-34).

Quel contraste avec le Juda que nous avons vu lorsqu’il avait quitté le clan familial pour aller faire de l’élevage avec un ami cananéen ! Alors, s’étant marié il avait eu trois fils. Les deux premiers se sont également mariés, l’un après l’autre, avec la même femme cananéenne nommée Tamar. Elle devint deux fois veuve, parce que Dieu a fait mourir ses maris à cause de leur conduite. Cette triste histoire pointe un doigt accusateur en direction de Juda qui se distingue comme père défaillant qui n’a pas enseigné à ses enfants à vénérer l’Éternel ; et comment le pouvait-il, puisque lui-même menait une vie de bâton de chaise ? Juda promet alors à sa belle-fille de lui donner plus tard son troisième garçon, mais il n’avait aucunement l’intention de tenir sa parole.

C’est alors que cette histoire jusqu’alors lugubre et déprimante prend une tournure sordide. Tamar donna une leçon magistrale à Juda en le piégeant des plus belles lorsqu’elle se déguisa en prostituée sacrée dont il profita des services. Mais il ignorait qu’il couchait avec sa belle-fille. Lorsque Juda apprit que Tamar était enceinte, il ordonna qu’elle soit brûlée vive jusqu’à ce qu’elle prouve que c’était lui qui l’avait engrossée. Elle donna naissance à des jumeaux obtenant ainsi ce qu’elle voulait, une descendance que Dieu va d’ailleurs bénir.

En comparaison avec la peau de vache que Juda était lors de cet incident, il s’est considérablement anobli. Il vient de prouver qu’il a changé avec ce long discours tout empreint d’authenticité et de sensibilité poignante qu’il adresse au grand vizir. Par la même occasion, Joseph apprend ce que les 10 frères avaient dit à leur père suite à sa disparition ; ils ont raconté qu’il était mort dévoré par une bête sauvage. Il entend son bulletin nécrologique d’abord en hébreu et ensuite en égyptien ; ça doit lui faire drôle. Mais dans tout ça, il ressort que Juda a maintenant le cœur tendre ; il se propose de rester en Égypte à la place de Benjamin. Il exprime ainsi son amour non seulement envers Benjamin, mais aussi pour son vieux père Jacob. Il est prêt à se sacrifier pour son demi-frère cadet, mourir même à sa place afin d’éviter l’esclavage à l’un et le chagrin à l’autre.

C’est déjà Juda qui avait transformé le projet d’assassinat de Joseph en vente comme esclave à une caravane de Bédouins afin de lui sauver la vie ; les autres, mis à part Ruben, voulaient purement et simplement en finir avec leur frère une fois pour toutes. Juda ne sait que trop bien qu’il aurait dû s’opposer à ce ténébreux projet, alors ici il essaie de se rattraper en intercédant pour Benjamin et en offrant sa vie à sa place. Il est prêt à subir le sort qu’il avait imposé à Joseph. Au vu du fonctionnement collectif de ces familles antiques patriarcales, ce que propose Juda à titre personnel représente aussi ce que les autres frères auraient fait. Leur crime les a rattrapés et piégés, mais ils sont vraiment prêts à tout pour se racheter. Juda est l’ancêtre de Jésus-Christ. Son attitude est une image annonciatrice de la compassion de Dieu en la personne du Christ qui accepta de se faire crucifier par amour pour nous, lui juste pour des injustes. Une parole de l’Évangile dit :

Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils, son unique, pour que tous ceux qui placent leur confiance en lui échappent à la perdition et qu’ils aient la vie éternelle. En effet, Dieu a envoyé son Fils dans le monde non pas pour condamner le monde, mais pour qu’il soit sauvé par lui (Jean 3.16-17).

Par sa mort expiatoire, Jésus s’est substitué à ceux qui se reconnaissent coupables devant Dieu ; il a pris leur place sur la croix afin de purger leur peine et ainsi pouvoir en toute justice leur accorder le pardon divin.

Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.

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