Genèse 26.1-35
Chapitre 26
Introduction
Un jour, quelqu’un m’a dit qu’il obéissait au grand principe biblique qui dit : aide-toi et le ciel t’aidera ! Bon d’accord, sauf que cette parole ne se trouve nulle part dans les Écritures. Cette philosophie de la vie qui consiste à compter uniquement sur soi et à espérer en sa bonne étoile, ce n’est rien d’autre que du paganisme pur et dur.
Malheureusement, c’était aussi la façon d’agir de Jacob, le petit-fils d’Abraham. Il a réussi un coup magistral en échangeant une soupe aux lentilles contre le droit d’aînesse qui revenait légalement à son frère jumeau Ésaü.
Ce fut incontestablement la ruse du siècle qui rapporta le plus, car cet acte est irréversible et ses conséquences sont incalculables. Jacob va continuer à prospérer grâce à la tromperie jusqu’au jour où Dieu en a marre et l’envoie en pension ou plus exactement en maison de redressement, comme ces institutions s’appelaient autrefois. Or le directeur de l’établissement en question ne sera autre que son oncle Laban, un vieux renard, pire loubard, ça n’existe pas. Il les connaît toutes et il va en faire baver et voir de toutes les couleurs à son neveu Jacob qui va transpirer à grosses gouttes sous sa botte.
Dans le chapitre précédent, les courts récits de la naissance des jumeaux et de la vente du droit d’aînesse ont ouvert l’histoire de Jacob, le patriarche fondateur d’Israël. Elle va se poursuivre sur une dizaine de chapitres. À cause des coups tordus de Jacob et de l’intempérance d’Ésaü, la rivalité terrible, qui régnera entre les deux frères et leurs descendances, durera pas moins de 17 siècles.
L’Éternel avait annoncé à Rébecca leur mère que dans cette lutte fratricide qui commença déjà dans son sein, l’aîné Ésaü serait assujetti à Jacob le plus jeune. L’histoire du plat de lentilles relate donc sa première victoire sur son frère. Le peuple édomite, issu d’Ésaü, va s’établir au sud-est de la Mer Morte sur un territoire d’environ le tiers de la France. Il aura une histoire violente et tumultueuse qui se terminera par son total anéantissement.
Cette fin brutale fut annoncée par les trois plus grands prophètes d’Israël et réalisée par diverses puissances : les Assyriens, Babylone sous Nabuchodonosor et la nation d’Israël à plusieurs reprises. Finalement au 6e siècle de notre ère, les musulmans détruisirent Petra la capitale du royaume d’Édom, et au 12e siècle les croisés y construisirent un château fort. Aujourd’hui, il ne reste plus aucune trace de ce peuple.
Contrairement aux us et coutumes de l’époque, et comme je l’ai déjà dit, Dieu avait de toute façon déjà choisi Jacob comme l’héritier des promesses, mais on ne saura jamais comment cela se serait fait puisque ce dernier a opté pour la ruse afin de s’emparer du droit d’aînesse au lieu d’attendre l’intervention divine.
Verset 1-2
Nous abordons maintenant le chapitre 26 de la Genèse qui en apparence n’est pas très captivant bien que ce soit le seul qui soit exclusivement consacré au fils d’Abraham Isaac, porteur de la promesse. Il part dans le pays des Philistins, à cause d’une famine. Puis, tel père tel fils, il fait passer sa femme pour sa sœur et ensuite il creuse des puits. Pourtant à y regarder de plus près, ce chapitre donne des enseignements précieux sur Dieu et sur l’importance de la patience dans la marche avec lui.
Je commence à lire :
À cette époque-là, il y eut de nouveau une famine dans le pays, comme naguère au temps d’Abraham. Alors Isaac se rendit à Guérar chez Abimélec, roi des Philistins. En effet, l’Éternel lui était apparu et lui avait dit : Ne descends pas en Égypte ! Fixe-toi dans le pays que je te désignerai. Séjourne dans ce pays-ci (Genèse 26.1-2).
C’est un remake, on a déjà vu ça avec Abraham ; il y a une famine dans le pays de Canaan, mais cette foi-ci l’Éternel prend les devants et dit spécifiquement à Isaac de se rendre chez les Philistins plutôt que d’aller en Égypte l’endroit où les foules convergeaient en cas de disette. Abimélek n’est pas un nom propre, mais un titre comme pharaon en Égypte. Ce roi est un descendant de celui qui avait fait alliance avec Abraham 80 ans plus tôt.
Versets 3-6
Je continue.
Je serai avec toi et je te bénirai. Car c’est à toi et à ta descendance que je donnerai tous ces territoires. J’accomplirai ainsi le serment que j’ai fait à ton père Abraham. Je rendrai ta descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel et je lui donnerai tous ces territoires-ci, et tous les peuples de la terre seront bénis en ta descendance. Je le ferai parce qu’Abraham m’a obéi et qu’il a observé mes prescriptions, mes commandements, mes préceptes et mes lois. C’est pourquoi Isaac resta à Guérar (Genèse 26.3-6).
Pour la première fois, l’Éternel apparaît à Isaac afin de le rassurer et de confirmer qu’il accomplira la promesse qu’il a faite à son père Abraham. Celle-ci a été donnée à plusieurs reprises au patriarche et comprend trois volets qui sont : je te donnerai toutes les contrées occupées par les tribus cananéennes, je multiplierai ta descendance, et finalement tous les peuples de la terre seront bénis en ta postérité, une référence à Jésus-Christ, le Messie.
Ces promesses de soutien et de protection seront souvent répétées au peuple élu tout au long de l’Ancien Testament. Jusque ici, tout va bien ; Isaac quitte Beer-Chéba et obéit en se rendant là où Dieu lui a dit d’aller.
Verset 7
Je continue :
Lorsque les hommes de l’endroit s’enquéraient au sujet de sa femme, il répondait : C’est ma sœur. Il ne disait pas qu’elle était sa femme : il avait peur que les gens de l’endroit le tuent à cause d’elle, car elle était très belle (Genèse 26.7).
Rebelote ! Alors qu’Abraham avait dit un demi-mensonge au sujet de sa femme Sara, qui était effectivement sa demi-sœur, Isaac lui dit carrément un gros mensonge. En ce temps-là, c’était apparemment dangereux d’être étranger au pays des Philistins avec une belle femme à ses côtés. Le mari gênant était supprimé et la femme enlevée : la jungle en somme. Dieu est apparu à Isaac pour lui dire qu’il le protégerait et qu’il accomplirait en lui toutes les promesses qu’il avait faites à Abraham, mais, selon toute apparence, il n’y croyait pas, et donc l’Éternel lui a parlé en vain.
Je trouve ça déconcertant et c’était certainement affligeant pour Dieu. D’un autre côté, c’est aussi encourageant pour nous tous. En effet, l’Éternel ne va pas abandonner Isaac à cause de sa lâcheté et de son manque de foi. Il ne lui en tiendra pas rigueur, mais va continuer à agir comme si étant occupé ailleurs il n’avait rien vu ou entendu. L’attitude divine en dit long sur sa compassion, sa longanimité et sa patience à notre égard.
Versets 8-11
Je continue.
Comme il était déjà depuis assez longtemps dans le pays, Abimélek, le roi des Philistins, regardant par la fenêtre, surprit Isaac en train de s’amuser avec Rébecca sa femme. Alors il le fit appeler et lui dit : C’est sûrement ta femme. Pourquoi as-tu dit : C’est ma sœur ? Isaac lui répondit : Je me disais que je risquais de mourir à cause d’elle. Abimélek rétorqua : Te rends-tu compte de ce que tu nous as fait là ? Il s’en est fallu de peu qu’un homme de ce peuple couche avec ta femme ; dans ce cas, tu nous aurais chargés d’une lourde culpabilité. Alors Abimélek fit publier ce décret à tout le peuple : Quiconque fera du mal à cet homme ou à sa femme sera puni de mort (Genèse 26.8-11).
Encore une drôle d’histoire. Ce roi païen devait savoir qu’Isaac était sous la protection de l’Éternel tout comme Abraham en son temps. Mais découvrant qu’il lui avait menti il prend peur ; il se dit que si quelqu’un de son peuple touche à cet homme ou à sa femme, le sort des Philistins est réglé, car ce Dieu qui protège cette famille va leur faire la peau à tous. C’est pour cela qu’il a immédiatement pris des mesures draconiennes. Il est quand même surprenant de constater que finalement Abimélek a davantage de foi en l’Éternel qu’Isaac. Comme dans Sodome avant sa destruction, ceux qui immigraient chez les Philistins risquaient gros ; leurs vies ne valaient pas un clou, sauf s’ils étaient divinement protégés.
Versets 12-17
Je continue.
Isaac fit des semailles dans le pays et récolta cette année-là le centuple de ce qu’il avait semé. L’Éternel le bénissait. Isaac devint un personnage important. Son importance s’accrut encore et il devint même un homme très puissant. Il possédait des troupeaux de moutons, de chèvres et de bovins, et beaucoup de serviteurs, de sorte que les Philistins devinrent jaloux de lui. Ils comblèrent tous les puits que les serviteurs de son père Abraham avaient creusés du vivant de ce dernier en les remplissant de terre. Alors Abimélek dit à Isaac : Va, quitte ce pays, car tu es devenu beaucoup plus puissant que nous. Isaac partit et alla dresser son camp dans la vallée de Guérar où il s’établit (Genèse 26.12-17).
C’est la première fois que la famille patriarcale ajoute la culture du sol à l’élevage des troupeaux ; Jacob continuera cette transition entre la vie nomade et sédentaire. Aujourd’hui encore cette contrée, la bande de Gaza, est très fertile. Conformément à la promesse de Dieu à Abraham, il bénit Isaac et le fait fructifier ; tout lui réussit, ce qui bien sûr suscite des jalousies. Alors, on bouche les puits qu’avait creusés Abraham et qui maintenant appartenaient de droit à Isaac. Le roi ne veut pas d’histoire et l’invite à vider les lieux.
Comme il était étranger et du genre paisible, pas bagarreur du tout, il se soumet et part s’établir là où son père avait résidé longtemps, entre Gaza au bord de la méditerranée et Beer-Chéba au nord du Néguev. Cette affaire de puits bouchés est la méthode que l’Éternel a choisie pour bouger Isaac en le faisant quitter le pays des Philistins. Ce brave garçon a tendance à s’incruster, à devenir sédentaire un peu trop vite ; il s’était attaché à la terre et avait ensemencé des champs comme s’il avait bien l’intention de passer sa retraite dans ce pays ce qui n’était pas au goût de l’Éternel.
Versets 18-23
Je continue.
Il s’installa et fit déboucher les puits qu’on avait creusés du temps de son père Abraham et que les Philistins avaient comblés après la mort d’Abraham, et il leur donna les mêmes noms que son père. En creusant dans la vallée, les serviteurs d’Isaac découvrirent une source d’eau vive. Les bergers de Guérar cherchèrent querelle aux bergers d’Isaac en prétendant : cette eau est à nous. Isaac donna à ce puits le nom d’Esèq, ce qui signifie dispute, parce qu’on s’était disputé avec lui à son sujet. Ensuite ils creusèrent un autre puits, pour lequel on lui chercha de nouveau querelle ; il le nomma Sitna, ce qui veut dire opposition. Puis il partit de là et creusa un autre puits pour lequel on ne lui chercha pas querelle ; il l’appela donc Rehoboth, ce qui veut dire larges espaces, car dit-il, maintenant l’Éternel nous a mis au large et nous prospérerons dans le pays. De là, il remonta à Beer-Chéba (Genèse 26.18-23).
L’eau est bien sûr vitale dans ces contrées arides et les conflits au sujet des puits et des pâturages étaient fréquents, chacun voulant tirer la couverture à soi. Sans eau, la vie n’est pas possible et cet élément pourtant si commun se fait de plus en plus rare dans certaines régions de notre planète. Un nombre toujours croissant de la population mondiale est obligé de consommer de l’eau non potable ce qui favorise la prolifération des maladies et parasites.
Le premier puits qui fut une source de conflits est dit d’eau vive parce qu’il était alimenté par une source souterraine, donc une vraie mine d’or pour ainsi dire par rapport aux puits habituels qui se remplissent lentement par infiltration. Il n’est pas étonnant que les habitants du pays le voulaient pour eux. Tant qu’Abraham était en vie, les puits qu’il avait creusés étaient respectés, mais maintenant les choses se gâtent parce que les Philistins commencent à se montrer hostiles.
Au fil du temps, cette animosité ne fera qu’augmenter au point où un état quasi permanent de guerre existera entre eux et les Israélites une fois que ces derniers seront installés en Palestine. Isaac était un homme patient et paisible et il commence à comprendre que Dieu est réellement avec lui et le guide pas à pas. Alors au lieu de se battre il accepte de se déplacer jusqu’à sa destination finale, Beer-Chéba au sud du pays, mais éloigné de la côte.
Versets 23-25
Je continue.
La nuit de son arrivée, l’Éternel lui apparut et lui dit : Je suis le Dieu de ton père Abraham. Sois sans crainte car je suis avec toi ; je te bénirai et je te donnerai une nombreuse descendance à cause d’Abraham, mon serviteur. Isaac bâtit un autel à cet endroit, il y invoqua l’Éternel et y dressa sa tente. Les serviteurs d’Isaac y creusèrent un autre puits (Genèse 26.23-25).
Dès qu’Isaac est à nouveau à l’intérieur du pays promis, Dieu lui apparaît comme pour exprimer son approbation. Tout comme Abraham, il construit un autel, y offre un sacrifice et invoque l’Éternel. Puis comme il fait très chaud, il cherche à nouveau de l’eau pour abreuver ses nombreux troupeaux. Il aurait pu monter une entreprise de prospection.
Versets 26-32
Je continue.
Abimélek vint le trouver depuis Guérar avec Ahouzath son conseiller et Pikol, le chef de son armée. Isaac leur demanda : Pourquoi êtes-vous venus me trouver, alors que vous me détestez et que vous m’avez renvoyé de chez vous ? Ils lui répondirent : Nous avons bien vu que l’Éternel est avec toi, et nous nous sommes dit : Nous devrions nous engager, nous et toi, par serment ! Nous voudrions donc faire alliance avec toi. Promets-nous, en le jurant, de ne pas nous faire de mal, comme nous ne t’avons pas fait de mal, car nous t’avons toujours bien traité et nous t’avons laissé partir sain et sauf. À présent tu es béni par l’Éternel. Isaac leur fit préparer un grand festin ; ils mangèrent et burent et, le lendemain de bon matin, ils s’engagèrent l’un envers l’autre par serment, puis Isaac les reconduisit et ils le quittèrent en bons termes. Or, ce même jour, les serviteurs d’Isaac vinrent lui annoncer qu’ils avaient trouvé de l’eau dans le puits qu’ils étaient en train de creuser (Genèse 26.26-32).
À cette époque comme aujourd’hui, les festins ponctuaient les grandes occasions de la vie. Le roi des Philistins est un faux jeton de première catégorie, mais il sait faire les bons choix ; il a compris qu’il a intérêt à rester en bon terme avec Isaac qui est béni de l’Éternel. Comme il tient à son trône et bien qu’il soit un païen polythéiste, il fait cette demande d’alliance qu’Isaac accepte parce qu’il est paisible de nature et que son père avait agi de même.
Versets 34-35
Je finis ce chapitre.
À l’âge de 40 ans, Ésaü épousa Judith, fille de Beeri le Hittite, et Basmath, fille d’Élôn le Hittite. Elles rendirent toutes deux la vie amère à Isaac et à Rébecca (Genèse 26.34-35).
Comme il fallait s’y attendre, Ésaü se marie avec des femmes du pays qui étaient païennes et idolâtres ; toutes les mauvaises pommes se trouvent ainsi dans le même panier. Parce qu’il est descendant d’Abraham, Ésaü aura une postérité nombreuse et son peuple deviendra puissant, mais depuis qu’il a vendu son droit d’aînesse il n’est plus au bénéfice des promesses divines. Isaac porte une part de responsabilité dans cette affaire, car il aurait pu prévenir cette union boiteuse.
Contrairement à son père Abraham, il a négligé de s’occuper des affaires de cœur de son fils alors qu’il aurait dû prendre les devants et lui chercher une femme qui soit de la famille ayant foi en l’Éternel. Même si Ésaü n’était pas un homme spirituel, il aurait sans doute accepté par soumission à ses parents. Mais ne voyant rien venir, il succombe à l’appel de la nature et commence à se constituer son petit harem.
Les épisodes de la vie d’Isaac que nous relate le texte mettent en évidence la continuité existant entre Abraham et son fils ; tous deux séjournèrent dans le pays des Philistins et firent alliance avec Abimélek ; Isaac fait déboucher les puits creusés par son père et leur donne les mêmes noms. Mais le plus important est qu’il reçoit de Dieu les mêmes promesses que son père et invoque l’Éternel comme lui. Même si Isaac est l’authentique successeur d’Abraham, il n’a strictement rien fait pour le mériter. Le texte montre bien que la volonté divine est souveraine et qu’il est à l’origine de ce choix. En dernier ressort, c’est toujours l’Éternel qui décide.
Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.