Genèse 19.27 – 21.2
Chapitre 19
Introduction
Une fois, j’ai vu à la télé qu’il y a eu au moins deux expéditions archéologiques sous-marines dans les hauts-fonds de la partie méridionale de la Mer Morte. Qu’est-ce qu’on y cherchait ? Certains croient qu’au fond de la cuvette gisent les ruines de Sodome et Gomorrhe. Mais comme par hasard, le lieu présumé de ces villes est situé à pic de la frontière entre Israël et la Jordanie, donc un endroit militairement sensible.
Pour l’instant, les recherches sont interrompues, parce que les autorités jordaniennes refusent la permission d’empiéter sur leur territoire. Sur un plateau sous-marin voisin situé du côté israélien, on a bien retrouvé des vestiges qui correspondent à une place où on se réunissait pour des festivités. D’après les archéologues, ce centre-ville fut utilisé pendant des siècles jusqu’à une époque qui correspond à celle d’Abraham ; c’est tout ce qu’on sait pour le moment.
Moi je trouve curieux que les soi-disant sites de Sodome au fond de la Mer Morte et de l’arche de Noé sur le mont Ararat soient tous deux situés dans des zones politiquement sensibles.
Versets 23-26
Je continue à lire dans le chapitre 19 de la Genèse.
Au moment où le soleil se levait, Lot arrivait à Tsoar. Alors, l’Éternel fit tomber sur Sodome et sur Gomorrhe une pluie de soufre enflammé par un feu qui venait du ciel, de l’Éternel. Toute la population de ces villes périt ainsi que la végétation. La femme de Lot regarda derrière elle et fut changée en une statue de sel (Genèse 19.23-26).
Sodome et sa banlieue Gomorrhe sont effacées de la carte. Le cataclysme fut d’une telle ampleur que le sol imprégné de pétrole, de bitume et de soufre a littéralement explosé. Dans les jours qui suivirent, toute l’eau d’un lac voisin s’est répandue dans l’immense cratère ainsi formé engloutissant toutes les villes de cette vallée luxuriante qui est aujourd’hui la Mer Morte.
Dans le Nouveau Testament, Jésus-Christ parle de son retour en tant que juge en le comparant au moment où Sodome fut détruite. Je lis le passage :
Le jour où le fils de l’homme reviendra, les choses se passeront comme au temps de Lot : les gens mangeaient, buvaient, achetaient, vendaient, plantaient, bâtissaient. Mais le jour où Lot sortit de Sodome, une pluie de feu et de soufre tomba du ciel et les fit tous périr (Luc 17 28-30).
Le texte précise que la femme de Lot fut changée en une statue de sel. Ce jugement s’abattit sur elle, parce qu’elle avait enfreint l’ordre de l’ange de ne pas regarder derrière elle. Mais elle aimait trop Sodome qu’elle quittait à grand regret avec ses jambes, mais sans son cœur qui y restait incrusté.
Dans un sens on la comprend, on peut s’imaginer qu’elle avait bien décoré sa gentille petite maison, faisait partie du club de dessin et de la chorale du quartier ; qu’elle aimait aller prendre le thé avec ses amies l’après-midi pendant que son mari siégeait aux portes de la ville ou vendait quelques bêtes. Tous deux y avaient élevé leurs deux filles qui étaient fiancées à des garçons du pays ; leurs trousseaux étaient terminés, la salle des fêtes déjà louée et elle venait tout juste de poster les invitations pour les noces somptueuses qu’elle et son mari préparaient. Il lui fallait laisser tout ça derrière elle, tout abandonner.
De toute façon l’avertissement de l’ange, elle n’y croyait pas ; qu’est-ce que ça peut bien faire si je regarde en coin ce qui se passe dans mon dos ? Elle n’a donc pas pu s’empêcher de se retourner pour jeter un dernier coup d’œil et elle fut pétrifiée. Le Nouveau Testament ne dit pas un mot concernant sa foi ou sa justice, par contre Jésus utilise cette femme comme un avertissement ; je cite le passage :
Souvenez-vous de la femme de Lot. Celui qui cherchera à conserver sa vie mondaine la perdra, mais celui qui la perdra en obéissant à Dieu, la retrouvera. (Luc 17 32-33).
Aujourd’hui encore, la région environnante du sud de la Mer Morte présente des formes curieuses faites de sel et qui font penser à des sculptures. La femme de Lot fut frappée sur place et son cadavre aussitôt recouvert d’une épaisse croûte saline ; c’est ainsi qu’elle devint une statue qui témoigne de sa désobéissance. Ça nous parait dur et ça l’est.
S’attacher à ce monde qui passe est un choix qui mène à la catastrophe. Lors de l’enterrement d’un homme qui avait réussi dans cette vie, un voisin pas très délicat demanda à un cousin du défunt : Combien il laisse derrière lui ? La réponse tenait en un seul mot : Tout !
Versets 27-29
Je lis la suite du texte.
Abraham se rendit de bon matin à l’endroit où il s’était tenu en présence de l’Éternel. Il porta son regard vers Sodome et Gomorrhe et vers toute la plaine environnante et il vit s’élever de la terre une épaisse fumée, comme celle d’un immense brasier. Ainsi lorsque Dieu détruisit les villes de la plaine, il n’oublia pas Abraham et il fit échapper Lot à la catastrophe par laquelle il anéantit les villes dans lesquelles Lot avait habité (Genèse 19.27-29).
L’intercession du patriarche permit à son neveu d’avoir la vie sauve ; il n’empêche que l’épaisse fumée qui montait vers le ciel disait à Abraham que Dieu n’avait pas trouvé 10 justes dans la ville. Cette catastrophe est relatée dans la littérature séculière.
Le géographe grec Strabon qui vécut à la fin du 1er siècle av. J-C décrivit tous les pays du monde alors connu et écrivit une étude sociohistorique des peuples qui les habitaient. Il dit avoir recueilli sur place des témoignages transmis oralement d’une génération à l’autre. Il écrit que jadis il existait à l’endroit de la Mer Morte 13 villes qui avaient pour capitale Sodome. Selon lui, elles ont été détruites par un tremblement de terre accompagné d’éruptions d’asphalte liquide enflammé.
L’historien moraliste latin Tacite affirme la même chose vers la fin du 1er siècle ap. J-C. En 1978, un archéologue italien, attaché à l’université de Rome, publia un atlas géographique qui avait été rédigé par la ville d’Ebla, une cité antique dans laquelle on a fait de nombreuses fouilles. Cet atlas comporte 290 noms de cités importantes. La 211e s’appelle Sadome, très proche de Sodome. La 219e se nomme Aquabu, très proche de Aquaba, le nom du golfe de la mer rouge. À l’époque, la ville d’Aquaba, dont nous n’avons pas de traces, était sur le côté N-E du golfe qui aujourd’hui porte ce nom.
De plus, au sud de la Mer Morte, on a découvert un immense cimetière avec les restes de quelque 50 000 personnes, ce qui prouve qu’à une certaine époque cette région était très peuplée. Ce récit de la destruction des villes de la plaine met en évidence à la fois l’attention que Dieu porte à Abraham en épargnant son neveu, et Sa justice expéditive qu’il n’exerce pourtant pas de manière aveugle et arbitraire, car il tient compte des justes lorsqu’il doit punir.
Versets 30-38
La fin de ce chapitre est très sordide. Je le lis en compressant :
Par la suite Lot alla habiter avec ses deux filles dans une caverne de la montagne. L’aînée dit à la cadette : Notre père est déjà âgé et il n’y a pas d’autres hommes dans ce pays pour s’unir à nous. Allons, faisons-lui boire du vin et couchons avec lui pour lui donner une descendance. Cette nuit-là, elles firent donc boire du vin à leur père et l’aînée vint partager la couche de son père qui ne se rendit compte de rien. Le lendemain elles firent encore boire du vin à leur père et la cadette alla s’étendre près de lui. Il ne s’aperçut de rien. Les deux filles de Lot devinrent enceintes de leur père. L’aînée eut un fils qu’elle appela Moab, ce qui veut dire Issu du père, c’est l’ancêtre des Moabites et la cadette eut un fils qu’elle appela Ben-Ammi, ce qui veut dire Fils de mon parent, c’est l’ancêtre des Ammonites. Ils existent encore aujourd’hui (Genèse 19.30-38).
Comme je l’ai déjà dit, les Écritures n’évitent pas de relater comment les choses se sont réellement passées sans essayer d’en arrondir les angles. Lot avait dressé sa tente jusqu’à Sodome en raison de son attachement aux richesses temporelles ; il devint peut-être important, mais au prix de l’acceptation par ses filles des us et coutumes locales ce qu’elles viennent de prouver.
Ce texte ne passe aucun jugement sur cette sombre affaire de mœurs, son but est simplement d’expliquer l’origine des peuples Moabites et Ammonites qui s’établirent au nord l’un de l’autre et à l’est de la Mer Morte. Ils furent des ennemis héréditaires des Israélites et reviennent souvent dans l’histoire du peuple hébreu.
Chapitre 20
Introduction
Nous voici arrivés au chapitre 20 de la Genèse, une histoire qui est aussi bénéfique qu’une cinquième patte à une vache ; il s’agit d’un autre triste épisode de la vie d’Abraham. La mésaventure survenue en Égypte se répète : les acteurs principaux sont les mêmes puisqu’il s’agit du patriarche et de sa femme, les figurants et le décor ont changé, mais c’est le même bobard, la même demi-vérité qu’Abraham avait racontée au pharaon. Dans la série des grandes magouilles, c’est re-belote.
Versets 1-3
Je commence à lire :
Abraham quitta cette région pour aller dans le Néguev. Il s’installa entre Qadech et Chour, puis il séjourna à Guérar. En parlant de sa femme Sara, il disait : C’est ma sœur ! De sorte qu’Abimélek, le roi de Guérar, la fit enlever. Mais Dieu visita Abimélek de nuit en songe et lui dit : tu vas mourir, à cause de cette femme que tu as enlevée, car elle est mariée (Genèse 20.1-3).
Voyons le cadre de cette histoire : Abraham séjourne quelque temps aux confins du désert du Néguev, puis va s’établir sur la côte méditerranéenne dans le pays des Philistins, aux environs de la bande de Gaza aujourd’hui. Sara a presque 90 ans, ce qui correspondrait de nos jours à une femme de 50 ans bien conservée ; elle a très peu de rides et bien pomponnée elle fait encore tourner les têtes. En tout cas, le roi du coin, comme tout tyran qui se respecte, la fait enlever pour l’ajouter à son harem comme on le ferait d’un trophée de guerre. C’est dur, mais c’est ainsi que se passaient les choses à cette époque ; encore que ça se fait toujours bien ; seulement aujourd’hui, ce sont les personnages influents et haut placés, hommes d’affaires ou politiciens ; il n’y a qu’à songer à un ancien président des États-Unis.
Alors, les petites secrétaires n’ont qu’à bien se tenir et marcher dans la combine parce que ça compte pour les bonus et l’avancement dans l’entreprise. Bref, Abraham a quitté son arbre de Mamré, mais on ne sait pas pourquoi. Est-ce à cause des événements précédents ? Les émotions fortes générées par la destruction de Sodome lui ont peut-être donné envie de changer d’air. Comme d’habitude, il se cache derrière Sara ; l’humiliation qu’il avait subie en Égypte ne lui a pas servi de leçon ; le même scénario se répète.
Dieu intervient et le roi prend peur ; tout éberlué, il demande des comptes à Abraham pour son mensonge et le jugement divin qui pèse sur son royaume.
Verset 11
Sur quoi, le patriarche lui répond, et je lis :
Je me suis dit : Certainement on n’a aucune crainte de Dieu dans ce pays-ci, et on me tuera à cause de ma femme (Genèse 20.11).
La crainte de Dieu est une expression conventionnelle qui revient fréquemment dans les Écritures et qui équivaut à avoir la foi. Ça correspond aussi à une attitude de profonde révérence, à l’extrême respect que l’homme doit à Dieu, qui implique la reconnaissance de son autorité et l’obéissance à ses commandements.
Mais ici, la foi légendaire d’Abraham a encore fait naufrage alors que Dieu vient de lui promettre que d’ici un an lui et Sara auraient un héritier ; si ça se trouve, elle est déjà enceinte. Cette peur soudaine et irrationnelle du patriarche se comprend. Interrogé par le roi des Philistins, il s’explique.
Versets 12-13
Je lis la suite :
Sara est réellement ma parente puisqu’elle est fille de mon père, mais pas de ma mère. Elle est devenue ma femme. Quand Dieu m’a fait quitter la maison de mon père et aller de lieu en lieu, j’ai dit à ma femme : Aie la bonté de dire, partout où nous irons, que je suis ton frère (Genèse 20.12-13).
Abraham était méfiant vis-à-vis de Dieu ; il n’avait pas tellement confiance en lui quand il a quitté sa ville natale et lui reproche même son pèlerinage ; alors pour survivre, lui et sa femme ont fait un pacte. C’est toujours ainsi que les choses se passent, mes doutes en la bonté de Dieu conduisent aux magouilles qui éclipsent ma foi.
Abraham a fait usage de ce lâche procédé à deux reprises : une première fois en Égypte et à nouveau avec Abimélek le roi des Philistins. C’était en fait l’application d’un accord convenu au début de son mariage avec Sara. Ces deux actions du patriarche sont réfléchies et préméditées ce qui aggrave d’autant son cas. Il est intéressant de remarquer dans tout ça que l’Éternel ne s’émeut pas outre mesure ; patiemment, il est en train d’enseigner à son serviteur la confiance en Dieu et les échecs font partie de cet apprentissage. Évidemment, quand la même faute se reproduit, c’est quand même décourageant.
Versets 14-17
Je finis le chapitre.
Alors Abimélek prit des moutons, des chèvres et des bovins, des serviteurs et des servantes et en fit cadeau à Abraham. Il lui rendit aussi Sara, sa femme. Puis il ajouta : Mon pays est à ta disposition ; établis-toi où bon te semblera. Puis à Sara il dit : Voici que j’ai donné mille pièces d’argent à ton frère. C’est là un gage de ton innocence pour tous ceux qui sont avec toi et cela te justifiera devant tous. Abraham pria Dieu, et Dieu guérit Abimélek ainsi que sa femme et ses servantes (Genèse 20.14-17).
Abimélek dédommage Abraham assez grassement pour le dérangement et ne les éjecte pas comme l’avait fait Pharaon ; le patriarche prie Dieu d’ôter la malédiction et tout rentre dans l’ordre. On a presque envie de dire : ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. En fait, c’est presque ça, puisque le sujet du chapitre 21 est la naissance d’Isaac, le fils de la promesse. Après le comportement mensonger précédent, un remake de l’incident égyptien, nous sommes à nouveau en plein dans cette alliance importante entre Dieu et Abraham.
Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.