#01 Introduction – Pierre dit « au revoir » (2Pierre 1.1)
Dans sa seconde épître, Pierre adresse une supplication finale et passionnée à des croyants dispersés dans l’empire romain. Nous sommes entre l’an 64 et 68. Pierre se trouve emprisonné à Rome où il s’attend à être exécuté (2Pierre 1.13-15). On peut donc dire que cette épître de Pierre est son « chant du cygne », tout comme la seconde épître à Timothée pour l’apôtre Paul, et il faut remarquer que tous deux envisagent leur départ avec une très grande sérénité (2Timothée 4.6-8). Comme Pierre peut recevoir des visiteurs, il apprend l’existence des faux frères et la menace qu’ils font peser sur les croyants. Sachant que leur nombre ira en augmentant, Pierre les dénonce vertement car il veut mettre en garde les croyants contre les imposteurs religieux.
La défense de la pureté de l’Évangile occupe donc une grande partie de cette épître dynamique et très polémique. En effet, il commence par mentionner des « histoires habilement inventées » (1.16) par des apostats qui font une interprétation personnelle des Écritures (1.20-21) et il les qualifie de « prophètes de mensonge » (2.1) et de « moqueurs » (3.3). Malheureusement, il y aura toujours « des loups féroces ayant l’apparence d’agneaux » (Matthieu 7.15 ; Actes 20.29), et qui cherchent à tromper les âmes simples et ignorantes. Ce qui les rend particulièrement dangereux est qu’ils font profession de foi chrétienne et que les croyants leur font confiance. Mais leur christianisme n’est qu’un vernis, un habit de carnaval qu’ils portent en public, car en réalité, ils « renient le Christ » (2.2) et vivent comme des païens qu’ils n’ont jamais cessé d’être. D’ailleurs Pierre dit d’eux : « Ils confirment la vérité de ces proverbes : Le chien retourne à ce qu’il a vomi et la truie à peine lavée se vautre de nouveau dans la boue ” (2.22).
Pierre est tout aussi mordant que Jude dans sa condamnation du syncrétisme religieux qui est sorti de la rencontre du christianisme naissant avec le paganisme et le judaïsme et qui donnera naissance au gnosticisme. Les imposteurs religieux sont motivés par l’amour de l’argent, du pouvoir et du prestige. Pierre leur reproche également leur pratique sexuelle débridée (2.10, 13-14) et leur arrogance. Outre un grand coup de patte contre les faux frères, dans cette épître, Pierre enseigne la bonne façon de se conduire quand on est confronté à des temps difficiles.
Cette épître a eu quelque mal à être reconnue canonique car aucun des Pères de l’Église du second siècle ne la mentionne. Pourtant, Justin le martyr (100-165) la connaissait et la cite (2.1) dans l’un de ses ouvrages (Dialogue avec Tryphon). Justin utilise aussi le même mot grec pour « faux docteurs » (pseudodidaskaloi) que Pierre. Au 3e siècle, plusieurs dirigeants chrétiens sont convaincus que Pierre est l’auteur de cette épître. Méthodius d’Olympe cite littéralement un passage de 2 Pierre (3.8). Firmilien, évêque de Césarée en Asie Mineure, fait allusion à la dénonciation des faux frères par Pierre. Origène (185-253), Père de l’Église, inclut cette épître dans les livres canoniques. Au début du 4e siècle, Eusèbe de Césarée (265-340), Père de l’histoire religieuse, reconnaît cette épître ainsi que celles de Jean comme inspirées, mais contestées. En effet, Jean ne se déclare pas leur auteur et Pierre a été exécuté par Néron avant de confirmer qu’il était bien l’auteur de 2Pierre. Athanase (295-373) puis Augustin (354-430), reconnaissent 2Pierre comme rédigée par Pierre et inspirée.
Le concile de Laodicée (372) l’inclut dans le canon des Écritures saintes et les manuscrits Codex Sinaïticus et Vaticanus du 4e siècle et Codex Alexandrinus du 5e siècle l’incluent également. Enfin, Jérôme (346-420) inclut 2Pierre dans la Vulgate latine. Il accepte bien son authenticité mais dit aussi qu’elle est contestée à cause de la différence de style entre les deux épîtres. C’est en effet une objection sérieuse, mais qui peut facilement être attribuée aux deux secrétaires différents que Pierre a utilisés, et puis les thèmes abordés et les objectifs recherchés par l’apôtre ne sont pas les mêmes dans les deux épîtres, la première ayant pour but de consoler les croyants persécutés.
Cela dit, ces deux épîtres ont aussi de nombreux points communs comme, par exemple, la même salutation très inhabituelle et il y en a beaucoup d’autres au niveau du vocabulaire. Pierre est le seul à utiliser un certain verbe pour dire que le baptême « n’ôte pas » la souillure de la chair (1Pierre 3.21) et qu’il sera bientôt « ôté » de sa tente, c’est à dire de son corps (2Pierre 1.14). Il applique l’expression « sans défaut et sans tache » à Jésus-Christ dans sa première épître et aux croyants dans la seconde (1Pierre 1.19 ; 2Pierre 3.14). Et il accuse les faux frères d’être « tarés et souillés » (LSG 2Pierre 2.13). Par ailleurs, dans chaque épître, Pierre mentionne la parole prophétique de Dieu révélée dans l’Ancien Testament (1Pierre 1.10-12 et 2Pierre 1.19-21), la nouvelle naissance (1Pierre 1.23 et 2Pierre 1.4), l’élection souveraine des croyants (1Pierre 1.2 et 2Pierre 1.10), la nécessité de vivre dans la sainteté (1Pierre 2.11, 12 et 2Pierre 1.5-7), le jugement de l’immoralité (1Pierre 4.2-5 et 2Pierre 2.10-22), la seconde venue de Jésus-Christ (1Pierre 4.7, 13 et 2Pierre 3.4), le châtiment des impies (1Pierre 4.5, 17 et 2Pierre 3.7) et la seigneurie du Christ (1Pierre 1.3 ; 3.15 et 2Pierre 1.8, 11, 14, 16 ; 2.20 ; 3.18).
Siméon Pierre, esclave et apôtre de Jésus-Christ, salue ceux qui ont reçu en partage avec nous une foi de même prix fondée sur la justice de notre Dieu et Sauveur Jésus-Christ (2Pierre 1.1).