Matthieu 1.1-23
Chapitre 1
Introduction et Versets 1-15
Quand à l’école il faut apprendre les noms de personnages qu’on nous dit être célèbres, c’est rasoir à mourir, une vraie galère. Pourtant, ces gens sont importants dans la mesure où ils ont littéralement fait l’histoire et en sont les points d’ancrage. Sans eux, les récits n’auraient pas de corps. C’est exactement la même chose en ce qui concerne les généalogies contenues dans les Textes Sacrés ; elles sont barbantes au possible, mais elles structurent toute l’histoire sainte. Matthieu commence son Évangile avec la filiation du Christ qui remonte jusqu’à Abraham l’ancêtre fondateur des Israélites.
Ce qui est curieux pour l’époque est que Matthieu a inclus 5 femmes dont 3 trempent dans des histoires sordides. La 4e, Bath-Chéba femme d’Urie le Hittite, fut doublement dérobée par le roi David, d’abord à l’un des ses officiers et ensuite pour la mettre dans son lit. Plus tard, le roi fit disparaître le mari gênant. Mais David ne s’en est pas tiré à bon compte, car il lui a fallu subir le jugement de Dieu et récolter les fruits amers de ses fautes. Il ne fut cependant pas rejeté comme il le méritait.
Suite à cette affaire, il se repentit amèrement, ce qu’il mit par écrit dans plusieurs psaumes. Il expérimenta alors le pardon et la grâce de Dieu, ce qui est un réconfort pour chacun d’entre nous. En effet, une brebis peut sortir du bercail et s’égarer, mais le Grand Berger cherche les brebis perdues et tente de les ramener à la bergerie. Ainsi, si l’Éternel a sévèrement puni le roi David, c’était pour le ramener dans le droit chemin. David prit Bath-Chéba pour femme et elle lui enfanta un fils qui techniquement est adultérin, mais qui devint quand même le grand roi Salomon. C’est lui qui conduisit la nation d’Israël à son apogée. Et c’est ainsi que dans la filiation du Christ figurent Bath-Chéba et son fils Salomon.
À côté des femmes qui sont les maîtresses de récits sordides, la généalogie de Matthieu comprend aussi un certain nombre d’hommes qui mériteraient plutôt le pénitencier que de figurer parmi les ancêtres du Christ. On peut se demander pourquoi, dès le début du Nouveau Testament, Dieu met devant nos yeux des noms de personnages — tant hommes que femmes — qui évoquent les fautes les plus graves. Sans doute que le Seigneur du ciel et de la terre veut attirer notre attention sur le fait que de la femme aux petites vertus jusqu’aux grands rois en passant par les hommes les plus pieux, nous sommes tous pervertis, entachés de vices divers et même coupables de crimes de sang.
Dieu n’a pas choisi le peuple d’Israël comme famille ancestrale du Messie à cause de sa religiosité ou de sa bonne conduite, loin de là, mais parce qu’il l’a décidé selon le conseil de sa seule volonté, un point c’est tout. C’est un choix qui de notre point de vue infiniment dérisoire peut sembler bien arbitraire et pourtant Dieu n’est ni capricieux ni sentimental. Il agit en fonction de critères qui ne nous sont pas révélés. L’apôtre Paul explique la souveraineté de Dieu dans ses choix dans une de ses Épîtres où il parle des petits-fils d’Abraham qui naquirent de Rébecca la femme de son fils Isaac. Je lis le passage :
Rébecca, ses enfants avaient un seul et même père : notre ancêtre Isaac. Avant leur naissance, par conséquent avant qu’ils n’aient fait ni bien ni mal, et pour bien prouver que Dieu avait déjà fixé son plan et que tout dépend, non du comportement des hommes, ni de leurs mérites, mais du libre choix de Dieu, il fut dit à Rébecca : L’aîné servira le cadet ce qui s’accorde avec cet autre texte de l’Écriture : j’ai préféré Jacob à Ésaü ! (Romains 9.10-13).
Le fait que l’Éternel ait choisi des femmes étrangères et de petites vertus dans la généalogie du Christ prouve bien qu’il est le Seigneur du ciel et de la terre y compris tous les êtres humains. Cela nous rappelle que depuis la nuit des temps les non-juifs font aussi partie du plan de Dieu. En incluant ces 5 femmes aux vies marginales, Matthieu, et derrière lui le Saint-Esprit qui est l’auteur de cet Évangile, répond à de possibles rumeurs qui peut-être circulaient concernant les circonstances inhabituelles de la naissance de Jésus. Matthieu prouve ainsi que d’une part le Christ n’est aucunement un enfant illégitime, et d’autre part un certain nombre de ses ancêtres, dont des rois, trempaient dans des situations moralement répréhensibles. Malgré cela, l’Éternel a agi en leur faveur, car c’est pour sauver des pécheurs qu’Il a envoyé son Fils. Si Dieu a montré sa grâce et sa faveur envers des païens et des coupables avant la venue du Christ, il agira de même envers ceux qui viendront après Lui. Jésus lui-même a dit à ceux de sa génération :
Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs (Matthieu 9.13).
Mis à part les femmes mentionnées dans la généalogie du Christ, il y a un personnage qui mérite l’attention, car il est sujet de controverses. Dans la liste des ancêtres du Messie, figure un certain Jéconia. Or de la bouche même du prophète Jérémie, l’Éternel l’avait maudit en déclarant :
Quand Jéconia, roi de Juda, serait un anneau à ma main droite, je t’arracherais de là.
Cette parole revêt encore plus de force lorsqu’on songe que cet anneau portait le cachet qui servait à sceller les ordres royaux ; on ne s’en séparait jamais. Je continue à lire ce passage.
Ainsi parle l’Éternel : Inscrivez cet homme Jéconia comme privé d’enfants sur le trône, car nul de ses descendants ne réussira à s’asseoir sur le trône de David (Jérémie 22.24, 30).
David a eu plusieurs garçons et, par eux, de nombreux descendants. En théorie, tous possèdent un droit légal au trône. En haut de l’échelle, les deux fils de David qui nous intéressent sont Salomon et Nathan et en bas de l’échelle ce sont Joseph et Marie qui font partie de leur lignée respective. Les descendants de Jéconia, maudits par Dieu, conservent le droit légal au trône tout simplement parce qu’ils sont descendants de David par son fils Salomon. Cependant, aucun d’entre eux ne le possédera. Or Joseph appartenait à cette filiation privée du droit physique au trône. À cause de son ancêtre Jéconia, Dieu n’aurait pas permis que l’époux de Marie devienne roi, même si Israël avait été une nation libre. Qu’à cela ne tienne, comme le Christ est né miraculeusement conçu par l’entremise du Saint-Esprit et non de Joseph, cette malédiction prophétique ne le concerne pas.
Jésus fait partie de deux lignées royales de David, l’une par Marie et l’autre par Joseph, son père adoptif. Si ce dernier n’est qu’un pauvre charpentier en Galilée plutôt que résidant d’un palais, c’est à cause de l’idolâtrie maladive d’Israël. D’une part, il y a cette malédiction spécifique dont je viens de parler qui pèse sur Joseph, et d’autre part l’Éternel punissait son peuple en le plaçant sous la domination de puissances étrangères se succédant presque sans interruption depuis 600 ans. L’héritage de Joseph avait donc perdu toute signification.
Luc dans son Évangile donne d’autres détails concernant la naissance du Christ. Tout comme Matthieu, il affirme que Jésus naquit d’une vierge et que par conséquent Joseph ne l’avait pas engendré. Donc, Marie ne fut pas infidèle à son mari et le Christ n’est pas un enfant illégitime. Son père est Dieu lui-même et personne d’autre. Luc donne aussi la filiation de Jésus-Christ, mais en passant par Marie et en remontant jusqu’à David, mais par Nathan, un autre de ses fils et non par Salomon ancêtre de Joseph. C’est un peu compliqué, j’en conviens, mais cela souligne l’importance considérable que revêtent les généalogies, et pourquoi elles valent la peine d’être étudiées même si elles sont barbantes.
Verset 16
Pour en revenir à Matthieu, la lignée du Christ qu’il nous donne se termine par :
Jacob eut pour descendant Joseph, l’époux de Marie, laquelle donna naissance à Jésus, appelé le Christ (Matthieu 1.16).
Ce verset rompt avec les 14 précédents où il est répété qu’un homme engendra un fils comme par exemple Abraham engendra Isaac qui engendra et ainsi de suite jusqu’au dénommé Jacob qui engendra Joseph qui n’engendra personne. On aurait logiquement dû avoir : Joseph qui engendra Jésus, mais au lieu de cela le texte dit : Jacob eut pour descendant Joseph, l’époux de Marie, laquelle donna naissance à Jésus, appelé le Christ. Il y a rupture du mouvement du texte. Joseph n’avait strictement rien à voir avec la venue de Jésus-Christ. L’ange Gabriel ne lui a pas demandé son avis. Les 4 Évangiles et tout le Nouveau Testament affirment très clairement que Joseph n’était pas le père de Jésus.
Dans la suite du chapitre, Matthieu va préciser la naissance miraculeuse du Messie et comment elle est l’accomplissement d’une prophétie de l’Ancien Testament. Je ne suis pas étonné que lorsqu’ils entendent cette histoire, la plupart de mes concitoyens ont un petit sourire en coin. En effet, telle qu’elle est décrite, cette naissance est impossible, on est d’accord là-dessus, sauf s’il y a eu un miracle et c’est bien là que le bât blesse, car peu de gens sont prêts à accepter cette possibilité. Au minimum, toute personne intellectuellement honnête devrait reconnaître que les Textes Sacrés, que ce soit le Nouveau Testament ou les prophéties de l’Ancien, enseignent sans équivoque que Marie a miraculeusement donné naissance au Messie. Le seul Jésus historique dont nous avons le récit exact selon ses contemporains est celui qui naquit d’une vierge. Il n’y en a pas d’autre contrairement aux bouquins, films et autres comédies musicales qui sont fabriqués de toutes pièces et dont nous abreuve l’industrie cinématographique.
Les faux prophètes, qui essaient de dire que le Christ historique naquit et vécut comme tout le monde, tirent leurs informations de nulle part. Il n’existe aucun document sérieux pour étayer une thèse contraire à l’enseignement des Évangiles et du Nouveau Testament. Ceux qui nient la conception miraculeuse de Jésus se fondent uniquement sur des a priori, sur une philosophie rationaliste dont le point de départ consiste à rejeter Dieu et tout ce qui est d’ordre surnaturel. Celui qui voudrait se pencher sérieusement sur l’origine du Messie conclura immanquablement que les Écritures sont dignes de foi et que le Christ est né d’une vierge comme l’avaient annoncé les prophètes depuis plus de 4 000 ans.
Dans l’histoire humaine, il n’y a que Jésus qui puisse remplir toutes les conditions nécessaires pour être Roi d’Israël et le seul qui ait accompli toutes les prophéties de l’Ancien Testament concernant la venue du Messie, sa mort et sa résurrection. En tant que premier-né par adoption de Joseph descendant de Salomon, il hérite du droit légal au trône de David, mais pas le droit physique puisque l’Éternel a arraché la royauté de son ancêtre le roi Jéconia comme je l’ai longuement expliqué. Cependant, le Christ est de la postérité de Marie, qui elle descend bien de David, mais par son fils Nathan, une autre lignée que celle de Salomon. Donc, grâce à Marie, Jésus a le droit de s’asseoir sur le trône de David, son ancêtre.
Verset 17
Nous arrivons maintenant au verset 17 du premier chapitre de l’Évangile de Matthieu qui dit ceci :
Il y eut donc en tout quatorze générations d’Abraham à David, 14 de David jusqu’à la déportation à Babylone, et 14 de cette déportation jusqu’au Christ (Matthieu 1.17).
Comme la plupart des généalogies bibliques, celle que nous donne Matthieu n’est pas complète, car elle passe par des raccourcis historiques. Tous les individus de la lignée du Messie ne sont pas mentionnés à l’exception de ceux du premier groupe pour lesquels le texte original grec précise bien : toutes les générations depuis Abraham jusqu’à David sont quatorze. L’auteur divise la généalogie du Christ en trois groupes distincts pour nous donner une vue d’ensemble de l’Ancien Testament en faisant ressortir les personnages principaux ou les plus colorés. Le chiffre 14 a une signification symbolique. En hébreu, chaque consonne a une valeur numérique. Or lorsqu’on additionne les trois lettres du nom de David, cela donne 14.
Versets 18-19
Je continue le texte.
Voici dans quelles circonstances Jésus-Christ vint au monde : Marie, sa mère, était liée légalement à Joseph ; or elle se trouva enceinte par l’action du Saint-Esprit, avant qu’ils n’aient vécu ensemble. Joseph, son futur mari, était un homme bon et droit. Il ne voulait pas la livrer au déshonneur. C’est pourquoi il se proposa de rompre son engagement sans en ébruiter la raison (Matthieu 1.18-19).
Dans une telle situation, la Loi mosaïque était très claire. Elle prescrivait qu’une femme coupable d’infidélité devait être lapidée jusqu’à ce que mort s’ensuive. Or Joseph était un brave homme, un gentleman et pas une forte tête. Il ne désirait pas faire le moindre tort à Marie, même s’il croyait qu’elle lui avait été infidèle. Son amour pour elle lui dicte une séparation en douceur. Si l’éventualité d’un jugement pour adultère était à cette époque fort peu probable, par contre, la honte d’une rupture publique était bien réelle.
La pratique juive permettait une répudiation privée, en présence de deux témoins. Joseph était noble, mais la tradition s’est surtout intéressée à Marie, et à juste titre puisqu’elle a été choisie par Dieu pour devenir la mère du Messie. Il faut aussi dire qu’elle était courageuse d’avoir accepté la proposition de devenir enceinte du Saint-Esprit et mère du Messie. Elle savait qu’elle risquait fort de devenir la risée du petit village de Nazareth, la honte de sa famille et bien sûr de perdre Joseph. D’ailleurs, elle n’a, semble-t-il, même pas essayer de lui expliquer ce qui lui était arrivé. Pourtant dans la simplicité de sa confiance en Dieu, elle répond à l’ange Gabriel ce que nous rapporte l’Évangile de Luc :
Je suis la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon ta parole (Luc 1.38).
Versets 20-21
Je continue le texte de Matthieu.
Alors que Joseph réfléchissait comment rompre sans bruit avec Marie, un ange du Seigneur lui apparut en rêve et lui dit : Joseph, descendant de David, ne crains pas de prendre Marie pour femme, car l’enfant qu’elle porte vient de l’Esprit Saint. Elle donnera naissance à un fils, tu l’appelleras Jésus. C’est lui, en effet, qui sauvera son peuple de ses péchés (Matthieu 1.20-21).
Ici encore une fois on se rend compte que Joseph est quelqu’un de bien, un homme réfléchi, avisé, ne faisant rien par précipitation. Il réfléchit à la situation avant de prendre une décision. C’est alors qu’il reçoit une visite. L’Écriture ne dit pas grand-chose sur l’activité des anges. On sait seulement que lorsque Dieu donne un coup de pouce à son programme pour l’humanité, l’activité des êtres de lumière augmente sensiblement.
Le mot Jésus veut dire l’Éternel donne le salut. Ce verset explique pourquoi le Fils de Dieu est venu. Il ne s’agissait pas de délivrer le peuple d’Israël de la domination des Romains comme plusieurs l’espéraient, mais de sauver les hommes de leurs fautes et de la condamnation éternelle qui pèse sur chaque individu. Le Christ est venu sur terre afin de nous réconcilier avec son Père, le Créateur et nous donner la vie éternelle. C’est pourquoi le nom de Jésus est précieux à toute personne qui se sait coupable et pardonnée de ses fautes.
En français, certains jurent par le nom de Dieu ce qui est déjà un grand mal, mais au moins on n’utilise pas Jésus comme en anglais, ce qui est encore pire. Devant le récit des Évangiles, je suis confronté à la divinité du Christ. Soit, il est ce qu’il a dit être, le Fils de Dieu, parfait et éternel, l’envoyé du ciel conçu dans le sein de la vierge Marie par l’action du Saint-Esprit. Ou bien, il est l’enfant illégitime d’un père inconnu. Et par conséquent, ni lui ni aucun de ses disciples n’ont dit la vérité et Noël est une immense blague de mauvais goût. Il me faut choisir. Pour finir j’aime assez la formule d’un certain Ignace d’Antioche qui en l’an 110 de notre ère a dit ceci : Notre Dieu Jésus-Christ a été, selon le plan divin, porté dans le sein de Marie, issu du sang de David et aussi du Saint-Esprit.
Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.