Genèse 23.10 – 24.21
Chapitre 23
Introduction
Presque tous les Français aspirent à devenir propriétaires et à posséder un petit lopin de terre ce qui est bien naturel ; c’est plus ou moins la même chose dans tous les pays du monde. Chaque fois qu’un régime politique quelle que soit sa couleur, a dépossédé les paysans de leurs terres, le système a fini par capoter. Ce désir d’être chez soi en tant que propriétaire est un besoin universel ; c’est comme s’il était gravé dans nos gènes. En fait, la possession d’un pays fait partie des promesses que l’Éternel a faites à Abraham.
Et puis dans l’Apocalypse, le dernier livre du Nouveau Testament, il est dit que ce monde dans lequel vous et moi habitons sera remplacé par un autre, parfait celui-là, car l’Éternel va éventuellement créer une nouvelle terre et de nouveaux cieux qui appartiendront à tous ceux qui comme Abraham ont eu foi en Dieu.
En attendant que tout cela se réalise, le patriarche est un étranger en territoire hittite et il cherche à acquérir un bout de terrain pour enterrer sa femme Sara qui vient de mourir. Dans ce but, il se rend aux portes de la ville où les sages siégeaient, rendaient la justice et où se faisaient toutes les tractations commerciales.
Versets 10-13
Je continue à lire dans le chapitre 23 de la Genèse.
Or Éphrôn le Hittite siégeait parmi eux. Il répondit devant tous les Hittites. Non, mon seigneur, écoute-moi. Je te donne le champ et la caverne qui s’y trouve. Je t’en fais don en présence des gens de mon peuple pour que tu y ensevelisses le corps de ta femme. Abraham s’inclina profondément devant les gens de la région et il répondit à Éphrôn de façon à être entendu par tous. S’il te plaît, écoute-moi à ton tour. Permets-moi de te payer le prix du champ. Accepte-le de ma part et j’y ensevelirai le corps de ma femme (Genèse 23.10-13).
Ces Hittites sont généreux, très polis et de plus leur parole est digne de foi, car ils ont le sens de l’honneur. En ce temps-là, les transactions se faisaient oralement devant témoins et non par écrit. J’ai dû mal comprendre ce qu’on m’a enseigné à l’école, parce que j’ai toujours eu vaguement l’impression que dans les temps lointains tout le monde était du genre Cro-Magnon homme des cavernes et se baladait avec une énorme massue le doigt sur la gâchette. En réalité, si ces braves Hittites rendaient visite à n’importe quelle ville de notre 21e siècle, ils seraient effarés. Eux ils étaient civilisés, c’est nous les sauvages, qui nous comportons sans foi ni loi. Comme nous sommes venus sur scène après eux, nous avons beau jeu de dire n’importe quoi à leur sujet puisqu’ils ne sont pas là pour se défendre.
Selon les lois hittites, l’acquéreur d’un champ entier devait payer toutes les taxes et s’acquitter de toutes les obligations sociales liées à cet achat. Mais si une petite partie était vendue, le propriétaire principal devait continuer à assumer toutes les responsabilités liées au champ entier. La réponse d’Éphrôn à Abraham est une manière de dire qu’il préfère tout vendre et c’est ainsi que le patriarche l’a compris.
Versets 14-20
Je finis le chapitre.
Alors Éphrôn reprit : Mon seigneur, écoute-moi. Que représente entre nous une terre qui vaut quatre cents pièces d’argent ? Prends-la donc et ensevelis le corps de ta femme. Abraham accepta la proposition d’Éphrôn et lui pesa la somme qu’il avait mentionnée en présence des autres Hittites, à savoir quatre cents pièces d’argent suivant le cours usuel. De la sorte, le terrain d’Éphrôn, qui est à Makpéla, vis-à-vis de Mamré, ainsi que la caverne qui s’y trouvait et tous les arbres sur le terrain et ceux qui l’entouraient passèrent en propriété à Abraham en présence des Hittites et de tous ceux qui étaient venus à la porte de sa ville. Après quoi, Abraham ensevelit sa femme Sara dans la caverne du champ de Makpéla, vis-à-vis de Mamré, c’est à dire d’Hébron, dans le pays de Canaan. Les Hittites garantirent à Abraham la propriété du champ et de la caverne pour qu’il y enterre ses morts (Genèse 23.14-20).
Ce chapitre remet au premier plan le thème de la terre promise ; la transaction effectuée par Abraham a une portée à la fois symbolique et prophétique puisqu’elle lui permet d’acquérir une parcelle de terre qui lui donne pignon sur rue en quelque sorte ; elle constitue sa première propriété dans le pays de Canaan en attendant que ses descendants prennent possession de sa totalité. L’ensevelissement de sa femme Sara à cet endroit prouve qu’Abraham a foi en l’Éternel.
En effet, à cette époque, la règle était de se faire enterrer auprès de ses pères dans le pays de ses ancêtres. En acquérant une sépulture en Canaan, Abraham proclame que le pays que Dieu lui a promis est désormais sa nouvelle patrie. Le champ de Makpéla qu’il s’est acquis représente les arrhes de la future Palestine ; c’est là qu’aujourd’hui s’élève la mosquée d’Hébron, la troisième du monde musulman en importance. À l’intérieur par un trou du plancher, on peut voir la caverne où sont soi-disant enterrés Sara, Abraham, Isaac, ainsi que quelques autres patriarches avec leurs épouses. Je rappelle en passant que la mosquée la plus célèbre est celle de La Mecque en Arabie Saoudite, et la seconde est la coupole du Rocher à Jérusalem dont j’ai déjà parlé.
Chapitre 24
Introduction
Nous arrivons au chapitre 24, qui termine l’histoire d’Abraham et commence celle d’Isaac son fils bien-aimé. Trois événements importants vont marquer sa vie ; les deux premiers sont sa naissance miraculeuse et la menace de mort qui pesa sur lui lorsque son père obéissant à l’Éternel était sur le point de l’offrir en sacrifice. Le troisième est la manière peu ordinaire dont on lui a trouvé une épouse. Les trois événements principaux qui marquent la vie de la plupart des hommes sont la naissance, le mariage et la mort. On a coutume de dire que le seul auquel on peut vraiment participer c’est son mariage, ce qui n’est pas si sûr et ne fut pas du tout le cas pour Isaac.
Les deux institutions universelles que sont le mariage et le gouvernement ont été instituées par Dieu. La première est la base de la famille, la pierre d’angle qui assure force et stabilité à toute société. D’ailleurs, le premier miracle du Christ, le changement de l’eau en vin, s’est fait lors des noces de Cana ; en faisant cela, le Fils de Dieu a mis son sceau d’approbation sur le mariage.
La deuxième institution d’origine divine est un gouvernement qui en théorie du moins respecte les droits fondamentaux de l’homme tels qu’ils sont décrits dans la charte universelle. Sans cela, c’est l’instabilité et le chaos, voire l’anarchie et éventuellement la désintégration de la société. Ces institutions — le mariage et le gouvernement — protègent l’homme contre lui-même en structurant sa vie afin qu’il puisse s’épanouir comme Dieu le veut.
Le chapitre 24 que je vais maintenant couvrir est une belle histoire d’amour, mais d’un style très différent des chansons sentimentales à la mode ou des films, dont nous gave l’industrie cinématographique d’Hollywood. Ce récit est une démonstration de la fidélité de Dieu à la promesse qu’il a faite à Abraham ; cet homme de foi confie un problème à l’Éternel qui le résout.
Versets 1-6
Je commence à lire.
Abraham était un vieillard très âgé. L’Éternel l’avait béni en toutes choses. Il dit à son serviteur le plus ancien qui administrait tous ses biens : Place ta main sous ma cuisse et jure-moi par l’Éternel, le Dieu du ciel et le Dieu de la terre, que tu ne prendras pas pour mon fils une femme parmi les filles des Cananéens, au milieu desquels j’habite, mais que tu iras dans mon pays, au sein de ma parenté, prendre une femme pour mon fils Isaac. Le serviteur lui répondit : Peut-être cette femme ne voudra-t-elle pas me suivre dans ce pays-ci. Devrai-je alors ramener ton fils dans le pays d’où tu es parti ? Garde-toi bien de ramener mon fils là-bas, lui dit Abraham (Genèse 24.1-6).
Isaac avait 40 ans et Abraham 140 ; il ne pouvait donc plus entreprendre un pareil voyage de quelque 800 km lui-même. Comme la mission est très importante, il la confie à son serviteur le plus digne de confiance et le plus dévoué, sans doute Éliézer de Damas. Abraham demande de lui un serment solennel qui signifie que sa responsabilité reste engagée, même si le patriarche venait à mourir.
Éliézer est donc chargé de se rendre à Charân au nord de la Syrie ; c’est dans cette ville que la famille d’Abraham s’était arrêtée après avoir quitté Our, leur ville natale aujourd’hui en Irak. C’est à Charân que le père d’Abraham s’était d’abord fixé. Après sa mort, Abraham avait pris son bâton de pèlerin et s’était rendu au pays de Canaan, où il réside en ce moment. Par contre, Nahor le frère du patriarche était resté à Charân et avait eu beaucoup d’enfants dont la liste est donnée juste avant le récit de la mort de Sara et de l’acquisition d’un terrain funéraire.
La tâche d’Éliézer est donc de trouver pour Isaac une femme qui fasse partie du groupe familial d’Abraham et qui veuille bien déménager, tout quitter pour aller épouser quelqu’un qu’elle n’a jamais vu. À vue humaine, c’est une mission impossible, d’où la suggestion du serviteur d’amener Isaac à Charân, sous-entendu pour qu’il se trouve une femme lui-même.
Abraham refuse catégoriquement. Il est très ferme sur deux points : d’une part, il ne veut pas qu’Isaac épouse quelqu’un du coin, une fille cananéenne à cause de leur idolâtrie, et d’autre part, il ne veut pas non plus que son fils retourne à Charân, car il courrait le risque d’y rester. Or Isaac doit absolument demeurer dans le pays promis où Dieu a conduit le patriarche.
Toutes ces contraintes doivent être satisfaites en même temps à moins qu’Isaac ne reste célibataire ; mais cette option n’est pas envisageable, puisqu’il faut qu’il ait une descendance selon la promesse que Dieu a faite à Abraham. La marge de manœuvre du patriarche est donc très fine ce qui explique la gravité du moment et l’importance de la mission d’Éliézer. La seule solution à ce dilemme est que l’Éternel fasse réussir miraculeusement ce projet.
Versets 7-8
Je continue le texte avec les recommandations d’Abraham à son serviteur :
L’Éternel, le Dieu du ciel qui m’a fait quitter ma famille et le pays où elle s’était établie, qui m’a parlé et m’a promis par serment de donner ce pays-ci à ma descendance, te fera précéder par son ange pour que tu puisses emmener de là-bas une femme pour mon fils. Si cette femme ne consent pas à te suivre, tu seras dégagé du serment que je te demande de prêter ; mais quoi qu’il arrive, tu ne ramèneras pas mon fils là-bas (Genèse 24.7-8).
Abraham apparaît à nouveau comme un homme très pieux ; sa foi repose sur la promesse solennelle que Dieu lui a faite en jurant par lui-même qu’il l’accomplirait. Selon les Écritures, la foi est un acte raisonnable qui repose sur des faits solides et vérifiables ; ce n’est jamais un saut dans le vide les yeux bandés. Abraham a pleinement confiance en l’Éternel qu’il connaît intimement, puisqu’il marche en sa présence depuis de nombreuses années ; il sait qu’Il tiendra ses promesses. Il est donc persuadé qu’il va intervenir afin que la mission d’Éliézer aboutisse ; une épouse attend Isaac, mais elle ne le sait pas encore.
Cependant, le serviteur n’a pas le même calibre de foi que son maître, n’ayant pas fait les mêmes expériences spirituelles que lui ; il lui faut donc une porte de sortie. Voilà pourquoi le patriarche le rassure, lui disant que, si ça ne marche pas, il sera dégagé du serment. Cela dit, il insiste encore sur un point ; il ne veut sous aucun prétexte qu’Éliézer emmène Isaac avec lui ce qui pourtant simplifierait bien les choses.
Versets 9-11
Je continue le texte :
Alors le serviteur mit sa main sous la cuisse d’Abraham son maître et lui jura d’exécuter ses ordres. Par la suite, il prit dix chameaux de son maître et partit en emportant toutes sortes de biens excellents appartenant à son maître. Il prit la direction de la Haute-Mésopotamie, du côté de la ville où habitait Nahor. Arrivé là-bas, il fit s’agenouiller les chameaux près d’un puits, à l’extérieur de la ville. C’était le soir, au moment où les femmes sortent pour puiser de l’eau (Genèse 24.9-11).
Cette région et la ville de Charân sont mentionnées sur des tablettes découvertes en 1933 par l’archéologue français André Parrot à l’emplacement de l’ancienne ville royale de Mari sur l’Euphrate ; on sait même exactement qui la gouvernait à cette époque.
Cette histoire me fait penser aux rois mages qui vinrent adorer le Christ après sa naissance. Le consensus général est que ces trois personnages sont venus, chacun avec son chameau portant l’un des trois cadeaux mentionnés dans l’Évangile. En réalité, c’est tout un convoi qui est venu avec armes, bagages et serviteurs. Le Nouveau Testament nous dit que ces mages qui arrivèrent à Bethléem firent grand bruit et que toute la contrée en fut émue. Il s’agissait donc d’un grand cortège tape-à-l’œil avec des personnalités de haut rang flanquées de leur escorte personnelle. S’il n’y avait eu que quelques chameaux, ils seraient passés incognito ce qui ne fut pas le cas. Au contraire, la caravane qui amena les rois mages devait être très imposante.
Donc, Éliézer partit accompagné d’une caravane de 10 chameaux appartenant à Abraham comme il convenait à un ambassadeur d’un grand chef chargé d’une mission de la plus haute importance. Il disposait de l’usage des biens de son maître comme il l’entendait afin de mener à bien sa mission. Arrivée aux abords de la ville, la caravane s’arrête près d’un puits et les serviteurs font reposer les chameaux sur leurs genoux, ce que font les Bédouins lorsqu’ils prévoient un arrêt prolongé.
Éliézer attend que les femmes viennent puiser de l’eau. En ce temps-là, elles faisaient beaucoup de travaux pénibles ce qui est d’ailleurs toujours le cas dans bien des coins de la planète ; les documentaires, en particulier sur le tiers-monde, le montrent bien. En attendant que les choses se passent et suivant l’exemple de son maître, Éliézer invoque l’Éternel.
Versets 12-14
Je continue le texte.
Alors il pria : Éternel, Dieu d’Abraham mon maître, veuille témoigner ta bonté à mon maître en me faisant rencontrer aujourd’hui celle que je cherche. Voici, je me tiens près de la source et les filles des habitants de la ville vont venir puiser de l’eau. Que celle à qui je dirai : S’il te plaît, penche ta cruche pour me donner à boire et qui me répondra : Bois, et je vais aussi faire boire tes chameaux, soit celle que tu destines à ton serviteur Isaac. Ainsi je saurai que tu témoignes de la bonté à mon maître (Genèse 24.12-14).
Comment Éliézer allait-il trouver la future femme d’Isaac ? Parce que Sara sa mère avait été très belle, on peut supposer qu’il devait choisir un beau brin de fille pour son fils ; pourquoi pas, puisque le sens esthétique nous vient de Dieu ?
Les Puritains qui s’implantèrent aux États-Unis se sont fait une mauvaise réputation à cause de leurs valeurs tronquées ; ils jugeaient la vie austère, menaient une existence spartiate et ne croyaient qu’au travail. De braves gens sous bien des aspects, ils attribuaient malheureusement la beauté au diable. Quel dommage et quelle insulte au Créateur, qui est l’auteur du beau du bon et du vrai.
Cela dit, Éliézer avait besoin d’une aide surnaturelle pour ne pas se tromper. Alors, il demande un signe précis à Dieu qui lui permettra en même temps de tester la complaisance de la jeune fille. Belle, c’est bien, mais il faut aussi qu’elle soit dévouée et travailleuse. Or, faire boire dix chameaux voulait dire descendre au moins 10 fois une longue suite de marches jusqu’à la source pour y puiser un minimum de 100 litres d’eau ; ce n’était donc pas une petite affaire.
Versets 15-16
Je continue :
Il n’avait pas encore fini de parler, que Rébecca arriva, la cruche sur l’épaule. C’était la fille de Betouel, fils de Milka et de Nahor, le frère d’Abraham. La jeune fille était très belle ; aucun homme ne s’était encore uni à elle. Elle descendit à la source, remplit sa cruche et remonta (Genèse 24.15-16).
Rébecca est la petite nièce d’Abraham et comme prévu c’était un beau brin de fille qui aurait remporté un concours de beauté. Éliézer la dévisage et se demande si c’est elle qu’il vient chercher. De toute façon, il s’attend à l’Éternel, parce qu’au final c’est lui qui dirige le cours de la vie de tous ceux qui l’invoquent.
Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.