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10 mai 2022

Genèse 37.34 – 38.30

Chapitre 37

Introduction

Selon une maxime populaire, Au chaudron des douleurs, chacun porte son écuelle. Tôt ou tard, nous connaîtrons tous la souffrance. Même si aujourd’hui tout va bien, je ne peux présager du lendemain. La peine s’exprime de façon très différente selon les cultures ; pour certains, l’honneur consiste à souffrir en silence, tandis que d’autres manifestent leur détresse avec force et tapage, peut-être parce que comme l’écrit Racine dans Andromaque : La douleur qui se tait n’en est que plus funeste. Jacob se montre très démonstratif à cause de sa détresse, après que ses fils lui ont appris que son préféré a été déchiré par une bête sauvage.

Versets 34-36

Je finis le chapitre 37 de la Genèse.

Alors Jacob déchira ses vêtements et mit un tissu de sac sur ses reins. Il porta longtemps le deuil de son fils. Tous ses fils et toutes ses filles vinrent pour le consoler ; mais il refusa toute consolation et dit : Non ! C’est dans le deuil que je rejoindrai mon fils au séjour des morts ! Et il continua à pleurer Joseph. Les Madianites vendirent Joseph en Égypte à Potiphar, un haut fonctionnaire du pharaon, chef de la garde royale (Genèse 37.34-36).

À cette époque, ceux qui portaient le deuil échangeaient leurs vêtements confortables pour une toile de sac grossière faite en poils de chèvre ou de chameau. Il est étonnant que les 10 frères, responsables d’avoir vendu Joseph comme esclave, essaient de consoler leur père ; qu’est-ce qu’ils peuvent bien pouvoir lui dire ? Il est encore plus étonnant qu’aucun d’entre eux n’ait craqué et avoué leur crime collectif. Ces hommes ont décidément un cœur de béton. Et c’est la raison pour laquelle par la bouche d’un prophète de l’Ancien Testament, l’Éternel dit :

Je vous donnerai un cœur nouveau et je mettrai en vous un esprit nouveau, j’enlèverai de votre être votre cœur dur comme la pierre et je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai en vous mon propre Esprit (Ézéchiel 36.26-27).

Cette parole anticipe la venue du Christ et l’influence incommensurable qu’il a exercée sur toutes les sociétés où son enseignement a été propagé. Dans sa douleur, Jacob fait référence au séjour des morts ; c’est la première fois qu’apparaît cette expression typique de l’Ancien Testament. Au moment du décès, l’âme se sépare du corps et va dans un endroit qui s’appelle sheôl en hébreu.

Ce lieu a deux parties qui sont séparées par un abîme infranchissable. La première est réservée aux méchants, les incrédules qui en attendant d’être jugés sont tourmentés par leur conscience. La deuxième partie est le lieu des morts bienheureux où les patriarches sont dits être recueillis auprès de leurs pères. Cet endroit est appelé le paradis ou le sein d’Abraham par Jésus-Christ. Lorsque le brigand sur la croix a demandé au Christ :

souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton règne.

Jésus lui a répondu :

Vraiment, je te l’assure : aujourd’hui même, tu seras avec moi dans le paradis (Luc 23.42-43).

Jacob veut porter le deuil de son fils Joseph qu’il croit mort, jusqu’à ce que pour lui sonne l’heure de rejoindre ses ancêtres décédés. La Genèse a présenté Joseph comme un homme de destinée ; il est le fils préféré du patriarche qui l’habille comme un prince. Mais il est aussi sujet à d’étranges rêves prémonitoires qui le mettent en valeur. Comme il s’en vante, il tombe victime de la jalousie, fourberie et cruauté de ses frères.

Jacob est profondément traumatisé par la disparition de Joseph, mais il ne fait que recevoir la monnaie de sa pièce ; il a été trompé tout comme lui-même avait berné son propre père. Joseph a été vendu à Potiphar, qui était soit le chef de la garde royale soit le ministre de la justice. Derrière les rideaux, l’Éternel tire les ficelles ; il va se servir de ce drame pour assurer l’avenir de son peuple et pour accomplir la promesse qu’il a faite à Abraham.

Chapitre 38

Introduction

Nous arrivons au chapitre 38 qui est un intermède dans le récit de Joseph, mais il s’agit ici encore d’une autre histoire sordide, autant utile que le serait une cinquième patte à la chèvre de Monsieur Séguin. On souhaiterait qu’elle ne soit pas dans les Textes Sacrés, mais le Saint-Esprit, l’auteur divin derrière les écrivains bibliques, a voulu y faire figurer ces événements bizarres, incongrus et dignes d’un mauvais roman. C’est une sombre histoire de mœurs qui concerne Juda, l’ancêtre de la tribu d’où seront issus les rois David, Salomon et le Messie.

Dans ce chapitre, apparaissent des noms qui figurent également dans la généalogie du Christ qui nous est donnée au tout début de l’Évangile selon saint Matthieu. Tous les fils de Jacob furent pour lui une source de chagrin d’une manière ou d’une autre à l’exception de Benjamin. Sa vie n’a pas été de tout repos. Alors qu’il était à Charân, au service de son oncle Laban, Jacob passait son temps à déjouer ses ruses. De toute évidence, il n’a pas pris le temps de s’occuper de ses gosses qui s’élevaient tout seuls, plutôt mal que bien. Il n’a pas suivi le commandement que l’Éternel avait donné à Abraham concernant l’éducation des enfants et qui dit :

J’ai choisi Abraham pour qu’il prescrive à ses descendants et à tous les siens après lui de faire la volonté de l’Éternel, en faisant ce qui est juste et droit (Genèse 18.19).

À présent, la famille de Jacob est en danger de tomber dans l’immoralité et l’idolâtrie qui tissaient tous les aspects de la vie des habitants du pays de Canaan. Si le clan de Jacob y reste, au bout d’une génération ou deux, elle ne se distinguera plus des autres peuplades et l’Éternel ne pourra atteindre l’objectif de se constituer un peuple qui lui appartienne et l’honore. C’est pourquoi Dieu organisa le départ de Joseph en Égypte ainsi que sa montée en puissance. Plus tard, il y enverra tout le clan de Jacob afin qu’il y prospère et se consacre à l’adoration du seul vrai Dieu.

Versets 1-11

Je commence à lire cette drôle d’histoire du chapitre 38 en compressant tout au long.

À la même époque, Juda se sépara de ses frères et alla vivre chez un habitant d’Adoullam nommé Hira. Il y fit la connaissance de la fille d’un Cananéen nommé Choua, il l’épousa et s’unit à elle. Elle devint enceinte et lui donna un fils : il l’appela Er. Elle devint encore enceinte et mit au monde un fils qu’elle appela Onân. Elle eut encore un troisième fils qu’elle appela Chéla. Juda prit pour Er, son premier-né, une femme nommée Tamar. Jugeant Er mauvais, l’Éternel le fit mourir. Alors Juda dit à Onân : Tu connais ton devoir de proche parent du défunt : épouse ta belle-sœur pour donner une descendance à ton frère. Onân savait que les enfants qui naîtraient ne seraient pas pour lui. Chaque fois qu’il avait des rapports avec sa belle-sœur, il laissait tomber sa semence à terre pour éviter de donner une descendance à son frère. Son comportement déplut à l’Éternel qui le fit aussi mourir. Alors Juda dit à Tamar, sa belle-fille : Reste veuve dans la maison de ton père jusqu’à ce que mon fils Chéla soit devenu adulte. Car il disait : Il ne faut pas que celui-ci meure aussi comme ses frères. Tamar retourna donc dans la maison de son père (Genèse 38.1-11).

Juda, fils de Jacob et Léa, part en terre étrangère. Par les exemples de Caïn et d’Ésaü, nous savons que c’est toujours un mauvais choix. Juda choisit de quitter le clan familial pour des motifs purement personnels qui ne sont pas précisés, mais qui contrastent fortement avec les raisons de l’absence de Joseph. Plus loin, le texte indique que Juda et son ami Hira faisaient l’élevage des moutons.

La première faute de Juda fut de quitter le clan familial et de s’intégrer au milieu cananéen. La deuxième qui est la suite logique de la précédente fut d’épouser une fille du pays ; il en a deux fils.

Dans les documents en notre possession qui datent de cette époque, Er et Onân désignent des noms de tribus. L’aîné meurt prématurément à cause de sa méchanceté, mais aucun détail ne nous est donné. Juda veut maintenant que son deuxième fils épouse Tamar selon la coutume en vigueur en Canaan, en Assyrie et plus tard en Israël, appelée loi du lévirat. Cette règle stipulait qu’un fils non marié devait donner une descendance à la veuve de son frère mort sans héritier.

Onân refuse et s’arrange pour que sa belle-sœur ne tombe pas enceinte de lui ; une pratique qui porte d’ailleurs son nom, puisqu’il s’agit de l’onanisme. Il désirait avoir sa propre descendance et hériter d’une part plus importante de l’héritage de son père dont les affaires marchaient fort. Ça ne lui a pas réussi puisque lui aussi trouve prématurément la mort. Il est évident qu’aucun de ces deux hommes n’avait embrassé les valeurs de la lignée d’Abraham. Juda aurait quand même pu se poser des questions et revoir son style de vie, mais au lieu de cela il continue sa vie comme si rien de particulier ne s’était passé.

Versets 12-16

Je continue.

Longtemps après cela, la fille de Choua, femme de Juda, mourut. Quand les jours de deuil furent passés pour Juda, il monta avec son ami Hira à Timna, pour la tonte de ses moutons. Quelqu’un en informa Tamar lui disant : ton beau-père monte à Timna pour la tonte des moutons. Alors elle ôta ses habits de veuve, se couvrit le visage d’un voile et, ainsi déguisée, s’assit au carrefour sur la route de Timna ; car elle voyait bien que Chéla était devenu adulte sans qu’on le lui ait donné pour mari. Juda aperçut cette femme et la prit pour une prostituée, car elle avait le visage voilé. Il s’approcha d’elle au bord du chemin et lui dit : Permets-moi d’aller avec toi ! Car il n’avait pas reconnu sa belle-fille (Genèse 38.12-16).

L’expression, la fille de Choua, indique que l’épouse cananéenne de Juda avait eu cette fille d’un premier mariage ; elle aussi meurt sans qu’on sache pourquoi ce qui fait que Juda a perdu trois enfants dont ses deux fils ce qui ressemble fort à un jugement de Dieu aussi contre Juda. À cette époque, la tonte des moutons était l’occasion d’une grande fête, quelque chose comme le carnaval de Rio : bals musettes, amusements tous genres, règlements de comptes et prostituées à gogo. Celles-ci avaient pour habitude de se tenir aux carrefours pour accrocher le visiteur de passage. Tamar, la belle-fille de Juda ayant compris qu’elle n’obtiendra pas le troisième fils de Juda, se déguise en prostituée sacrée.

Ces femmes étaient attachées au culte à caractère sexuel de la déesse de la fécondité appelée Astarté ou Achéra. Ces prostituées activement présentes lors des fêtes religieuses étaient l’objet d’une certaine considération parmi le peuple. Leurs activités étaient censées assurer la fertilité de la terre des femmes et des troupeaux. Au-delà de ses méthodes discutables, on peut dire que Tamar a de la suite dans les idées, étant prête à tout pour avoir une postérité.

Ce récit n’est pas une simple histoire de sexe, mais bien plutôt une sérieuse affaire de descendance à assurer coûte que coûte. Avoir une postérité était la première des valeurs des peuplades de cette époque, avant même les richesses. Tamar profite donc de la fête pour se déguiser en prostituée afin de faire l’amour à son beau-père dont elle veut un enfant. Juda va mordre à l’hameçon et nous en sommes à la phase de négociation.

Versets 16-23

Je continue.

Elle répondit : que me donneras-tu pour venir avec moi ? Je te ferai apporter un chevreau du troupeau, lui dit-il. D’accord, répondit-elle, à condition que tu me donnes un gage jusqu’à ce que tu l’envoies. Quel gage veux-tu que je te donne ? Ton cachet, le cordon qui le tient et le bâton que tu as en main. Il les lui remit et s’unit à elle, et elle devint enceinte. Elle se leva et partit ; elle ôta son voile et remit ses habits de veuve. Juda chargea son ami d’apporter le chevreau à cette femme et de retirer les gages qu’il lui avait donnés. Mais celle-ci resta introuvable. Hira interrogea les hommes de l’endroit : Où est cette prostituée sacrée qui se tenait sur le chemin à Énaïm ? Ils lui répondirent : Il n’y a jamais de prostituée sacrée à cet endroit. Il revint dire à Juda : Je ne l’ai pas trouvée, et les gens de là-bas ont même affirmé qu’il n’y a jamais eu de prostituée sacrée à cet endroit. Alors Juda s’écria : Qu’elle garde ce qu’elle a ! Ne nous rendons pas ridicules. Quoi qu’il arrive, moi j’ai envoyé ce chevreau, et toi, tu n’as pas retrouvé cette femme (Genèse 38.16-23).

Tout a marché comme prévu ; le stratagème de Tamar a réussi et la voilà enceinte de son beau-père. Les trois objets qu’elle a demandés en gage sont extrêmement personnels : le cachet était un petit cylindre gravé que l’on roulait sur les documents en argile en guise de signature. Il était percé dans le sens de la longueur et on y passait un cordon pour le porter au cou. Le bâton mentionné est ouvragé et l’emblème de l’autorité du chef de tribu.

Juda a tenu parole en envoyant le chevreau promis pour les services de la prostituée, mais tout compte fait cela ne lui a pas coûté grand-chose. Comme il croit que cette femme a disparu dans la nature, pour lui c’est une affaire classée. Il ne se doute pas que le piège que sa belle-fille a posé va se refermer sur lui. En effet, Tamar attend jusqu’à ce que son état de femme enceinte se remarque pour le faire savoir à Juda ; elle a bien l’intention de le coincer pour avoir failli de lui donner son troisième fils en mariage.

Verset 24

Je continue.

Environ trois mois après cela, on vint dire à Juda : Tamar, ta belle-fille, s’est prostituée, et même : la voilà enceinte suite à cela. Qu’on la fasse sortir et qu’elle soit brûlée vive ! (Genèse 38.24).

Ce n’étaient pas des tendres en ce temps-là ; quand il s’agissait de punir, ils n’y allaient pas de main morte. À y réfléchir, l’Europe du Moyen Âge, l’inquisition et son système judiciaire parfaitement injuste étaient pires encore. Quoi qu’il en soit, être brûlée vive était le châtiment légal pour certaines prostituées dans le Proche-Orient ancien et plus tard en Israël. Juda est un bel hypocrite ; il n’a pas hésité à condamner Tamar alors que c’est grâce à des types comme lui que la prostitution marche. De plus, il va découvrir qu’il est coupable d’inceste. La révolution sexuelle des années 60 n’avait rien de nouveau ; cette prétendue liberté de coucher à tout va avec qui bon vous semble a toujours existé dans tous les milieux païens idolâtres comme en Canaan.

Cette pratique entraînera d’ailleurs le jugement de Dieu. Déjà, Sodome et Gomorrhe ainsi que les villes de leur ressort avaient été réduites en cendre du temps d’Abraham, à cause de leur conduite sexuelle et de leur cruauté. La majorité des Cananéens seront eux aussi anéantis lors de la conquête de la Palestine par Israël pour finalement disparaître totalement. La conduite de Juda explique pourquoi l’Éternel allait forcer le clan d’Israël à déménager et aller en Égypte. C’est aussi la raison pour laquelle Dieu avait envoyé Joseph en éclaireur pour ainsi dire, afin d’y préparer le terrain. Et c’est exactement ainsi que les choses vont se passer.

Versets 25-30

Je finis ce chapitre.

Comme on jetait Tamar dehors, elle envoya un message à son beau-père : C’est de l’homme à qui appartiennent ces objets que je suis enceinte. Reconnais, je te prie, à qui sont ce cachet, ces cordons et ce bâton. Juda les reconnut et s’écria : Elle est plus juste que moi ; elle a fait cela parce que je ne l’ai pas donnée pour femme à mon fils Chéla. Il ne s’unit plus jamais à elle. Quand vint le moment de la naissance, il s’avéra qu’elle portait des jumeaux. Pendant l’accouchement l’un d’eux présenta une main ; Mais il retira sa main, et c’est son frère qui vint au monde. Et on le nomma Pérets (qui veut dire brèche). Ensuite son frère naquit et il fut appelé Zérah (qui signifie lever du soleil) (Genèse 38.25-30).

Tamar a eu le souci de donner une descendance à son mari défunt, donc à Juda, contrairement à lui qui n’a pas tenu sa promesse. Dans la généalogie du Christ qui est dans l’Évangile de Matthieu, Tamar y figure comme une aïeule du roi David, de Joseph le mari légal de Marie qui donna naissance à Jésus (Matthieu 1.3).

Ce chapitre qui interrompt l’histoire de Joseph est riche d’enseignements. D’abord, il contraste le comportement dissolu de Juda avec la conduite morale que Joseph a montrée. Ensuite, il souligne que les promesses faites doivent être tenues. En troisième lieu, avec Juda, cette histoire rappelle le danger qui guettait les fils de Jacob de se mêler aux Cananéens ; et finalement, il introduit Pérets fils de Juda ancêtre du roi David et de Jésus. Dieu utilise les méfaits des hommes pour atteindre ses objectifs.

Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.

avril 19 2024

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